« Le  BTP affronte les vents contraires de la conjoncture », Grégoire Leclercq

Grégoire Leclercq, Directeur général délégué du Groupe EBP, fait le point sur la situation du BTP qui doit affronter les vents contraires de la conjoncture pour satisfaire à la demande de constructions plus contrainte.

Grégoire Leclercq

© Groupe EBP

Grégoire Leclercq, Directeur général délégué du Groupe EBP

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Après une année 2022 heurtée par la hausse du prix des matériaux et les retards à rattraper suite à la pandémie, les artisans du BTP vont devoir faire face à des vents contraires pour satisfaire la demande de constructions de logements et d’aménagements urbains. 

Tout d’abord, même si l’étau se desserre légèrement sur le financement des projets des Français, beaucoup d’établissements bancaires ont néanmoins fait montre de prudence dans la délivrance des prêts immobiliers. Cette situation a eu pour conséquence de réduire le nombre de logements neufs. Il est à espérer que la revalorisation des livrets d’épargne réglementés qui financent en partie l’immobilier relance le marché de la maison individuelle en chute de 26% fin 2022 et avec lui les appartements collectifs qui ont marqué un repli de 16%. Il n’est pas étonnant dès lors que la production de béton prêt à l’emploi ait baissé de 4,7% pour atteindre 9 millions de m³.

Le marché de l’ancien pourrait cependant être une source d’opportunités pour les artisans. En effet, il apporte un chiffre d’affaires dans le secteur de l’amélioration et de l’entretien des bâtiments de plus de 2,3% par rapport à l’an passé.

Ensuite, le prêt à taux zéro (PTZ) a été relancé dans une nouvelle formule, même si ce dispositif ne cible que l’accession à la propriété des ménages à revenus modestes et intermédiaires souhaitant acquérir leur résidence principale. S’il va permettre aux primo-accédants d’avancer dans leur réalisation, il ne règle pas la problématique du parc dans son ensemble, soumis à des objectifs de réduction d’énergie et d’isolation. Ceci alors même que la France consent un effort car la rénovation énergétique s’accroît de 2%.

Gestion complexe des ressources humaines

Du côté des Travaux Publics, les tensions inflationnistes sur les coûts de production se relâchent mais pas les incertitudes concernant la prise de commandes et le climat de confiance des collectivités, en proie à des réductions de la commande publique. Il en va de même pour les artisans du Bâtiment qui, s’ils honorent des chantiers, demeurent dubitatifs à ce stade. Les perspectives d’activité, générales comme personnelles, sont jugées moins bonnes : les TPE et PME stabilisent leur effectif et n’envisagent pas d’embauches supplémentaires. Par ailleurs, 60 % d’entre elles déclarent toujours éprouver des difficultés de recrutement, même si la formation des apprentis se déroule dans un bon contexte. 

Ces problématiques de ressources humaines supposent des arbitrages. D’un côté, ils doivent mettre un frein à l’augmentation des coûts du travail et des salaires ; de l’autre, ils ne pourraient pas produire davantage avec leurs moyens actuels s’ils recevaient plus de commandes.  Ainsi, ¼ des entreprises sont actuellement incapables d’accroître leur production en cas de commandes supplémentaires.

Jeux d’équilibre 

Même si des incertitudes conjoncturelles demeurent, les entreprises du secteur tentent donc de compresser les charges et de maintenir un niveau d’activité suffisant pour ne pas entamer leurs marges et leur trésorerie. Après les difficultés d’acheminement des matériaux et l’envolée des prix de ce dernier, le BTP va être contraint de réviser ses tarifs. La hausse de l’énergie et des carburants, le relèvement des grilles tarifaires de leurs fournisseurs vont les amener à répercuter ces augmentations. Elles devraient être lissées sur les trois mois à venir.  

Les artisans comme les dirigeants de TPE/PME vont devoir jongler avec leurs paramètres comptables et financiers et franchir le pas de la digitalisation à la fois pour contrôler les cours instables des matériaux, pour suivre les chantiers et assurer un bon back office aux clients mais aussi pour pérenniser leur entreprise. On notait, du fait des aléas conjoncturels, 1 852 défaillances d’entreprises à la fin du trimestre 2022. Et 9 854 entreprises créées, soit une hausse de 2,9%.

2023 semble marquer une véritable étape où face aux perturbations conjoncturelles, les artisans, capitaines à la barre, vont devoir maîtriser de nombreux paramètres externes à la profession en plus de répondre aux défis écologiques qui pèsent sur la transition de tout un métier. Souhaitons bon vent au Bâtiment !

Par MySweetImmo