Primaire de la gauche : demandez le programme logement de Sylvia Pinel

Vous vous demandez ce que prévoit le programme de l’ancienne ministre du Logement, Sylvia Pinel, en matière d’immobilier et de logement ?Suivez le guide.

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Vous vous demandez ce que prévoit le  programme de l’ancienne ministre du Logement, Sylvia Pinel,  en matière d’immobilier et de logement. Suivez le guide. Extraits choisis d’une interview réalisée par Olivier Marin et Ludovic Clerima pour Explorimmo.

Explorimmo : Quel bilan tirez-vous de la politique du logement du Gouvernement actuel et que pensez-vous de la loi ALUR ?

Sylvia Pinel (Parti radical de gauche) : Lorsque le portefeuille du ministère du Logement m’a été confié, la construction était en baisse : les chiffres accusaient une diminution d’environ 20 %. Avec les mesures que j’ai mises en place, la construction a retrouvé un haut niveau de production, en hausse de + 20 %, sans que les prix de vente ou les loyers n’augmentent.

Le marché du logement a retrouvé stabilité et croissance, car les mesures que j’ai souhaitées, en partenariat avec les professionnels, agissent sur tous les segments du marché. Je rappelle également que la première partie du quinquennat, avant mon arrivée, avait dû subir les conséquences de la forte évolution des prix due à la politique très inflationniste menée par le gouvernement de François Fillon qui avait mis en place des produits comme le Scellier qui ont provoqué une forte augmentation des prix et qui avaient totalement déstabilisé les marchés immobiliers.

Lorsque j’étais ministre du Logement, j’ai appliqué la loi ALUR avec pragmatisme et souplesse pour redonner aux Français du pouvoir d’achat et sécuriser les relations entre bailleurs, locataires et professionnels de l’immobilier. J’ai également priorisé la publication des décrets d’application en donnant la priorité aux mesures dont l’impact est fortement positif pour le pouvoir d’achat des ménages.

Abroger la loi ALUR aujourd’hui, comme le propose François Fillon, reviendrait à être contre :

  • Le renforcement de la lutte contre l’habitat indigne,
  • La transparence et la modernisation de la demande et de l’attribution des logements sociaux,
  • La régulation des professionnels de l’immobilier,
  • L’encadrement des activités de syndic et des honoraires de location.
  • La protection renforcée des personnes âgées dans le cadre des congés pour vente.

Faut-il poursuivre l’encadrement des loyers mis en place à Paris, prévu à Lille en février 2017 et qui doit suivre dans d’autres agglomérations ?

Sylvia Pinel (Parti radical de gauche) : L’encadrement des loyers doit reposer sur une observation fine du marché et des méthodologies validées par un comité scientifique indépendant. Ces conditions ne sont  aujourd’hui remplies qu’à Paris, dont l’observatoire a été agréé en fin d’année 2014, et à Lille, où l’observatoire se met en place. Cet encadrement ne doit concerner que des secteurs très tendus.

Bien appliqué, il peut constituer une réponse pour créer une relation de confiance avec les investisseurs tout en permettant une maîtrise de l’évolution des loyers. J’observe qu’à Paris, compte tenu de ces conditions, l’encadrement des loyers n’a pas eu d’effet négatif et permet d’éviter des abus constatés sur les loyers parisiens. Mais, pour moi la priorité reste la poursuite de la relance de la construction.

Les mesures phares de Sylvia Pinel

1/Alléger les droits de mutation
2/Réviser les valeurs locatives cadastrales
3/Taxer davantage la rétention foncière plutôt que la cession
4/Prolonger le dispositif Pinel et développer une offre locative en favorisant le retour des investisseurs institutionnels
5/Territorialiser la politique du logement en fonction des besoins

Que préconisez-vous dans le domaine de la fiscalité immobilière ? Le logement est-il trop taxé ?

Sylvia Pinel (Parti radical de gauche) : Oui, et c’est au détriment de la mobilité des ménages et donc de l’emploi. Il faut progressivement réduire les frottements fiscaux liés aux mutations. Les droits de mutation, particulièrement élevés en France, créent une forte rigidité sur le marché du logement et gagneraient à devenir progressifs et à être allégés. Les droits de mutation à titre onéreux (DMTO) dont les taux ont récemment augmenté représentent entre 70 % et 80 % des frais de transaction immobilières acquittés par l’acquéreur injustement appelés « frais de notaires ». Les coûts liés à la mutation pénalisent particulièrement la primo-accession.

De plus, il faut moderniser l’assiette de taxation sur la détention et l’occupation en révisant les valeurs locatives cadastrales pour qu’elle reflète la valeur réelle et le niveau de confort taxé. Sur le foncier, il faut progressivement basculer vers une taxation qui porte d’avantage sur la rétention plutôt que sur la cession.

Si vous êtes élu, poursuivrez-vous la politique d’incitation à l’investissement locatif qui existe depuis plus de 30 ans, le dispositif Pinel s’éteignant fin 2017 ?

Sylvia Pinel (Parti radical de gauche) : Oui, sans hésitation. Le dispositif d’investissement locatif qui porte mon nom est une réussite. Il est plébiscité par les professionnels et permet de mettre sur le marché des logements avec un loyer maîtrisé, pour les jeunes ménages ou des actifs en mobilité en particulier, ce qui favorise une offre abordable.

L’offre du « dispositif Pinel » correspond à un segment très important pour la bonne santé du marché immobilier. Les élus disent également que c’est un signe de compétitivité pour les villes qui en disposent.

Faut-il revoir les aides à la pierre ?

Sylvia Pinel (Parti radical de gauche) : Je suis très attachée au modèle français du logement social qui a fait ses preuves et qui permet aujourd’hui de produire environ le tiers de la construction neuve en France. Les aides à la pierre ont un effet d’entrainement fort et elles ont permis cette augmentation significative de la construction de logements sociaux. Il faut continuer. Le système a été conforté par une meilleure capacité d’intervention des offices (grâce aux prêts de haut de bilan par exemple …).

Je suis donc favorable à conforter ce modèle français du logement social, tout en le modernisant et en accompagnant mieux  les organismes de logements sociaux.

Etes-vous favorable à l’instauration d’un statut du bailleur privé comme le réclame certains syndicats professionnels ?

Je suis favorable aux mesures qui peuvent sécuriser les propriétaires bailleurs, notamment :

  • Aux mesures qui peuvent pérenniser les dispositifs fiscaux sur la durée, ce qui permet de sécuriser les investisseurs ou les propriétaires,
  • A la remise en location des logements vacants,
  • Aux dispositifs incitatifs permettant les travaux d’entretien et la rénovation énergétique comme je le propose dans mon projet.

Si vous êtes élue, quelles sont les premières mesures que vous prendrez dans le logement ?

Sylvia Pinel (Parti radical de gauche) : Je poursuivrai le plan de relance du bâtiment en favorisant les mesures lisibles et pérennes. Je développerai l’accession sociale à la propriété : les dispositifs actuels (PSLA) ont une efficacité qui reste limitée : il faut favoriser d’autres dispositifs, comme le Bail Réel Solidaire. Je développerai une offre locative en favorisant le retour des investisseurs institutionnels sur le marché du logement.

Je poursuivrai le mouvement de modernisation du monde HLM, en partenariat avec les acteurs, pour maintenir la production à un niveau élevé et favoriser les conditions de réhabilitation du parc social. Je lancerai un ambitieux programme de rénovation des copropriétés, avec une priorité affirmée sur les travaux de rénovation thermique et sur les copropriétés fragiles. Je continuerai à alléger et simplifier les normes en déclassant les normes de niveau législatif du code de la construction et en développant l’expérimentation.

Comment construire plus, là où sont les besoins, et sans dépenser plus ? Construire 500 000 logements par an est-il un objectif atteignable ?

Sylvia Pinel (Parti radical de gauche) : Il est admis que le besoin quantitatif est de l’ordre de 450 000 logements au niveau national, ce que le plan de relance que j’ai engagé permet d’atteindre aujourd’hui. 500 000 logements peut rester un objectif, mais la recherche purement quantitative de cet objectif ne doit pas encourager l’action de court terme : pour être efficace, il faut privilégier les actions pérennes qui agisse de manière vertueuse sur les marchés, sans inflation sur les prix.

De plus, un objectif purement national ne permet pas de concentrer les efforts sur les territoires les plus en difficulté. Les besoins en logement sont hétérogènes, au vu des disparités territoriales actuelles, et devraient être traités comme tels. Des études montrent que les perspectives de la demande en logements sont contrastées entre les régions, mais aussi à l’intérieur de certaines d’entre elles.

Il faut donc répondre aux besoins des territoires, par une meilleure territorialisation de la politique du logement été en fonction des besoins.

Faut-il régionaliser les politiques du logement ?

Sylvia Pinel (Parti radical de gauche) : Il faut agir à deux niveaux.  La définition de la politique du logement et des principaux dispositifs doit rester nationale, pour que les mesures soient lisibles, stables et bien intégrées par les professionnels. Prenez par exemple le dispositif qui porte mon nom : s’il a été un succès, c’est qu’il est lisible, connu des français et qu’il s’inscrit dans la durée ; le caractère national explique le succès.

En revanche, dans l’application des politiques, il faut aller vers plus de territorialisation de la politique du logement, avec en particulier une plus forte implication des régions et des métropoles qui définissent également les règles d’urbanisme.

La loi SRU remplit-elle sa mission ?

Sylvia Pinel (Parti radical de gauche) : La loi SRU atteint globalement ses objectifs et constitue un moteur de production de logement social efficace. La production de logements sociaux a quasiment doublé depuis 2002 et les communes déficitaires (1 000 environ) rattrapent pour 2/3 d’entre elles le retard enregistré.

Au quatrième bilan (2011-2013, et les chiffres du cinquième bilan qui seront connus début 2017 confirmeront cette tendance) près de 140 000  logements sociaux ont ainsi été réalisés, soit un objectif atteint à plus de150 %.

Cependant, certaines communes restent récalcitrantes et face à l’urgence des besoins, la loi Egalité Citoyenneté que j’ai initiée permettra d’accélérer les projets de logements sociaux. Pour les communes récalcitrantes, il faut faire preuve de fermeté et utiliser les outils existants (droit de préemption, reprise des permis de construire, pénalités, etc.)

© Explorimmo© Arnaud Bouissou – MELT/MEDDE

Par Ariane Artinian