Jean-Marc Torrollion (FNAIM) : La revanche des immobilière villes moyennes et des zones rurales

Jean-Marc Torrollion, président de la FNAIM décrypte les tendances du marché immobilier au micro d’Ariane Artinian.

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L’attrait des Français pour la pierre, le dynamisme du marché immobilier, le ralentissement de la hausse des prix dans les grandes villes, le recul des prix de l’immobilier à Paris, la hausse des prix pour la première fois depuis 10 ans en zone rurale, la réalité du nouveau DPE pour les Français au 1er juillet, la politique du logement… Zoom sur le marché immobilier avec Jean-Marc Torrollion, président de la FNAIM au micro de Mon Podcast Immo. Extraits choisis.

Mon Podcast Immo : Quel bilan immobilier pour le premier semestre ?

Jean-Marc Torrollion : Nos chiffres confirment l’extrême vitalité du marché de la transaction en France, et notre sondage IFOP/FNAIM l’intérêt des Français pour l’immobilier. Lorsque l’on demande aux Français si la conjoncture est favorable pour l’achat d’un bien immobilier, ils nous répondent « oui » à 58 %. Lorsque l’on demande si la conjoncture est favorable pour vendre un bien immobilier, ils nous répondent « oui » à 55 %. Ces résultats signifient que nous sommes sur un marché très équilibré et dynamique.

Nous constatons de surcroit que tous les secteurs de l’activité immobilière sont concernés.

C’est le bon moment pour investir dans l’immobilier locatif (pour 59 % des Français), pour acheter un bien après avoir revendu son logement et pour devenir propriétaire en tant que primo-accédant (pour 70 % des Français).

Mon Podcast Immo : Devenir propriétaire pour la première fois est tout de même de plus en plus compliqué compte tenu du resserrement des contraints bancaires…

Jean-Marc Torrollion : Les contraintes bancaires se sont resserrées, la facilité pour obtenir un crédit est jugée favorable pour seulement par 44 % des Français, mais cela n’empêche pas la dynamique du marché.

Nous constatons que 12 % des transactions se font sans apport personnel, 24 % avec un apport personnel de moins de 20 000 €.

Près de 45 % des Français fournissent un apport entre 20 000 et 200 000 €.

Mon Podcast Immo : Comment les Français envisagent-ils la suite au niveau des prix ?

Jean-Marc Torrollion : Ils sont 55 % à considérer que les prix ont augmenté ces 6 derniers mois et ils sont 60% à penser qu’ils augmenteront encore.

Il y a une conscience aiguë de la réalité du marché, pour autant, ils ne considèrent pas que la période n’est pas favorable pour les bonnes affaires (55 %).

Dans l’allocation des actifs, l’épargne n’apporte plus rien, les actions sont relatives et risquées. Le seul placement, qu’il soit réalisé à titre d’habitation principale ou d’investissement, qui est peu relatif et peu risqué, c’est l’immobilier.

Mon Podcast Immo : Comment se portent les prix, depuis le déconfinement ?

Jean-Marc Torrollion : Si l’on regarde de la 11e à la 50e ville de France, la hausse cette année a été de 7,2 %. Elle a été 2 fois supérieure à la hausse moyenne des premières villes de France. Pour la première fois depuis 10 ans, nous connaissons une hausse des prix dans les 28 000 communes rurales de plus de 2,4 %. Cela signifie que le marché et la demande s’expriment fortement, peut-être plus fortement dans nos villes moyennes et en zones rurales.

Cela est corroboré par un autre chiffre, celui des offres de vente. Nous avons constaté la plus forte baisse des annonces de vente en 6 mois en zone rurale et dans les petites villes de France (- 34 %).

Pour la première fois, ce sont les maisons qui augmentent (+ 5,2 % en 2021, contre + 2,6 % en 2020 et 1,4 % en 2019), plus que les appartements. Cela se traduit par la hausse des demandes de maisons, une demande pour 64 % des Français. Le nombre de transactions, en termes de maisons individuelles, a connu une hausse de 3 points.

Mon Podcast Immo : Vous constatez un recul des prix à Paris de 0,9 %. Que signifie ce recul ?

Jean-Marc Torrollion : Selon moi, la demande internationale est moins présente, les investisseurs sont prudents suite au phénomène Airbnb et au retrait des étudiants, qui ont créé un marché locatif avec une baisse des loyers.  

Il y a beaucoup de prudence et de sélectivité pour les personnes s’exposant sur ce marché.  Les biens sont moins bien placés, de moins bonne qualité et de moins en de moins chers.

Selon moi, il n’est pas possible de prédire une chute des prix à Paris, mais il est certain que la capitale est plus exposée à des phénomènes d’expatriation compte tenu du télétravail.

Cependant, si la demande internationale reprend et que l’activité se remet en place normalement, Paris devrait reprendre des couleurs.

Mon Podcast Immo : Y a-t-il d’autres métropoles qui connaissent un recul des prix ?

Jean-Marc Torrollion : Pas pour l’instant. Cependant, sur les grandes métropoles, il y a des prix qui augmentent de manière considérable. En effet, Rennes enregistre une hausse de 5,5 % de ses prix, + 5,4 % à Rouen et + 5,5 % à Orléans. A Toulouse ou Bordeaux, où les prix avaient beaucoup augmenté, la hausse se situe entre 1 et 2 %.

La dynamique des prix dans les métropoles est 2 fois inférieure, à celle que nous constatons dans les villes moyennes.

Mon Podcast Immo : Comment cette dynamique peut-elle être impactée, dès juillet, par le nouveau DPE ?

Jean-Marc Torrollion : Le DPE va classer des millions de logements en termes d’émissions de gaz à effet de serre et de source d’énergie, en re calculant les coûts énergétiques par rapport au logement. Les Français vont découvrir la réalité du parc F et G, biens qui pourraient devenir indécents rapidement.

Cette notion de valeur verte, de régulation par les prix et d’impossibilité de louer est une grande inconnue.

Nous sommes tout de même convaincus que les biens F et G vont connaître un mouvement de rénovation ou de désinvestissement dans le parc locatif privé. Nous anticipons ce risque de désinvestissement sur le parc locatif, un des piliers de la mobilité française. La moitié de ce parc, d’ici 2034, sera considérée comme indécente. Il va falloir prendre des mesures, notamment avec le doublement du déficit foncier imputable sur le revenu ; l’élection De Normandie, dans l’ancien, des biens F ou G qui seraient revendus.

L’électricité est avantagée contrairement au gaz. Près de 4,1 millions de biens sont classés A, B ou C, chauffés au gaz. Ils seront un million de moins à être très bien classé à l’issue du nouveau DPE.

Mon Podcast Immo : Qu’attendez-vous des politiques au niveau réglementaire ?

Jean-Marc Torrollion : Nous attendons des réglementations simples, compréhensibles ainsi qu’un accompagnement fiscal avec le doublement du déficit imputable sur le revenu qui n’a pas été touché depuis 1995. Nous attendons l’extension de la loi De Normandie dans l’ancien et aussi que les professionnels soient exemptés du permis de louer et de la déclaration préalable de mise en location, chose admise par le Sénat.

Nous attendons une simplification du diagnostic technique global dans nos copropriétés et le fait que nous puissions pouvoir délivrer congé au locataire lors de rénovation énergétique importante, ainsi qu’un accompagnement avec ma prime rénov au dela de 2022.

J’appelle à faire attention à ne pas engendrer un phénomène inflationniste sur les travaux. Nous souhaitons que les biens ne soient pas rendus indécents avant 2040.

Mon Podcast Immo : Quels conseils donner aux différents acteurs du marché ?

Jean-Marc Torrollion : Le conseil que je donne aux professionnels de l’immobilier est de se former très rapidement sur les enjeux de la nouvelle loi énergétique. La Fédération Nationale de l’Immobilier propose des formations. Ils doivent se former afin de pouvoir répondre aux questions des clients de manière fiable, de réaliser un bon diagnostic et une bonne analyse des enjeux de rénovation.

Les vendeurs et les acquéreurs doivent s’appuyer sur des professionnels.

Les acquéreurs ont intérêt à anticiper la nouvelle législation dans leur approche et d’avoir le financement des travaux nécessaires et d’en réaliser les négociations. Ils peuvent exiger le nouveau DPE.

Je conseille également aux vendeurs de bien connaître la législation de faire faire le nouveau diagnostic de performance énergétique et aux professionnels de le conseiller.

Par Ariane Artinian