Immobilier : Le certificat de carrière devient-il obligatoire en cas de vente ?

Le certificat de carrière est crucial pour évaluer les risques liés aux anciennes carrières. Notaires et agents immobiliers doivent informer les acquéreurs des risques potentiels.

Maison miniature posée sur un sol fendillé

© adobestock

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Les carrières ont été développées afin de permettre aux secteurs de la construction, de l’industrie ou même de l’agriculture d’exploiter un grand nombre de matières premières minérales créant ainsi d’importantes cavités souterraines.

Récemment, le ministre en charge de la ville et du logement a dû répondre à la question de savoir s’il ne faudrait pas rendre obligatoire la remise d’un certificat de carrière à l’acquéreur d’un bien immobilier.

En date du 24 octobre 2023, il précise que le certificat de carrière ne figure pas dans la liste des documents devant être obligatoirement transmis à l’acquéreur et que le risque résultant du caractère non obligatoire de la délivrance de ce certificat est couvert par la pratique et les obligations afférentes à la mission du notaire.

Alors comment l’agent immobilier doit-il prendre en compte ce risque dans sa pratique professionnelle ?

Tout d’abord, qu’est-ce que le certificat de carrière ?

Le certificat de carrière est un document d’urbanisme administratif délivré par l’inspection générale des carrières pour un bien situé à Paris ou en petite couronne, et par les services de l’urbanisme dans les autres communes.

Il permet de savoir si un immeuble est situé ou non sur d’anciennes carrières ou dans un périmètre de carrières. Il renseigne à la fois sur la composition, la stabilité du sol et du sous-sol d’un terrain ainsi que sur les risques liés aux mouvements de terrain.

Ces informations sont indispensables dans le cadre de la délivrance de permis de construire pour un bien à construire ou à rénover, par exemple, et informent des risques d’affaissement ou d’effondrement du sol.

Quelle différence avec l’état des risques et pollutions ?

L’état des risques et pollutions est un diagnostic complet de la zone dans laquelle se situe l’immeuble.

L’état des risques et pollutions est, lui, obligatoire pour toute transaction immobilière portant sur un bien bâti ou non bâti situé dans des zones couvertes par un plan de prévention des risques technologiques, par un plan de prévention des risques miniers ou par un plan de prévention des risques naturels prévisibles, prescrit ou approuvé, dans des zones de sismicité ou dans des zones à potentiel radon définies par voie réglementaire ou dans une zone susceptible d’être atteinte par le recul du trait de côte. Il donne une information générale sur la zone dans laquelle le bien se situe sans stipuler si le risque est lié à la présence de carrières.

Le certificat de carrière renseigne en revanche spécifiquement sur l’existence ou non de carrières à proximité du bien ainsi que sur les risques liés aux mouvements de terrain.

Quels risques ?

Comme évoqué ci-dessus, acquérir un bien situé au-dessus ou à proximité d’une ancienne carrière comporte des risques d’affaissement et/ou d’effondrement du bien bâti ainsi que du terrain.

De même acquérir un bien situé dans une telle zone alors que l’on souhaite réaliser des travaux est synonyme de démarches longues et dépenses coûteuses. Il peut être demandé au propriétaire de prouver qu’il peut effectuer les travaux sans danger.

Pour ce faire, il devra recourir à une société spécialisée qui effectuera les sondages du sous-sol.

Il pourra ou se voir contraint de faire réaliser des travaux de comblement des sous-sols ou se retrouver dans l’incapacité de construire quoi que ce soit sur sa parcelle parce qu’il n’avait pas été mis au courant de l’état des sous-sols du bien acquis.

Une responsabilité qui relève du notaire

Le notaire collecte et analyse les informations reçues sur le bien permettant ainsi d’assurer la sécurité juridique de l’acte.

Il doit informer clairement l’acquéreur des risques et conséquences d’acheter un bien immobilier en zone de carrière.

Le 24 octobre dernier, le ministre en charge de la ville et du logement a rappellé :

  • que les notaires sollicitent, en pratique, les documents d’urbanisme en ce compris le certificat de carrière qui renseigne sur la situation du bien au regard des risques du sol et du sous-sol,

  • – que le notaire, de par son statut d’officier ministériel, est tenu d’un devoir de conseil et, suivant une formule consacrée par la jurisprudence de la cour de Cassation, il « est tenu d’éclairer les parties et d’appeler leur attention sur la portée, les effets, et les risques des actes auxquels il prête son concours »,

  • – qu’ainsi, le notaire se doit d’attirer l’attention de l’acquéreur sur les risques susceptibles d’affecter la constructibilité d’un terrain « à bâtir ».

  • – qu’à défaut, le notaire est susceptible d’engager sa responsabilité professionnelle.

Quid de la responsabilité de l’agent immobilier ?

Contrairement à l’étude géotechnique préalable de type G1 relative à la vente d’un terrain constructible pour la construction d’une maison individuelle situé dans une zone située en aléa moyen à fort au phénomène de retrait gonflement des argiles, le certificat de carrière n’a pas à être fourni préalablement à la mise en vente d’un terrain à bâtir ni même annexé à l’avant-contrat.

L’état des risques et pollutions, quant à lui, doit être mentionné dès la publication de l’annonce relative à la vente puis remis au potentiel acquéreur lors de la première visite de l’immeuble et enfin annexé à l’avant-contrat et acte de vente définitif.

Aucun texte n’impose à l’intermédiaire professionnel de fournir le certificat de carrière mais cela ne l’exonère pas pour autant de son obligation d’information et de conseil qui implique non seulement qu’il doit délivrer loyalement toutes les informations en sa possession de nature à influer sur la décision de l’acquéreur, mais aussi qu’il se renseigne lui‐même sur tous les points d’une certaine importance. Il doit signaler une difficulté connue aux acheteurs, et ce de manière officielle (CA Aix-en-provence, 1ère Chambre A, 29 mars 2016, n°15-02833).

Il revient donc au professionnel de l’immobilier de se renseigner et de renseigner l’acquéreur sur l’existence ou non de carrières, sur l’existence de risques ou non pour le bien à acquérir. Pour justifier de l’information donnée, il convient de le stipuler expressément aux termes de l’avant-contrat.

Bon à savoir pour les professionnels de l’immobilier : Tous les modèles de contrats préparatoires MODELO prévoient d’insérer les informations relatives au certificat de carrière.

Ce qu’il faut retenir en pratique

Aujourd’hui, le certificat de carrière n’est pas légalement obligatoire pour la vente d’un bien immobilier, bâti ou non bâti. Il est cependant indispensable dans le cadre de la vente de terrain à bâtir afin de connaître la faisabilité d’un projet de construction.

Enfin bien qu’il relève de la responsabilité du notaire de conseiller et d’informer l’acquéreur sur le bien et son environnement, le vendeur et le professionnel immobilier en charge de la vente du bien, bâti ou non, ne sont pas exonérés de leur obligation d’information s’ils ont connaissance de cette situation ainsi que des risques encourus.

Il leur revient en premier lieu de s’assurer que l’acquéreur prenne une décision suffisamment éclairée et qu’il s’engage à acquérir en toute connaissance de cause.

A défaut, l’acquéreur pourrait agir en annulation de la vente, pour vice caché contre le vendeur et mise en responsabilité du professionnel de l’immobilier.

Par Dorothee de Saintloup, juriste, Modelo