Immobilier Pays Basque : Le tribunal suspend la réglementation « anti-airbnb »

La règlementation anti-location saisonnière de courte durée en vigueur au 1er juin dans l’agglomération Pays Basque est suspendue.

Immobilier Bayonne

© adobestock. En novembre, une manifestation pour le droit au logement avait rassemblé entre 6.500 et 8.000 personnes dans les rues de Bayonne.

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Dernière minute : Les élus locaux ont voté samedi 9 juillet un aménagement des mesures anti-airbnb. On vous explique tout dans notre article : Immobilier Pays Basque, la règlementation anti-airbnb revue et corrigée.

Le tribunal administratif de Pau a suspendu vendredi 4 juin la réglementation de la Communauté d’agglomération Pays basque destinée à freiner l’expansion des meublés touristiques, dont la plateforme Airbnb est le symbole, sur un territoire au marché immobilier tendu.

Plus de 16.000 meublés touristiques sont recensés dans les 24 communes concernées, soit une augmentation de 130% entre 2016 et 2020 selon l’Agence d’urbanisme Atlantique et Pyrénées (Audap).

Meublés de tourisme : Ce que disait l’encadrement au 1er juin 2022

L’explosion de l’attractivité immobilière du Pays Basque notamment depuis le début de la crise sanitaire s’est traduit notamment par un accroissement exponentiel de meublés de tourisme loués sur de courtes durées.

Face à l’ampleur de cette situation, les élus communautaires ont voté le 5 mars 2022 un nouveau règlement entré en vigueur le 1er juin 2022 visant à encadrer le développement des meublés de tourisme sur 24 communes : Ahetze, Anglet, Arbonne, Arcangues, Ascain, Bassussarry, Bayonne, Biarritz, Bidart, Biriatou, Boucau, Ciboure, Guéthary, Hendaye, Jatxou, Lahonce, Larressore, Mouguerre, Urrugne, Saint-Jean-de-Luz, Saint-Pierre d’Irube, Urcuit, Ustaritz, Villefranque.

Ce règlement prévoot qu’à partir du 1er juin au Pays Basque, l’autorisation de changement d’usage d’un local d’habitation en meublé de tourisme est soumise au principe de compensation.

Kezako la compensation ? La compensation consiste à transformer en logement des locaux non dévolus à l’habitation (bureau, commerce…). Cette compensation permet ainsi de reconstituer la « perte » d’un logement par la création d’un autre logement. Ce local doit être de surface au moins équivalente à celui faisant l’objet d’une location saisonnière et être situé dans la même commune. Une autorisation dite « de changement d’usage » est alors délivrée.

A qui s’adresse le règlement ? Ce règlement s’adresse aux personnes physiques comme morales (société civiles immobilières notamment). Il prévoit toutefois la délivrance d’autorisations temporaires sont délivrées aux personnes physiques sans compensation dans deux cas :

  • les locations dites « mixtes » : location étudiante (9 mois minimum) et location en meublés de tourisme (3 mois). Cette autorisation est délivrée pour un an (renouvelable).
  • les meublés de tourisme associés à la résidence principale. Cette autorisation est délivrée pour une durée de deux ans dans la limite d’un logement par propriétaire.

A noter :

  • Les résidences principales mises en location pour une durée cumulée inférieure à 120 jours ne sont pas soumises à la demande de changement d’usage.
  • Les autorisations déjà délivrées dans le cadre du précédent règlement (autorisations temporaires de 3 ans) restent valables jusqu’à l’expiration de la date de validité prévue dans le cadre de l’arrêté correspondant, le règlement n’ayant pas d’effet rétroactif.

Vendredi 3 juin, un référé suspend la règlementation anti locations meublées touristiques

Le tribunal administratif, saisi début mai d’un référé-suspension formé par un collectif de plus de 50 requérants, propriétaires et sociétés de conciergerie, a estimé dans son ordonnance qu’il existait un « doute sérieux » sur la légalité de cette délibération, adoptée en mars et en vigueur depuis mercredi 1er juin.

Il juge que la mesure de compensation, qui oblige les propriétaires à produire, dans la même ville et avec une surface équivalente, un bien sur le marché locatif à l’année pour compenser un logement transformé en meublé touristique, « est susceptible de méconnaître le principe de proportionnalité« .

Dans les 24 communes basques classées en zone tendue, « la rareté voire l’inexistence de locaux éligibles à la compensation« , ne permettent pas à l’obligation posée d’être satisfaite, écrivent les juges des référés. Les éléments produits par l’Agglomération Pays basque « ne permettent pas d’établir que la pénurie alléguée serait d’une telle ampleur qu’elle ferait obstacle à ce que de nombreuses personnes puissent se loger« , ont également estimé les juges.

« C’est un immense soulagement pour eux car ils avaient retiré leurs annonces des plateformes depuis mercredi et il y avait un risque de licenciements économiques« , a réagi Maître Victor Steinberg, avocat du collectif requérant.

Audience au fond à venir

Après ce référé-suspension, moyen d’urgence fondé sur la forme de la délibération, une audience au fond, sur le contenu même de la mesure et sur sa légalité, aura lieu dans les prochains mois.

De son côté, le président de la Communauté d’agglomération Pays basque et maire de Bayonne Jean-René Etchegaray a vivement réagi lors d’une conférence de presse, jugeant cette « décision cataclysmique » en faveur de « ces pauvres sociétés civiles immobilières qui ont explosé ces deux dernières années dans un but purement lucratif ».

« Notre collectivité ne comprend pas l’appréciation des juges de considérer que ces sociétés sont prises au dépourvu« , a abondé Daniel Olçomendy, vice-président de l’intercommunalité basque.

« L’intérêt collectif a perdu face à l’intérêt privé, le sur-rendement gagné face au droit à se loger au Pays basque« , a-t-il déploré.

Les élus de l’agglomération ont annoncé qu’ils allaient « se pourvoir devant le Conseil d’Etat« , pointant un « message très négatif envoyé à la population« . Et de prévoir des « réactions à la hauteur de ce jugement« .

A Bayonne, des centaines de manifestants dénoncent la suspension de la règlementation anti Airbnb

Quelques 300 personnes ont manifesté mercredi 8 juin à Bayonne pour dénoncer la suspension par la justice administrative d’une réglementation locale destinée à freiner l’expansion des meublés touristiques au Pays basque, où les difficultés à se loger entrainent des tensions.

Réunis devant le siège de la Communauté d’agglomération Pays basque à l’appel du collectif « Vivre et se loger au Pays! », qui regroupe une trentaine d’organisations du monde associatif, syndical, culturel et politique, les manifestants ont distribué des autocollants « Airbnb nous expulse » pour dénoncer « une décision qui n’a pas de sens ». Une délégation de manifestants a ensuite été reçue par les élus pour « réfléchir à un futur règlement » afin de « contre-attaquer fort », selon les organisateurs.

12 000 logements vacants et 42 000 résidences secondaires au Pays basque

La Communauté d’agglomération du Pays basque (158 communes) évalue à 12.000 le nombre de logements vacants et 42.000 celui des résidences secondaires, pour un territoire d’un peu plus de 300.000 habitants en croissance démographique.

Dans 24 communes de l’agglomération basque en zone tendue, plus de 16.000 meublés touristiques sont recensés actuellement, soit une augmentation de 130% entre 2016 et 2020, selon l’Agence d’urbanisme Atlantique et Pyrénées (Audap).

Des inscriptions « Le Pays Basque n’est pas à vendre » en langue basque ont fleuri depuis l’an passé sur des devantures d’agences immobilières et de maisons à vendre, ravivant le souvenir des années 2007/2008 quand avaient eu lieu des sabotages et plastiquages d’enseignes immobilières ou de résidences secondaires. En novembre, une manifestation pour le droit au logement avait rassemblé entre 6.500 et 8.000 personnes dans les rues de Bayonne.

Par MySweetImmo avec AFP
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