DPE : « Nous avons besoin de nouveaux outils pour veiller à la rectitude des diagnostiqueurs », Yannick Ainouche

Alors qu’une enquête du Parisien a révélé que les fraudes au DPE explosent, explique Yannick Ainouche, Président de la CDI-FNAIM, rappelle que le DPE reste indispensable pour la sécurité et la transparence du marché immobilier et demande de nouveaux outils pour veiller à la rectitude des diagnostiqueurs !

Yannick Ainouche

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Le DPE a de nouveau été égratigné. Son existence ne semble pas menacée, quelle que soit l’issue de ces législatives, mais la pertinence du diagnostic est une nouvelle fois attaquée avec l’existence de DPE de complaisance dénoncée par Le Parisien. C’est la crédibilité de notre filière qui est en jeu, c’est aussi le manque d’outils pour sanctionner les diagnostiqueurs indélicats, qui apparaît criant.

Peut-on imaginer se passer du DPE ?

Clairement, non. Rappeler que notre DPE est aussi une exigence de l’Union européenne qui impose un diagnostic de la sorte à tous ses Etats membres, n’est pas suffisant. Voilà quelques années déjà, que le DPE ne se résume plus à une question de formalisme : il répond aujourd’hui à une attente des ménages dans un contexte où la sauvegarde du pouvoir d’achat est souvent la préoccupation majeure.

Les sondages à répétition ont montré que le diagnostic était désormais un critère de sélection dans le choix des ménages. 79 % des vendeurs de résidence principale et 57 % de ceux qui cèdent un investissement locatif se déclarent prêts à baisser leur prix en cas de mauvaise performance énergétique. 40 % des futurs acheteurs considèrent un mauvais DPE comme un levier de négociation. 

Le travail des professionnels du diagnostic immobilier permet aux Français et aux pouvoirs publics, de bénéficier d’un des parcs immobiliers les plus suivi au monde. Et cela n’est pas le seul fait du DPE. On a tendance à l’oublier, mais le diagnostiqueur ne se borne pas à la performance énergétique, il repère aussi l’amiante ou le plomb de bâtiments, vérifie les installations gaz, électricité, etc. Autant de diagnostics qui touchent à la sécurité et la santé dans le logement.

Face aux attentes des consommateurs et aux enjeux réglementaires liés au DPE, notre filière a déjà fourni des efforts considérables. Une nouvelle marche a encore été gravie ce 1er juillet, avec le renforcement des compétences des diagnostiqueurs, à la fois sur le DPE et sur l’audit énergétique. De nouvelles conditions de certification sont entrées en vigueur synonymes de davantage de formation, davantage de contrôles aussi pour le diagnostiqueur.

Nous ne sommes pas naïfs : notre filière doit avoir les moyens de pouvoir sanctionner les diagnostiqueurs fraudeurs

Pourtant, comme le montre l’enquête du Parisien, tout le monde au sein de notre filière ne semble malheureusement pas avoir perçu tout l’enjeu du DPE. Nous le déplorons. En tant que tiers, indépendant et impartial, il nous est intolérable de constater que certains opérateurs délivrent des DPE de complaisance pour permettre à un propriétaire d’échapper à une obligation de rénovation ou pour tout simplement mieux vendre leur bien, quitte à tromper l’acquéreur. Au-delà du risque juridique, cette pratique cause un tort profond à l’ensemble de notre profession.

Ce genre de dérives ne relève pourtant pas de la compétence technique mais plutôt de la rectitude que quiconque est pourtant en droit d’attendre d’un tiers indépendant et impartial. A la CDI-FNAIM, nous y travaillons. Consciente des préjudices subis par ses adhérents et par toute sa filière, la fédération a toujours été force de propositions.

LA CDI-FNAIM vigilante sur les diagnostiqueurs peu scrupuleux

En plus de sa commission des pratiques illicites en création, la CDI-FNAIM a récemment épinglé et dénoncé des diagnostiqueurs qui procédaient à du commissionnement. Cette pratique qui consiste à rémunérer des apporteurs d’affaires est formellement interdite depuis 2010 parce qu’elle entache évidemment notre indépendance et notre impartialité. De plus, notre fédération travaille aussi en étroite collaboration avec les pouvoirs publics pour la création d’un organe de sanction indépendant.

La CDI-FNAIM avait pourtant tenté de faire exemple en poursuivant un diagnostiqueur qui exerçait avec des certifications non valides. À notre grande surprise, nous avons été déboutés par la Cour d’appel avec comme justification l’absence de textes législatifs ou réglementaires interdisant aux diagnostiqueurs d’exercer sans certifications. Aujourd’hui, travailler sans certifications ne vaudrait guère plus qu’une simple amende de 1 500 euros ! 

L’enquête menée par le Parisien, l’issue de notre action menée en justice contre un diagnostiqueur indélicat, témoignent de la faiblesse de notre arsenal. Oui, nous avons considérablement travaillé au renforcement des compétences des opérateurs au cours des dernières années, mais nous devons encore veiller à la rectitude de notre profession, indispensable dans le contexte de rénovation énergétique. Nous avons besoin de nouveaux outils. Disons-le, nous avons besoin de sanctions, fortes, et suffisamment dissuasives pour qu’un cabinet n’ose plus s’aventurer en dehors des clous, exercer sans certification ou délivrer des diagnostics qui ne reflètent pas la réalité du bien visité.

Par MySweetImmo