Crédit immobilier: vers une révision mensuelle du taux d’usure

La Banque de France s’apprête à réviser chaque mois plutôt qu’une fois par trimestre le taux d’usure, le taux d’emprunt plafond des crédits immobiliers destiné à protéger l’acquéreur de conditions abusives, une mesure « exceptionnelle » pour « fluidifier » le marché.

facade de l'immeuble de la Banque de France a Paris

© adobestock

 0

Ce taux plafonne l’ensemble des frais d’un prêt immobilier: taux de crédit pratiqué par la banque, éventuelle commission des courtiers, assurance emprunteur.

Depuis plusieurs mois, les taux d’intérêt remontent dans le sillage des taux directeurs de la Banque centrale européenne et plus vite que le taux d’usure ce qui rend plus difficile pour les particulier l’accès au crédit, selon les professionnels de l’immobilier.

Un relèvement du taux d’usure offre un bol d’air au marché: il permet aux banques de prêter plus cher, mais aussi à chaque autre composante du coût du crédit (commission d’un courtier, l’assurance emprunteur…)  d’être pris en compte sans dépasser le plafond légal. Cela permet in fine l’acceptation de davantage de dossiers de demande de crédit.

Il est calculé pour l’instant chaque trimestre par la Banque de France, qui prend en compte les taux moyens pratiqués par les banques au cours des trois derniers mois augmentés d’un tiers.

Mais la loi prévoit la possibilité de « déroger temporairement à la règle de calcul » en cas de « circonstances exceptionnelles » et « c’est ce qui est envisagé et discuté en ce moment », a expliqué Marie-Laure Barut-Etherington, directrice générale adjointe à la direction des statistiques de la Banque de France, lors d’une conférence téléphonique.

La mensualisation est « soutenue » par le ministre de l’Économie Bruno Le Maire » pour que ce plafond s’adapte plus rapidement aux taux du marché, a indiqué Bercy.

« L’ajustement technique » permettrait de recalculer tous les mois le taux d’usure en prenant en compte les taux pratiqués les trois mois précédents, avec, comme objectif, de mieux répartir les hausses et « fluidifier la production de crédit », selon Mme Barut-Etherington.

« Trois plus petites marches »

« Au lieu de faire cette hausse une fois en fin de trimestre avec une grosse marche… on ferait trois plus petites marches », a résumé mercredi le gouverneur François Villeroy de Galhau devant la commission des finances du Sénat.

Ministère de l’Économie et des finances, Banque de France, ainsi que banquiers et courtiers ont débattu de la question mercredi lors d’une réunion de deux heures. Les travaux « vont se poursuivre la semaine prochaine », indique Bercy à l’AFP.

Formellement, le gouverneur de la Banque de France devra proposer la mensualisation au ministre de l’Économie. Elle « pourrait commencer au 1er février ou au 1er mars », ajoute le ministère.

Un tel changement de la méthode de calcul — une première dans l’histoire du taux d’usure qui a été mis en place dès 1966 — ne serait par ailleurs que temporaire et non une réforme en profondeur du mécanisme.

La nouvelle méthode de calcul « pourrait durer un ou deux trimestres », explique un participant à la réunion de mercredi jeudi à l’AFP, sous couvert d’anonymat.

Remontée des taux

Le taux d’usure est fixé depuis le 1er janvier à 3,57% tous frais compris pour un emprunt de 20 ans et plus.

Le taux moyen de crédit (hors assurances et frais annexes), s’en approche: il est mesuré à 2,04% en décembre par la Banque de France et même à 2,25% en novembre par l’Observatoire CSA/Crédit logement, après une hausse très rapide ces derniers mois.

Cette remontée du taux a un coût pour l’emprunteur: à titre d’exemple, lorsque le taux d’un emprunt de 150.000 euros sur 20 ans passe de 1% à 2%, le montant à rembourser in fine passe d’environ 165.500 euros à plus de 182.000 euros, soit quelque 16.500 euros supplémentaires.

La mesure « va permettre de débloquer l’octroi de crédit », s’est félicité Julie Bachet, directrice générale du site Vousfinancer. Même si cela « risque de contribuer à l’accélération de la remontée des taux de crédit ».

Une bonne nouvelle également pour Brice Cardi, président du réseau d’agences immobilières l‘Adresse, qui relève que « sur le dernier trimestre 2022, près de la moitié de nos agences ont dû faire face à des refus de prêt entraînant la rupture de la vente en cours« .

« La révision mensuelle du taux d’usure devrait contribuer à faciliter l’octroi de crédits et donc à fluidifier le marché« , a-t-il jugé.

Par MySweetImmo avec AFP