Immobilier & Construction : Lettre ouverte de Lauranne Schied au Premier Ministre
Lauranne Schied, dirigeante de LSRE, société Bcorp qui produit des projets immobiliers durables, s’adresse au Premier Ministre et demande un engagement fort et clair pour sauver le secteur de l’immobilier et de la construction.
Monsieur le Premier Ministre,
Je me permets de vous écrire aujourd’hui pour vous alerter sur la situation dramatique que traverse actuellement le secteur de l’immobilier et de la construction en France. Nos activités, qui représentent un pilier essentiel de l’économie nationale et du bien-être de nos concitoyens, sont exsangues. Le secteur, au bord de l’implosion, a un besoin urgent de retrouver sa place en tant que priorité nationale.
La construction et l’immobilier ne sont pas de simples marchés économiques. Ils façonnent notre quotidien, structurent nos territoires et garantissent l’accès à un logement digne pour tous. Pourtant, la conjoncture actuelle menace sérieusement l’équilibre de notre secteur. Entre l’inflation, l’augmentation des taux d’intérêt et les di icultés d’accès au crédit, nous nous retrouvons dans une situation critique.
Le secteur du bâtiment subit une véritable dégringolade. Les permis de construire ont chuté de plus de 20 % en un an, et les faillites chez les promoteurs ont augmenté de 40 %. Selon la Fédération française du bâtiment (FFB), 300 000 emplois seraient menacés. Les prévisions sont sombres : 90 000 emplois détruits dans la construction et l’immobilier d’ici fin 2024, et 150 000 mi-2025, en raison de l’effondrement du logement neuf qui se poursuit avec la chute des mises en chantier en 2023. Les entreprises, petites et grandes, peinent à survivre. Les coûts de construction explosent, les chantiers s’arrêtent ou sont reportés, les faillites s’accumulent. Nous nous battons contre vents et marées, mais nous sommes à bout. Nous sommes résilients, mais épuisés, et surtout avec le sentiment d’être abandonnés par le gouvernement en pleine tempête.
Des plans sociaux en cascade
Chaque semaine, nous entendons parler d’un nouveau plan social. Cela ne nous amuse pas de devoir licencier nos collaborateurs. Nous, les promoteurs et constructeurs, souffrons de vivre dans cette incertitude et cette forme de précarité que le gouvernement a, jusqu’ici, créée pour notre secteur.
Je suis un exemple de cette transformation nécessaire. En tant que promoteur immobilier écologique B-Corp spécialisé dans la réhabilitation, je m’engage dans une démarche zéro béton et développe des projets à fort impact sociétal. Je fais ma part du travail. Mais je ne peux rien faire seule. Pas sans financement, pas sans le soutien de la politique gouvernementale. Et dans tout cela, nous sommes tellement résilients que nous continuons à développer et à lancer les projets qui nourriront les prochaines années, en espérant qu’elles soient plus favorables.
Des incertitudes fiscales qui pèsent sur le secteur
Cependant, l’incertitude fiscale dans laquelle nous nous trouvons fait fuir les fonds pour lesquels l’immobilier est déjà un « red flag ». Les investisseurs se retirent progressivement, refroidis par des perspectives incertaines. Ce sont des milliers d’emplois directs et indirects qui sont en danger, et autant de projets de logements, d’équipements publics et d’infrastructures indispensables pour la transition écologique et énergétique qui risquent de ne jamais voir le jour.
Il y a urgence. Si cette crise immobilière doit durer encore 24 ou 36 mois, personne ne tiendra. Nous sommes conscients des enjeux environnementaux et de la nécessité d’une transformation profonde de nos pratiques. Nombreux sont ceux qui dans notre secteur ont entrepris ou souhaiteraient entreprendre des efforts pour réduire leur empreinte carbone, améliorer l’efficacité énergétique des bâtiments et promouvoir des constructions plus durables. Mais ces efforts sont vains sans une politique volontariste à l’échelle nationale, permettant aux acteurs du secteur de construire sereinement.
Le secteur a besoin d’un engagement fort
Nous attendons du gouvernement un engagement fort et clair. Nous vous demandons, Monsieur le Premier Ministre, de faire de l’immobilier et de la construction une priorité. Il est impératif d’agir sans délai. Sans une mobilisation rapide et forte de l’État, c’est tout un pan de notre économie, de notre tissu social et de nos ambitions écologiques qui risque de s’effondrer. La construction et l’immobilier ne peuvent être relégués au second plan. Ils sont le fondement de notre société et doivent, de toute urgence, redevenir une priorité nationale.
Nous espérons, Monsieur le Premier Ministre, que vous saurez entendre cet appel et agir en conséquence pour sauvegarder et revitaliser un secteur qui en a grandement besoin.