Observatoire des ancrages et arbitrages sur les lieux de vie : Comment se redessine le rapport au territoire ?

Avec ce nouvel Observatoire, l’ObSoCo, le Groupe BPCE, in’li et Nexity, souhaitent approfondir la compréhension des ressorts de l’ancrage au territoire, en identifiant les arbitrages qui redessinent la mobilité résidentielle des Français, entre aspirations et contraintes. Explications.

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© adobestock

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Les précédentes enquêtes menées par L’ObSoCo sur le rapport des Français à leur territoire avait mis en évidence un rejet important du modèle de la grande ville, un désir fort d’aller vivre ailleurs parmi les habitants des zones denses, combinés à la recherche, en forme de paradoxe, d’une ville « à portée de main ».

Le lien social, caractéristique essentielle pour l’attachement au lieu de vie

71 % des Français se disent attachés à leur lieu de vie, dont 27 % très attachés, quand 10 % de Français déclarent à l’inverse un très faible attachement.

Le principal facteur d’ancrage au territoire est le fait de s’y sentir « chez soi » : cette dimension est plutôt bien évaluée dans l’ensemble : 86 % des Français disent se sentir « chez eux » au sein de leur lieu de vie, mais seulement 31 % pour qui c’est tout à fait le cas.

Au-delà de se sentir chez soi et d’évoluer dans un cadre épanouissant, apprécier la présence des autres habitants concourt également fortement à l’attachement des Français à leur lieu de vie. Cette dimension est bien notée dans l’ensemble, par 79 % des Français. Autre indice de l’impact du lien social sur l’attachement au lieu de vie, la possibilité de s’y faire des amis ou des connaissances arrive en tête des facteurs contribuant à l’attachement au territoire, devant la possibilité de bien y vieillir, d’élever ses enfants ou de s’y balader. Or, la possibilité offerte par leur lieu de vie de se faire des amis est une caractéristique qui compte parmi celles les moins bien notées par les Français.

Des aspirations à vivre ailleurs qui restent fortes

Malgré leur attachement à leur lieu de vie, 30 % des Français interrogés indiquent qu’ils déménageront dans les 5 prochaines années, dont 17 % dans les deux ans à venir. Les jeunes (moins de 35 ans), les locataires et les habitants des villes-centres des métropoles sont surreprésentés parmi les personnes qui envisagent de déménager dans les 2 ans.

Interrogés sur l’endroit où ils envisagent de déménager, plus d’un quart des Français concernés se prononcent pour la petite ville ou le village en périphérie des grandes villes, et 22 % pour la ville de taille moyenne.

Si les transitions d’un milieu très urbain vers la campagne isolée sont rares, on note cependant une aspiration forte des citadins à vivre dans des territoires moins denses. Ainsi, 54 % des habitants des grandes villes qui comptent déménager envisagent d’aller vivre en périphérie d’une grande ville, dont 33 % au sein d’une petite ville ou d’un village.

Les grandes villes sont en effet perçues par leurs habitants comme des lieux de vie offrant de nombreuses possibilités (consommation, accès aux soins, à la culture, aux divertissements, à l’épanouissement professionnel, etc.) mais qui sont difficiles à vivre (le manque de calme, de contact avec la nature leur étant particulièrement reproché). Dans ce contexte, la périphérie des grandes villes ou encore les villes moyennes apparaissent comme des territoires qui permettraient d’accéder à un meilleur équilibre entre qualité et possibilités de vie.

Car si les motivations à vivre ailleurs se révèlent multiples, la recherche d’un cadre de vie où il est agréable de vieillir, où l’on se sent en sécurité et où l’on est en contact avec la nature comptent parmi les facteurs qui concourent le plus aux souhaits de déménager.

Les contraintes financières pèsent sur la mobilité résidentielle des Français

Cependant, 20 % des envies d’ailleurs ne se concrétiseraient pas. En cause ? Des contraintes financières (pour 3 Français concernés sur 10), loin devant les raisons professionnelles (16 %) ou familiales (15 %). Les prix du marché immobilier et le coût de la vie sont en effet les « nuisances » qui gênent le plus les Français sur leur territoire et sont susceptibles de limiter les mobilités résidentielles.

Pour ceux qui le peuvent, ces projets de déménagement s’inscriraient dans une logique patrimoniale : ainsi, 33 % des locataires envisagent d’accéder à la propriété à travers leur projet de déménagement.

La crise sanitaire a influencé les projets de déménagement de 9% des Français

Pour 30 % des Français qui envisagent de déménager dans les prochaines années, la crise sanitaire a exercé une influence sur leur volonté de partir vivre ailleurs. Elle en a même été l’élément déclencheur pour 6 % d’entre eux. Ramené à l’ensemble de la population, la crise sanitaire a donc déclenché ou renforcé les envies d’ailleurs de 9 % des Français.

Cette influence a été particulièrement forte chez les urbains (59 % des Parisiens et 35 % des habitants des communes denses qui comptent déménager reconnaissent une influence de la crise sur leur envie d’ailleurs) mais aussi chez 45 % des actifs en capacité de télétravailler.

Parmi ceux qui souhaitent déménager dans les 5 ans, 3 Français sur 10 envisagent de changer de région

Si 20 % des déménagements à venir se réaliseront en toute proximité (au sein de la commune ou même du quartier actuel), ou au sein de la même région (43 %), plus de 3 Français sur 10 qui envisagent de déménager dans les 5 ans changeraient de région à cette occasion. Un taux nettement supérieur à celui constaté concernant la mobilité résidentielle sur les 5 dernières années (18 %).

Le travail en 1ère place des concessions pour changer de lieu de vie

Si le télétravail a permis de lever des contraintes chez certains Français quant à leur mobilité résidentielle, on note, plus globalement, une disposition relativement forte à remettre en cause sa situation professionnelle pour changer de lieu de vie.

Ainsi, interrogés sur les sacrifices qu’ils seraient prêts à consentir pour rejoindre leur lieu de vie idéal, les Français qui aspirent à vivre ailleurs citent en premier lieu le fait de changer de situation professionnelle (55 %, dont 16 % qui y seraient tout à fait disposés). En revanche, ils sont moins enclins à s’éloigner de leur lieu de travail (seuls 18 % y seraient disposés pour 52 % qui ne le seraient pas du tout). 29 % des actifs seraient également disposés à accepter un poste moins bien rémunéré pour rejoindre leur lieu de vie idéal.

24 % des Français sont prêts à occuper un poste moins bien rémunéré pour rejoindre leur lieu de vie idéal

L’étude révèle que les Français souhaitant vivre en périphérie des grandes villes, mais surtout au sein des villes moyennes, se révèlent moins disposés que le reste des Français (et parfois de façon très nette) à consentir à différents sacrifices. C’est notamment le cas de l’éloignement des commerces et des lieux d’activités : seuls 30 % d’entre eux consentiraient à cet arbitrage (pour 50 % de l’ensemble des Français qui comptent déménager). Ils ne sont également que 24 % à être disposés à occuper un poste moins bien rémunéré pour rejoindre leur lieu de vie idéal (32 % sur l’ensemble).

Ces résultats révèlent en creux de fortes attentes à l’égard des villes moyennes, tant en termes d’aménités que d’opportunités professionnelles, et expliquent certainement une bonne part de l’engouement pour ces dernières.

Une typologie du rapport des Français à leur territoire

L’étude a permis de construire une typologie des Français en 7 groupes, qui se distinguent par leur perception de la qualité de vie au sein de leur territoire et leur degré d’ancrage à celui-ci. Elle permet notamment de dessiner des pistes pour ré-enchanter le rapport de certains Français à leur territoire.

Parmi les Français les plus attachés à leur territoire, le groupe des « Périurbains Comblés » réunit 20 % de la population. Ces Français habitant majoritairement dans les couronnes des moyennes et grandes aires urbaines sont très satisfaits de la qualité de vie sur leur territoire (notamment pour le calme et la proximité de la nature) et ne comptent majoritairement pas déménager.

2 groupes sont attachés aux possibilités offertes par la ville, mais cherchent néanmoins une densité moindre :

  • Les«Impliqués»,(19%delapopulation),plutôturbainsettrèsattachésàlacapacitédeleurterritoireàoffrir divers services et activités (se divertir, se cultiver, étudier, se faire soigner, etc.), dimension dont ils sont satisfaits. Ils aimeraient toutefois vivre dans du moins dense.
  • Les « Citadins Contrariés » rassemblent 14 % de la population. Ils vivent majoritairement dans des territoires très urbains auxquels ils sont très attachés. Ils sont notamment satisfaits de la diversité des activités possibles au sein de leurs lieux de vie, mais regrettent l’absence de contact avec la nature et le manque de calme. Ils subissent en outre beaucoup de nuisances (notamment le bruit, l’insécurité, la pollution). Ils aspirent à davantage de sécurité, et à un territoire plus propice à l’éducation des enfants et où bien vieillir. Ils se projettent ainsi en périphérie des grandes villes pour continuer à bénéficier de la proximité d’aménités.

2 groupes cherchent quant à eux à se rapprocher des villes :

  • Les « RurauxActifs » (9% de la population), bien qu’attachés à leur territoire, regrettent le manque d’activités possibles à proximité immédiate de leur lieu de vie et déplorent des difficultés d’accès à l’emploi. Beaucoup d’entre eux aimeraient par conséquent rejoindre un territoire plus dense.
  • Les « Ruraux Délaissés » (6 % de la population) sont quant à eux un groupe plus âgé, qui manifestent un attachement plutôt faible à leur territoire et se révèlent très négatifs sur le manque d’activités possibles sur leur territoire (se divertir, se cultiver, s’épanouir professionnellement, faire du shopping), mais aussi sur l’accès aux soins. La plupart aimerait vivre ailleurs dans un territoire plus dense et mieux adapté au vieillissement.

Enfin, 2 groupes manifestent un rejet de la grande ville :

  •  Les « Périurbains Contraints » (27 % de la population), habitent des couronnes des grandes villes, dans des communes assez denses. Faiblement attachés à leur territoire, ils aimeraient vivre ailleurs mais beaucoup ne le feront pas, ayant du mal à se projeter ailleurs. Ils cherchent avant tout la sécurité et à limiter les nuisances liées à la densité (coût de l’immobilier, pollution, bruit).
  • Les « CitadinsDépités » (4% de la population) vivent en majorité en petite et grande couronnes des grandes villes. Ils ont une très mauvaise perception de la qualité de vie sur leur territoire et veulent tous aller vivre ailleurs. Tous n’en ont pas les moyens financiers. Ils aspirent à davantage de proximité avec la nature, et sont prêts à de nombreux sacrifices pour rejoindre leur lieu de vie idéal.

Les aspirations à vivre ailleurs sont plus marquées en Île-de-France

L’Île-de-France, et notamment Paris et la Petite couronne, n’échappe pas aux tendances identifiées dans l’étude pour les grandes villes et plus largement les zones denses. Ces tendances en sont cependant parfois plus accentuées. Ainsi, les aspirations à vivre ailleurs sont plus marquées en Île-de-France (notamment à Paris (70 %) et en petite couronne (72 %)) que sur le reste du territoire (53 %) ou dans les grandes villes (63 %). Ces envies d’ailleurs sont, comme pour le reste des Français, motivées par des aspirations à trouver un cadre de vie où il est agréable de vieillir, où l’on se sent en sécurité et à proximité de la nature. Le souhait de déménager pour trouver un logement plus grand (56 %) et moins cher (56 %) est davantage sensible en Île-de-France que sur le reste du territoire (respectivement 44 % et 47 %).

51 % des Parisiens et 52 % des habitants de la Petite couronne indiquent qu’ils déménageront dans les 5 prochaines années (pour 60 % des habitants des autres grandes villes et 40 % de l’ensemble des Français). 39 % des locataires franciliens concernés souhaitent déménager dans le cadre d’une accession à la propriété (pour 33 % à l’échelle nationale).

59 % des Parisiens qui envisagent de déménager reconnaissent une influence de la crise sanitaire sur leur projet

Comme pour les autres habitants des grandes villes, l’impact de la crise sanitaire sur les projets de déménagement a été plus fort en Île-de-France que sur le reste du territoire. Notamment à Paris (59 % des Parisiens qui envisagent de déménager reconnaissent une influence de la crise sanitaire sur leur projet) et en Petite couronne (38 %), pour 35 % des habitants des autres grandes villes.

À la différence des autres habitants des grandes villes, les Parisiens qui comptent déménager le feront plus fréquemment au sein même de leur commune (34 % vs 12 % dans les autres métropoles). Ils sont 11 % à souhaiter déménager en petite couronne et 15 % en grande couronne. Comme pour l’ensemble des Français, 30 % des Parisiens qui envisagent de déménager dans les 5 ans projettent de changer de région. Ce changement de région est nettement plus marqué chez les habitants de la Petite couronne francilienne (43 % des projets de déménagement).

39 % des Parisiens souhaitant vivre ailleurs seraient prêts à loger une partie de la semaine à proximité de leur lieu de travail

Les compromis auxquels les Franciliens seraient prêts à consentir pour rejoindre leur lieu de vie idéal varient relativement peu du reste des Français. On note cependant un consentement plus fort à envisager un changement de situation professionnelle : 58 % des habitants de la Petite couronne souhaitant vivre ailleurs seraient prêts à changer d’activité professionnelle et 44 % à occuper un poste moins bien rémunéré pour rejoindre leur lieu de vie idéal (contre respectivement 55 % et 29 % à l’échelle de l’ensemble du territoire). 39 % des Parisiens souhaitant vivre ailleurs seraient prêts à loger une partie de la semaine à proximité de leur lieu de travail pour s’éviter de trop longs allers-retours domicile-travail (27 % pour l’ensemble). En revanche, Parisiens et habitants de la Petite couronne se révèlent nettement moins disposés que le reste des Français à s’éloigner des transports en commun (respectivement 38 % et 35 %, pour 47 % de l’ensemble des Français aspirant à déménager).

Par MySweet Newsroom