« Logement d’abord », clé de voûte de la lutte contre le mal-logement

Avoir enfin « un toit sur la tête », « une chambre à soi »: la démarche « Logement d’abord », qui consiste à octroyer avant tout un bien immobilier pérenne aux personnes mal logées, a permis selon le gouvernement de sortir 450.000 personnes de la rue en cinq ans.

© adobestock

 0

Faisal Hemat est l’un d’eux. Ce chauffeur de VTC de 35 ans, arrivé d’Afghanistan fin 2015, a vécu des années dans le mal-logement. La jungle de Calais, un appartement rongé par l’humidité, l’hébergement d’urgence…

Jusqu’à novembre 2022. Date à laquelle lui a été octroyé un logement.

« Quand vous avez les clés en main, ce sentiment… c’est incroyable« , confie-t-il, dans l’appartement où il vit avec sa femme et ses trois enfants, à Villeneuve-Saint-Georges (Val-de-Marne).

Il le loue dans le cadre du dispositif de l’intermédiation locative, par lequel des particuliers mettent un logement en location à prix réduit par l’intermédiaire d’une association, en échange d’avantages fiscaux.

L’association, en l’occurrence Emmaüs Solidarité, l’accompagne, par exemple dans ses démarches administratives.

« Une bouffée de liberté »

L’accompagnement des personnes pour favoriser leur insertion dans la société, est l’un des piliers de la démarche Logement d’abord, appliquée de longue date par les associations, et par l’Etat depuis 2017.

Dans les prochaines semaines, le ministre délégué à la Ville et au logement, Olivier Klein, doit présenter le second plan quinquennal pour le Logement d’abord.

Renforcement de l’accompagnement, modernisation du numéro d’urgence 115… le plan bénéficiera en 2023 de 44 millions d’euros supplémentaires, a d’ores et déjà esquissé Olivier Klein.

Elle prend le contrepied de l’idée selon laquelle « le logement, il faut travailler très dur pour le mériter », par exemple en trouvant un emploi, ou en réduisant sa consommation d’alcool ou de drogues, explique à l’AFP Samara Jones, coordinatrice de projets à Housing First Europe.

En octroyant d’emblée un logement aux personnes, plutôt que de les faire passer d’abord par l’hébergement d’urgence, « on enlève tout de suite cette pression, ce stress, d’être toujours dans la recherche d’où dormir ce soir, ou dans six mois; ça apaise la personne et ça lui donne la possibilité de s’engager avec les services d’accompagnement« , détaille-t-elle.

« Le toit sur la tête, je crois que c’est primordial. C’est rassurant. J’ose pas imaginer ce que c’est qu’une vie dehors« , raconte ainsi à l’AFP Daisy Le Dez, qui a pu être relogée immédiatement quand elle a quitté son compagnon « pervers narcissique » il y a 15 ans.

« Une bouffée de liberté. Et à ce moment-là, je me suis sentie pousser des ailes« , dit cette artiste-peintre de 63 ans, dans la salle à manger de la pension de famille où elle vit, dans une rue calme du XIVe arrondissement de Paris.

« Je ne vois pas trop comment je pourrais me sentir mieux ici!« , dit-elle. « Ce lieu m’a offert ce que j’ai toujours voulu avoir, c’est-à-dire une chambre à moi« .

« Accélérer »

En Finlande, pays modèle, depuis que l’approche Logement d’abord a été adoptée en 2008, le nombre de personnes mal logées a diminué de moitié.

Quasi toutes les places d’hébergement d’urgence ont été transformées en logements pérennes, raconte à l’AFP Juha Kahila, chargé des affaires internationales à la Fondation Y, clé de voûte de ce dispositif.

« Le gouvernement a soutenu cet effort depuis 2008, et tous les partis politiques ont soutenu cette approche. Il y a un engagement politique fort« , ajoute-t-il.

Mais pour que cela fonctionne, « il faut un plan à long terme pour construire des logements abordables« , prévient Juha Kahila. « On ne peut pas faire du logement d’abord si on n’a pas les logements ».

C’est là que le bât blesse en France.

Sous la présidence d’Emmanuel Macron, les autorisations de nouveaux logements sociaux sont tombées à moins de 100.000 par an en métropole, alors qu’il en faudrait 150.000.

Ce qui entrave l’un des objectifs du Logement d’abord : désengorger l’hébergement d’urgence, où se pressent toujours plus de gens – quelque 200.000 personnes – en y restant parfois des années.

« C’est un problème », affirme Lotfi Ouanezar, directeur général d’Emmaüs Solidarité. « Le Logement d’abord, c’est un super concept, mais il faut l’accélérer« .

Par MySweetImmo avec AFP