Crise de l’immobilier et emploi : Le casse tête du logement dans la mobilité professionnelle
Peu de Français sont prêts à déménager pour un nouvel emploi selon l’étude de la plateforme d’emploi, Indeed.
Pour de nombreux actifs, la coupure estivale est une période propice pour prendre du recul sur sa carrière et son équilibre vie pro-vie perso. L’été génère parfois des envies de déménagement, surtout chez ceux qui habitent dans les grandes agglomérations, mais sont-ils vraiment en capacité de le faire ? Quelles sont les réticences des actifs français en matière de mobilité ? Quel est le temps de trajet maison-bureau idéal ? Autant de questions posées par Indeed dans sa récente étude menée avec OpinionWay, auprès de 1165 personnes représentatives de la population active française.
Tout d’abord, les résultats de l’étude permettent de rappeler à quel point la proximité géographique du lieu de travail avec son lieu d’habitat est un critère déterminant dans la recherche d’emploi : ce facteur arrive en effet 4e dans l’ordre des arguments pouvant inciter les actifs à accepter un nouvel emploi, après un salaire conséquent (pour 59% des répondants), des horaires de travail flexibles (37%) et des avantages intéressants (36%). 35% de l’échantillon d’actifs de cette étude fait de la proximité géographique du travail un critère clé pour choisir un nouvel emploi.
Île-de-France vs. « la province », le grand fossé en matière de temps de trajet
69% des actifs interrogés dans l’étude mettent moins de 30 minutes (ou 30 minutes) à se rendre sur leur lieu de travail, et 28% plus de 30 minutes – 6 % déclarant même passer plus d’une heure (et donc plus de deux heures par jour) entre leur domicile et leur bureau.
Parmi les habitants d’Île-de-France, 27% de « chanceux » habitent à moins de 20 minutes de leur travail, quand dans les autres régions de la métropole française, au moins la moitié des travailleurs transitent jusqu’à leur bureau en moins de 20 minutes. Alors que le temps de trajet moyen « en région » avoisine les 25 minutes, il bondit en Île-de-France, avec une moyenne de 43 minutes.
53% des actifs français estiment que leur temps de trajet actuel est idéal, et 46% le trouvent trop long (dont 13% qui le jugent beaucoup trop long, statistique qui atteint 22% chez les Franciliens).
Malgré tout, 40% des Franciliens trouvent leur temps de trajet idéal, ce qui montre qu’ils sont plus habitués à des temps de transport nettement plus longs. Le temps de déplacement idéal moyen pour ces travailleurs est d’ailleurs de 26 minutes, alors qu’il varie entre 16 et 19 minutes dans les autres zones de métropole.
La grande majorité des actifs sont attachés à leur logement actuel
Insatisfaits, les Français ? Le cliché ne semble pas se vérifier en ce qui concerne leur habitat.
81% des actifs interrogés se disent satisfaits de leur logement actuel, que ce soit en matière d’emplacement ou de taille, et 37% en sont même très satisfaits, même si 59% estiment que leur lieu d’habitation est conditionné par leur travail et qu’ils n’ont pas le choix de vivre où ils le souhaitent.
73% des répondants expriment une réticence à déménager, indiquant que ce serait par contrainte, en l’absence d’autre choix, qu’ils seraient amenés à quitter leur logement.
Ceux qui y sont le plus attachés sont les actifs de plus de 50 ans, probablement car statistiquement, ils sont plus susceptibles d’être « bien installés », dans des logements plus qualitatifs que ceux des plus jeunes.
Les Français redoutent de se confronter au marché immobilier
Et si cet attachement n’était pas uniquement dû aux qualités attribuées à son logement, mais aussi (et surtout ?) à l’impossibilité de se reloger aussi bien ailleurs ? C’est l’un des grands enseignements de cette étude : les travailleurs français craignent de devoir déménager et se confronter au marché immobilier.
- 80% estiment qu’il est difficile de changer de logement en France actuellement (et cela semble encore plus vrai dans le Sud-Ouest, où 90% des répondants partagent ce point de vue)
- 66% trouvent compliqué de concilier son lieu de vie avec son lieu de travail. 57% jugent d’ailleurs que la politique mise en place actuellement ne va pas permettre de remédier à cette situation.
- 33% des répondants pensent qu’ils ne parviendraient pas à trouver un logement offrant une qualité de vie équivalente ou supérieure à la leur en ce moment
- 84% pensent même qu’ils ne pourraient pas déménager pour raison professionnelle sans soutien financier de la part de leur (futur) employeur.
Rien de surprenant, alors, à ce que 83% des actifs estiment qu’ils pourraient renoncer à un poste qui les intéresse dans une autre région en raison des difficultés d’accès à un nouveau logement.
80% des actifs disent donc chercher avant tout la stabilité et à rester dans la même entreprise autant que possible, ce qui semble logique dans un contexte aussi incertain.
Même chez les moins de 35 ans, réputés plus mobiles et volatils, cette aspiration à la stabilité représente 74% des personnes interrogées.
Serait-on en train de s’éloigner de l’esprit « post-Covid », qui avait fait souffler sur le marché du travail un vent de « Grande démission » ?
Les Français priorisent leur habitat sur leur emploi
« Préférez-vous un lieu d’habitation qui corresponde à vos attentes, quitte à faire des sacrifices concernant votre travail ? Ou un travail qui corresponde à vos attentes, quitte à faire des sacrifices sur votre lieu d’habitation ? »
Face à ce dilemme, le cœur de la population active balance, mais avec une nette préférence pour la première option : 62% priorisent leur habitat et font des concessions sur leur travail, quand 34% recherchent d’abord un emploi qui les satisfasse, au détriment parfois de leur cadre de vie.
Cette polarisation « deux tiers / un tiers » montre bien qu’on ne peut résoudre l’équation de l’emploi sans s’intéresser avec la plus grande attention à la problématique de l’accès au logement, partout sur le territoire.
Les postes demandant de la mobilité freinent davantage qu’ils ne motivent les candidats
Les Français mobiles existent-ils encore ? Oui, tout de même : plus d’un quart (26%) des actifs seraient motivés si un recruteur leur proposait un poste impliquant un déménagement dans une autre région ou dans un autre pays.
Et 1 professionnel sur 3 trouverait motivant de réaliser des déplacements fréquents dans le cadre de son travail, que ce soit à l’international (32%) ou en France (34%).
En revanche, 49% des personnes sondées verraient au contraire ces déplacements fréquents comme un frein, 56% seraient peu enthousiastes à l’idée de quitter leur région, et 58% auraient du mal à accepter un poste à l’étranger (44% ne l’envisageant pas). Entre 15 et 17% du panel, selon les questions, se montre en revanche indifférent à ces aspects.
Les profils les plus rebutés par la mobilité, que ce soit avant de démarrer leur nouvel emploi (déménagement) ou dans le cadre de leurs missions (déplacements professionnels), sont les actifs ayant entre 35 et 49 ans. Cela peut s’expliquer par la quantité accrue de contraintes caractérisant cette tranche d’âge : familiales, financières, etc.
Les femmes sont, quant à elles, nettement plus freinées que les hommes à l’idée de réaliser des déplacements professionnels, et la part (souvent supérieure) de charges familiales et ménagères qu’elles récupèrent dans leur vie personnelle n’y est peut-être pas pour rien.
A l’inverse, les jeunes et les Franciliens se montrent sensiblement plus ouverts à la mobilité que leurs collègues plus âgés ou habitant dans d’autres régions.
Les résultats de cette étude Indeed réalisée en collaboration avec OpinionWay montrent les corrélations, voire l’appariement, qui existent entre l’emploi et le logement : la crise du logement que traverse la France met à mal la mobilité professionnelle de sa population active, et par conséquent la capacité du pays à se rapprocher du plein emploi en pourvoyant chaque poste vacant.
Ce qu’il faut retenir
- 35% des actifs considèrent la proximité géographique comme un critère prioritaire dans leur recherche d’un nouvel emploi
- Les Franciliens se montrent plus souples en matière de mobilité, plus habitués à réaliser de longs trajets entre leur logement et leur lieu de travail
- 81% des professionnels sont satisfaits de leur logement actuel, et 73% n’en déménageraient que par contrainte, sans avoir d’autre choix
- 83% des actifs estiment qu’ils pourraient renoncer à un poste qui les intéresse dans une autre région en raison des difficultés d’accès à un nouveau logement
- 56% se montrent réticents à l’idée de quitter leur région, et 58% ont du mal à envisager un nouvel emploi à l’étranger