Copropriété et travaux d’accessibilité aux personnes à mobilité réduite : ce qui va changer au 1er juin 2020

Les travaux d’accessibilité PMR pour les personnes à mobilité réduite ou en situation de handicap à la demande d’un copropriétaire passent d’un régime d’autorisation à un régime d’information, avec toutefois possibilité d’opposition de l’assemblée générale au 1er juin 2020.

Copropriete Handicap
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Une réforme pour prévenir les contentieux en copropriété

L’article 215 de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique dite loi ELAN annonçait la parution d’une ordonnance visant à réformer en profondeur le droit de la copropriété des immeubles bâtis.  Cette ordonnance n°2019-1101 du 30 octobre 2019 (portant réforme du droit de la copropriété des immeubles bâtis) est parue au journal officiel du 31 octobre 2019.

L’objectif de cette réforme est d’aboutir à une modernisation du modèle afin d’améliorer la gestion des immeubles en copropriété et de prévenir les contentieux en constante croissance.

L’ordonnance comprend ainsi six titres et non moins que 42 articles, qui pour la quasi totalité entreront en vigueur au 1er juin 2020. Parmi ceux-ci, le nouvel article 25-2 de la loi du 10 juillet 1965 qui a notamment des implication sur les travaux d’accessibilité aux personnes à mobilité réduite ou en situation de handicap.

Aujourd’hui, les travaux d’accessibilité à la demande d’un copropriétaire sont soumis à l’autorisation de l’AG des copropriétaires

A ce jour, un propriétaire désireux d’effectuer à ses frais de tels travaux dans sa copropriété doit solliciter l’autorisation de l’assemblée générale des copropriétaires, dès lors que ces travaux n’affectent pas la structure de l’immeuble ou ses éléments d’équipement essentiels, (à la majorité simple de l’article 24 alinéa e de la loi du 10 juillet 1965 [1]) et sous réserve que la destination de l’immeuble soit préservée.

Difficile dans ces conditions pour un copropriétaire en situation de déficience moteur ou de perte d’autonomie d’obtenir la mise en place de ces travaux (installation d’une rampe d’accès, un monte-escalier, ascenseur, etc.) sans le consentement d’une partie des copropriétaires.

A partir du 1er juin , il suffira d’informer le syndicat des copropriétaires

A compter du 1er juin prochain, cette procédure d’autorisation mute en une simple procédure d’information du syndicat des copropriétaires. En effet, l’ordonnance du 30 octobre précitée crée pour ce faire un nouvel article 25-2 dans la loi du 10 juillet 1965.

Cet article, dédié uniquement à cette question des travaux d’accessibilité, institue un régime de plein droit, en ces termes : « Chaque copropriétaire peut faire réaliser, à ses frais, des travaux pour l’accessibilité des logements aux personnes handicapées ou à mobilité réduite qui affectent les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble. A cette fin, le copropriétaire notifie au syndic une demande d’inscription d’un point d’information à l’ordre du jour de la prochaine assemblée générale, accompagnée d’un descriptif détaillé des travaux envisagés. »

Il s’agit désormais d’une information préalable, inscrite à l’ordre du jour de l’assemblée générale des copropriétaires, ne nécessitant pas de vote. Cette procédure paraît a priori plus souple que celle applicable jusque là.

…en amont de la réalisation des travaux

En réalité l’article 25-2 est complété par un alinéa 3 qui vient considérablement nuancer cette procédure d’information, puisque ce texte dispose :  « L’assemblée générale peut, à la majorité des voix des copropriétaires, s’opposer à la réalisation de ces travaux par décision motivée par l’atteinte portée par les travaux à la structure de l’immeuble ou à ses éléments d’équipements essentiels, ou leur non-conformité à la destination de l’immeuble. » 

Dans ces conditions, la volonté de faciliter ces travaux d’accessibilité sur les parties communes paraît atteinte en ce qu’ils ne nécessitent plus de vote. Il s’agit cependant d’une information préalable à leur réalisation et non postérieure. En effet, le texte vise les travaux « envisagés » et permet l’opposition de l’assemblée en amont de leur réalisation.

L’assemblée générale pourra toutefois s’y opposer en respectant les règles du jeu

Ainsi l’assemblée générale, à la simple majorité des voix exprimées des copropriétaires présents, représentés ou ayant voté par correspondance (article 24 nouveau de la loi de 1965), pourra toujours s’opposer, de manière motivée, dès lors que ces travaux seront susceptibles de porter atteinte à la structure de l’immeuble ou à ses éléments d’équipements essentiels, et dès lors comme précédemment qu’ils n’affecteront pas la destination de l’immeuble.

En pratique cette démarche suppose toutefois que le syndic inscrive systématiquement cette question d’une éventuelle opposition à l’ordre du jour de l’assemblée générale, à la suite du point d’information sollicité par le copropriétaire demandeur.  A défaut l’opposition des copropriétaires, même motivée, ne sera pas régulière (en application de l’article 13 du décret du 17 mars 1967).

A noter : en cas de refus motivé de l’assemblée générale, le pouvoir d’autorisation du juge, prévu par les dispositions de l’article 30 de la loi du 10 juillet 1965, ne paraît pas possible à mettre en œuvre ici, celui-ci se limitant aux seules demandes relevant de l’article 25 alinéa b.

Pendant les travaux, le copropriétaire exerce les pouvoirs du maître d’ouvrage

L’article 25-2 en profite pour préciser que jusqu’à la réception des travaux d’accessibilité, le copropriétaire exerce les pouvoirs du maître d’ouvrage (habituellement dévolus au syndicat des copropriétaires). A ce titre, il devra veiller singulièrement à contrôler la qualification et les assurances des entreprises amenées à réaliser ces travaux dans les parties communes.

Naturellement le syndicat des copropriétaires peut conserver la qualité de maître d’ouvrage sur de tels travaux, lorsque c’est l’assemblée générale qui est à l’origine de la réalisation de ces travaux en application de l’article 24 alinéa d de la loi du 10 juillet 1965.

Bon à savoir : des subventions et/ou crédits d’impôts peuvent dans certains cas être obtenus pour faciliter le financement de ces travaux d’adaptation de l’immeuble (rampe d’accès, monte-personne, etc.).  L’ADIL (Agence départementale pour l’information sur le logement) ou la MDPH (Maison départementale des personnes handicapées) du lieu de situation de l’immeuble peuvent vous accompagner à cet égard.

[1] Précisons que l’alinéa e de l’article 24 précité est quant à lui voué à évoluer, il concernera à l’avenir la suppression des vide-ordures (qui passe de la majorité de l’article 25 à celle de l’article 24).

Cyril Sabatie, avocat : Avocat, spécialiste en droit immobilier