Immobilier et urbanisme : « Dark Store », le gouvernement serre la vis

En considérant les dark stores comme des entrepôts, le gouvernement souhaite freiner leur implantation dans les centres villes.
L’analyse de Charles Borkowski, SVA avocats.

Appli Gorillas, flink sur un smartphone

© adobestock

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Les dark stores, magasins fantômes et nuisances

Phénomène du e-commerce, les « dark stores » ou « magasins fantômes » se multiplient dans nos centres villes.

Ces magasins n’accueillent aucune clientèle et sont exclusivement destinés à l’entreposage et à la préparation des commandes passées par la clientèle grâce à une application mobile dédiée.

L’intérêt du concept et de garantir aux clients une livraison extrêmement rapide (le plus souvent, dans les 15 minutes), ce qui implique un maillage très resserré des « dark stores » dans les centres urbains des grandes métropoles.

Si l’idée peut séduire, les riverains de ces magasins fantômes ont très rapidement fait part de leur mécontentement au regard des nuisances induites (camions de livraison tôt le matin ou tard le soir pour réapprovisionner la « dark store », allées et venues des livreurs, stationnement des livreurs en attente de la préparation des commandes).

Les dark stores, des objets urbanistiques non identifiés

De leur côté, de nombreux élus locaux ont pointé le remplacement de certains commerces « classiques » – qui participaient à la vie des centres villes – par ces magasins fantômes. Et ils ont tenté de trouver les outils pour limiter leur implantation.

Mais ils se sont rapidement heurtés à la difficile qualification juridique de ces « dark stores » au regard des règles d’urbanisme applicables.

Pas tout à fait commerces, pas tout à fait entrepôts, les « dark stores » sont à ce jour de véritables objets urbanistiques non identifiés.

Dark Stores et autorisations d’urbanisme

Le gouvernement a publié, en mars 2022, une instruction assez claire pour faciliter l’instruction par des demandes d’autorisations d’urbanisme des « dark stores ».

Mais l’exercice de qualification a priori dans le cadre d’une demande de permis de construire ou d’une déclaration préalable est toujours très délicat.

A cela s’ajoute le fait que certains pétitionnaires n’hésitent pas à brouiller les pistes en faisant apparaître dans leurs dossiers de permis de construire ou de déclaration préalable des « espaces clientèle » ou des « comptoirs de retrait » afin d’éviter la qualification d’entrepôts, qui sont le plus souvent prohibés en centre-ville.

Les dark stores seront bientôt considérés comme des entrepôts

Sollicité par les élus locaux, le gouvernement a entamé une consultation publique depuis le mois de juillet.

Au cours d’une réunion qui s’est tenue mardi 6 septembre 2022, Olivia Grégoire, ministre chargé des PME et du commerce, a déclaré devant des élus locaux que les « dark stores » seront désormais considérées comme des entrepôts, sans exception.

Un arrêté sera prochainement publié.

Cela devrait permettre aux élus locaux de freiner considérablement l’implantation de nouvelles « dark stores » dans les centres villes.

Mais il y a fort à parier que de nombreux contentieux se noueront devant le juge administratif et que les acteurs du e-commerce (Gorillas, Getir, Frichti…) adapteront leur concept à cette nouvelle donne.

Sans parler du sort qui sera réservé aux « dark stores » existantes et aux « drives » piétons des enseignes de la grande distribution qui risquent d’être les victimes collatérales de ce nouveau paradigme.

Par Charles Borkowski, SVA Avocats
Charles Borkowski est conseil  en droit de l’urbanisme et en droit de l’expropriation (phases administrative et judiciaire) au cabinet SVA avocats.