Lutte anti blanchiment : Les agents immobiliers rappelés à l’ordre par la Commission Nationale des Sanctions !

Dans le cadre de la lutte contre le blanchiment des capitaux et le terrorisme, les agents immobiliers doivent être au fait de leurs obligations et prendre un des informations sur leurs clients. A défaut, ils s’exposent à des sanctions. En 2018, la Commission Nationale des Sanctions a prononcé 89 sanctions concernant des agences immobilières.

© mysweetimmo/adobestock

 0

Qu’est-ce que la Commission des Nationale des Sanctions ?

Institution indépendante, présidée par Francis Lamy, conseiller d’Etat, la Commission Nationale des Sanctions (CNS) est chargée de sanctionner les manquements aux obligations issues du dispositif de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme et précisées dans le Code Monétaire et Financier. Elle surveille les sociétés de domiciliation, les opérateurs de jeux et de paris, les antiquaires et galeries d’art, les professionnels du secteur du luxe, les agents sportifs et les intermédiaires immobiliers s’occupant de la vente, de la location et aussi les syndics de copropriété. L’exercice de leur activité expose en effet ces professions au risque d’être utilisées pour réaliser des opérations de blanchiment des capitaux et de financement du terrorisme. Pour les intermédiaires immobiliers, c’est la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) qui saisit la CNS.

Quels sont les risques de blanchiment dans l’immobilier ?

« Les biens immobiliers peuvent être des investissements de valeur élevée et de fort rendement, et ils sont particulièrement attractifs dans un contexte de taux d’intérêt faibles, précise le rapport de la Commission Nationale des Sanctions. Leur valeur peut donner lieu à une sous ou surévaluation. Ils sont des vecteurs d’intégration de fonds d’origine illicite dans l’économie légale. »

Dans un marché immobilier extrêmement dynamique, le risque de blanchiment existe « particulièrement pour des opérations dans le secteur de l’immobilier de luxe et de prestige, mais il n’est pas absent dans le cas d’opérations portant sur des actifs d’une valeur plus modeste, pouvant être utilisés par exemple pour blanchir des profits issus du trafic de stupéfiants ou de la fraude fiscale« .

Par ailleurs, les contrats de location sont potentiellement utilisables à des fins de blanchiment, notamment lorsque les loyers sont payés en espèces avec des fonds d’origine illégale. De fait, le dispositif contre le blanchiment est étendu depuis la fin 2018 à l’activité des agents immobiliers apportant leur concours à la location immobilière.

Quels sont les manquements signalés par la Commission Nationale des Sanctions ?

Manquements CNSEn 2018, la CNS a prononcé 89 sanctions concernant des agences immobilières (70%). Ces sanctions incluent 33 interdictions d’exercer, 4 avertissements, 2 blâmes et 33 sanctions pécuniaires.  La CNS sanctionne le plus fréquemment les manquements à l’obligation de formation et d’information des collaborateurs sur la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, et à l’obligation de lettre en place des systèmes d’évaluation et de gestion des risques », explique Fracnis Lamy, son président dans un entretien exclusif accordé à Ariane Artinian. Elle sanctionne également les manquements portant sur l’obligation d’identification et de vérification de l’identité du client et des bénéficiaires effectifs.

Quelles sont les sanctions prononcée pour les intermédiaires immobiliers ?

Sanctions CNSL’an passé, 9 sanctions pécuniaires sur 8 ont atteint un montant supérieur ou égal à  5000 euros. Ces sanctions financières sont les plus souvent accompagnées d’interdictions temporaires d’exercice de l’activité avec sursis.

Exemple, sanction du 28 mars 2018 (n°2017-17). Le contrôle a porté sur une société installée en Île-de-France, ayant pour activité exclusive la transaction immobilière de luxe et de prestige, au sein de trois agences. Elle travaillait avec des agents commerciaux indépendants. Elle était adhérente à un syndicat professionnel. Quatre griefs ont été retenus dont le manquement à l’obligation de recueillir des informations sur le client et la relation d’affaires, l’agent immobilier ayant apporté son concours à plusieurs opéra- tions de vente, sans rechercher la provenance des fonds. Pour la société, une interdiction d’exercice d’une durée d’un an avec sursis et une sanction pécuniaire de 10 000 euros ont été prononcées et, à l’encontre du dirigeant, une interdiction tempo- raire de son activité pour une durée d’un an avec sursis. La publication des sanctions dans deux journaux a été décidée.

Quelles sont les éléments que doit vérifier un intermédiaire immobilier ?

Pour être en règle avec les obligations en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et le terrorisme présentées ci-dessus, les intermédiaires immobiliers doivent justifier systématiquement l’identité de leurs clients et l’origine des fonds et mettre en place des systèmes d’évaluation et de gestion des risques. La loi leur impose d’identifier et de vérifier l’identité de leurs clients, et de conserver ces éléments pendant 5 ans.

Qu’il s’agisse d’une transaction ou d’une location immobilière, votre intermédiaire immobilier doit donc vous demander votre pièce d’identité. Pour faire son métier correctement et suivre la règlementation, il cherchera aussi à se renseigner sur le lieu de  votre résidence principale,  votre activité professionnelle, le niveau de vos revenus ou de votre patrimoine.

Dans le cas où l’opération immobilière implique une opération personne morale, sachez encore que votre interlocuteur devra se renseigner sur les bénéficiaires effectifs de l’opération, le lieu d’implantation de la société, son secteur d’activité, sa nature juridique, sa  date de création ou encore  l’éventuel recours à la domiciliation.

 

Par Ariane Artinian