Immobilier : Olivier Klein parti, le logement mal loti?
Un petit tour et puis s’en va : un an après avoir été investi ministre de la Ville et du Logement, Olivier Klein repart déjà, un symbole des difficultés de son administration de peser face à Bercy, pointent plusieurs acteurs du milieu.
Depuis l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron en 2017, le portefeuille du Logement a changé de titulaire et de périmètre à chaque remaniement, quand il n’a pas tout simplement disparu.
Cette fois, à l’ancien maire de gauche de Clichy-sous-Bois succède un duo: chargé du Logement, le maire de Dunkerque Patrice Vergriete, et chargée de la Ville la députée marseillaise Sabrina Agresti-Roubache.
Peu connus, les deux décrochent leur premier poste au gouvernement. Mais le fait qu’ils soient séparés suscite déjà quelques craintes.
« Au-delà des personnes, ce qui nous préoccupe un peu, c’est le fait d’avoir scindé les deux« , s’inquiète Christophe Robert, délégué général de la Fondation Abbé Pierre.
Qui, par exemple, va s’occuper de l’Agence nationale de la rénovation urbaine (Anru), instrument-clé de la politique de la ville mais lié de très près au monde du logement social ?
Emmanuelle Cosse, présidente de l’Union sociale pour l’habitat (USH) qui représente les bailleurs sociaux, s’est dite « scandalisée » par le rattachement du ministère de la Ville au ministère de l’Intérieur plutôt qu’à celui de la Cohésion des territoires.
« C’est fou, c’est une régression totale. J’ai l’impression que c’est une droitisation très forte de la vision de la ville, et surtout, ça dénote que ce gouvernement ne comprend rien aux enjeux de la ville », s’insurge-t-elle.
A contre-courant, Loïc Cantin, président de la Fédération nationale de l’immobilier (Fnaim), se félicite de la séparation des portefeuilles de la Ville et du Logement « parce que les nombreux enjeux liés au logement nécessitaient un ministère de plein exercice« .
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« Pas très rassurant »
Mais au-delà de l’architecture du gouvernement et des personnalités nommées, « la question qui s’est posée avec le ministre Klein et qui va se poser avec le ministre Vergriete, c’est quel poids pour pouvoir porter une politique du logement, et quelle est l’intention de l’exécutif ?« , s’interroge Christophe Robert. « On est dans un grand flou, et évidemment, ce n’est pas très rassurant« .
« Ce que nous a montré cette première année de gouvernement Borne, c’est que le sujet n’est pas que la compétence des ministres en place, le sujet c’est est-ce qu’ils pèsent dans les arbitrages ?« , relève Emmanuelle Cosse.
Car au fil de ses douze mois au ministère, Olivier Klein, pourtant bon connaisseur de la politique de la ville et du logement, a peiné à exister face au ministère de l’Economie, qui, sous la présidence d’Emmanuel Macron, a multiplié les coupes budgétaires dans le secteur.
« Bruno Le Maire a été odieux avec lui« , juge un député de la majorité, pour qui « Bercy a profité du fait qu’on n’a pas de politique du logement« .
« Il n’a pas porté de projet de loi, il doit s’en mordre les doigts« , commente cet élu macroniste.
Le Conseil national de la refondation (CNR) dédié au logement, voulu par le président de la République, a mis au travail tous les acteurs pendant sept mois, qui ont émis une batterie de propositions jamais rendues publiques.
Quasiment aucune n’a été retenue par l’exécutif.
Pire, à la conclusion du CNR, le gouvernement a annoncé la suppression de la niche fiscale Pinel et le recentrage du prêt à taux zéro, soutiens de la construction neuve. Bruno Le Maire s’est targué d’économiser ainsi 2 milliards d’euros.
Des associations de solidarité aux organisations patronales, la déception a été unanime.
Et pour le budget 2024, Bercy assume ouvertement de cibler en priorité le logement pour faire des économies.
« On ne peut pas répondre uniquement aux directives de Bercy qui entend faire main basse et réduire la politique du logement à une petite ligne budgétaire », appuie Loïc Cantin. Pour lui, Patrice Vergriete devra « être magicien » s’il veut l’éviter.