Immobilier neuf : La crise est sévère, la FFB appelle à un bouclier logement

Le logement neuf sombre dans une crise sévère, similaire à celle qui a sévi au sortir de la crise financière de 2008-2009 estime le pole habitat FFB.

immeuble en construction et grue

© adobestock

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Une crise sévère frappe le logement neuf

Après la crise sanitaire, la crise des matériaux et la crise de l’énergie, c’est maintenant officiel : malgré les alertes formulées depuis de très nombreux mois, en dépit d’une demande soutenue, le logement neuf sombre dans une crise sévère, similaire à celle qui a sévi au sortir de la crise financière de 2008-2009.

Chute historique des ventes de maison neuves : -31,3% en 2022

Le marché de la maison neuve en secteur diffus chute violemment de 31,3% en 2022 et même de 38,2% au dernier trimestre (en glissement annuel). Avec 96 000 ventes brutes, il s’agit du pire exercice des seize dernières années. L’habitat individuel groupé s’écroule également de 22,2%, à 6 100 ventes, pire millésime des vingt-deux dernières années.

Fonte des ventes de logements collectifs

Quant au logement collectif, les ventes aux particuliers se contractent de 14,1% sur 2022 et même de 30,4% au dernier trimestre (en glissement annuel). Avec 96 000 ventes, elles reculent au niveau de 2020, marquée par les confinements dû au Covid-19. Les ventes en bloc en collectif enregistrent pour leur part un nouveau recul de 21% sur 2022.

Avis de tempête : annulations des ventes aux particuliers à la hausse

En promotion immobilière, habitat individuel groupé et logement collectif cumulés, le taux d’annulation des ventes aux particuliers progresse de 3,3 points de pourcentage pour s’afficher à 16% à fin 2022, score le plus élevé depuis 2017 (date de la première donnée disponible) si l’on ne tient pas compte de l’année atypique. Si l’on se limite au quatrième trimestre 2022, le taux d’annulation s’envole même à 21,6%.

Le stock de logements neufs aux particuliers augmente de 9,3% en glissement annuel sur le quatrième
trimestre 2022, contre +5,6%, +3,9% et +2,5% sur deux, trois et quatre trimestres. La durée de l’écoulement de l’encours se redresse fortement à 11,4 mois en moyenne annuelle, et surtout à 15 mois en glissement annuel sur le quatrième trimestre 2022, contre 9,5 mois en moyenne sur longue période.

Pour l’ensemble des segments de la promotion immobilière, la baisse des ventes s’établit à -16,2% à fin 2022 et s’observe dans toutes les régions. Seules la Normandie (-2,1%) et le Centre- Val de Loire (-8,2%) résistent un peu plus. Si l’on se limite au quatrième trimestre 2022, la baisse des ventes sur l’ensemble du territoire ressort deux fois plus importante, à -30,9%.

Au total , 71 000 ventes perdues en un an

En l’espace d’un an, plus de 27 000 ventes ont été perdues en promotion immobilière. À celles-ci, s’ajoutent les 44 000 ventes de maisons de moins dans l’individuel diffus. En l’espace d’un an, on déplore donc la perte de 71 000 logements, niveau proche de celui observé au sortir de la crise financière de 2008-2009.
Des chiffres rarement observés qui confirment, malgré une demande toujours soutenue, les difficultés
grandissantes que rencontrent les acquéreurs et les professionnels du secteur. Et qui matérialisent, pour celles et ceux qui en doutaient encore, la crise du logement neuf sur laquelle l’ensemble du secteur alerte les pouvoirs publics depuis de très longs mois.

Autorisations et mises en chantier : la décrue est amorcée

Le fort rebond (+19%) des permis de construire accordés aux logements neufs en 2021, après trois années de baisse consécutives, s’expliquait par la forte progression de l’habitat individuel.

À l’inverse, leur hausse très mesurée (+3,1%) en 2022 s’explique par le recul de la maison individuelle (-7,1% sous l’effet de la chute des ventes en cours depuis fin 2021) qui vient atténuer l’augmentation du logement collectif (+11,8%). Celle-ci repose en grande partie sur les permis accordés au cours des trois premiers trimestres 2022, consécutifs aux dépôts massifs de fin 2021 par anticipation de l’entrée en vigueur de la RE2020. Néanmoins, la chute de 25,5% des autorisations de construire au dernier trimestre 2022 n’augure rien de bon pour 2023.

De leur côté, les mises en chantier de logements neufs se replient de 3,8%, après une progression de 11% en 2021. Ici, c’est le logement collectif qui recule de 7,4%, du fait notamment du report de lancement, voire de l’abandon, d’opérations en raison des hausses des coûts de construction induites par l’envolée des prix des matériaux et des difficultés rencontrées à trouver des entreprises.

En outre, sous réserve de la fiabilité des données statistiques à disposition, la situation atypique et
préoccupante observée fin août 2022 dans l’évolution comparée des autorisations de construire et des mises en chantiers de logements collectifs se confirme.

Les mises en chantier de maisons individuelles restent (pour le moment) dans le vert, à seulement +1,2%. Elles devraient toutefois connaître une baisse marquée en 2023 suite à l’effondrement des ventes et des permis des derniers mois.

Au global, l’exercice 2022 se solde sur 376 000 logements mis en chantier. Un niveau encore supérieur à la moyenne de long terme, mais très en-deçà des 437 500 mises en chantier de 2017.

De fait, les perspectives sont plus que préoccupantes pour l’activité du logement neuf en 2023 : selon les prévisions de la Fédération Française du Bâtiment, les autorisations de construire devraient reculer de 21% et les mises en chantier de près de 9%.
Face à cette situation, les aménageurs fonciers, les constructeurs de maisons et les promoteurs immobiliers s’adaptent et prennent les mesures qui s’imposent, que ce soit en terme structurel, organisationnel ou commercial.

    Inflation et hausse des taux, un cocktail explosif

    Comment expliquer une telle chute ?

    Il faut tout d’abord avoir à l’esprit que le marché de l’accession à la propriété dans le neuf a pu faire face à la suppression de l’APL accession, au rabotage à 20% de la quotité du PTZ en zones B2 et C et à l’augmentation continue des coûts de construction en raison des conditions bancaires extrêmement favorables qui, depuis le tournant 2021-2022, ne sont plus d’actualité.

    Ensuite, après avoir attaqué les marges des opérations en cours des promoteurs et des contrats conclus par les constructeurs en 2020-2021, la vertigineuse flambée des coûts de construction, provoquée par les surcoûts de la RE20202 concomitants à l’explosion des prix des matériaux (acier, bois, aluminium, produits PVC, tuiles, menuiseries, carrelage…) s’est aujourd’hui propagée dans les prix de sortie. Elle pénalise mécaniquement et lourdement l’activité commerciale des opérateurs du logement individuel et collectif, et conduit les promoteurs à abandonner le lancement d’opérations nouvelles ou à les retarder en attendant des jours meilleurs.

    Parallèlement, le fort renchérissement des prix de sortie des logements, en l’absence de dispositifs de soutien pour le compenser, a dissuadé un grand nombre de ménages modestes, de primo-accédants et d’investisseurs de concrétiser leur projet, d’autant que le contexte d’inflation et d’incertitudes sur le pouvoir d’achat favorise depuis plusieurs mois l’épargne au détriment de l’investissement immobilier.

    Pouvoir d’achat immobilier des Français et logement neuf sont victimes d’un cocktail explosif : inflation
    continue des coûts de construction et des prix du foncier, qui engendrent des prix de sortie intenables,
    affaiblissement des dispositifs de soutien à l’accession et à l’investissement locatif, et hausse rapide et brutale des taux d’intérêts. Ces ingrédients, cumulés aux contraintes du HSCF, aux limites fixées par les taux d’usure et à la nette contraction de l’offre de prêts immobiliers, ont fait plonger de 19,6% la production de crédits immobiliers aux particuliers pour le neuf en 2022 (-44,6% sur les trois derniers mois en glissement annuel).

    Le pôle Habitat FFB plaide pour un bouclier logement

    Face à la gravité de la situation, le Pôle Habitat FFB appelle les établissements de crédit à se remobiliser autour de la production de prêts immobiliers pour les particuliers, et appelle industriels et distributeurs de la construction à plus de transparence et de tempérance dans l’évolution des prix des matériaux.

    Il appelle également le Gouvernement à instaurer un « bouclier logement » pour soutenir le pouvoir d’achat immobilier des ménages. Celui-ci repose sur 5 piliers :

    • la prolongation du prêt à taux zéro, son rétablissement à 40% sans discrimination territoriale,
    • le rehaussement de 25% des plafonds d’opérations pris en compte pour son calcul,
    • l’instauration d’un crédit d’impôt de 15% sur les cinq premières annuités d’emprunt pour compenser l’impact de la RE2020,
    • ainsi que la restauration du dispositif Pinel dans sa version 2022 jusqu’à la mise en place du statut du bailleur privé.

    « Cette crise aigüe, face à laquelle nos entreprises adhérentes s’adaptent, exige un sursaut et nécessite des réponses urgentes avant qu’elle ne se propage au détriment de l’appareil de production. Il en va de la satisfaction des besoins en logements abordables, qui ne cessent de croître, et de la sauvegarde d’une part importante des emplois de la filière« , estime Grégory Monod, Président du Pôle Habitat FFB

    Par MySweetImmo