Crise de l’immobilier : Sale temps -aussi, pour les courtiers en crédit immobilier

Il n’y a pas que les agents immobiliers et les promoteurs qui souffrent de la crise de l’immobilier. Les temps sont difficiles aussi pour les courtiers en crédit immobiliers.

Parapluie jaune poses sur le sol sous la pluie pour illustrer la crise de l'immobilier

© adobestock

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Ecrasés par la baisse du nombre de crédits immobiliers et lâchés par les réseaux bancaires, les courtiers, intermédiaires entre les emprunteurs et les banques, vivent une période délicate, poussant certains à la surenchère et d’autres à jeter l’éponge.

« Tout le monde a traversé l’année 2023 en capitaine de rafiot sur une mer déchaînée« , raconte Ludovic Huzieux, cofondateur du réseau Artémis courtage.

« Il y a beaucoup de courtiers qui sont en difficulté aujourd’hui« , abonde Côme Robet, président de l’association professionnelle CNCEF Crédit.

6 300 courtiers contre 6 950 début 2023

L’Orias, association chargée de recenser et d’homologuer ces professionnels, comptait en fin d’année dernière 6.300 courtiers en opérations de banque et en services de paiement (COBSP), contre 6.950 début 2023.

« Beaucoup (…) sont partis faire autre chose« , constate M. Robet.

Le vent a tourné rapidement pour ces apporteurs d’affaires, après une période faste dopée aux taux bas. Les banques, se faisant pendant des années concurrence sur le crédit à l’habitat – un produit d’appel -, n’hésitaient pas à leur verser des commissions, autour de 1% du montant du crédit.

De quoi multiplier le salaire d’un courtier salarié, autour du Smic, par 2 à 4 fois avec le variable, selon plusieurs témoignages. Pour les indépendants, qui ne dépendent pas de réseaux plus larges, cette commission est vitale.

Mais la Banque centrale européenne (BCE) a sifflé la fin de la partie à l’été 2022 en augmentant ses taux directeurs, immédiatement répercutés dans leurs barèmes par les banques, soucieuses de leurs marges.

Les professionnels du courtage doivent s’adapter

Certaines banques « ont totalement arrêté le crédit immobilier, d’autres ne l’ont réservé qu’à leurs clients« , témoigne un dirigeant de banque en ligne.

Si bien que la Banque de France a récemment rappelé son rôle à la profession : financer l’économie. L’institution travaille à un mécanisme de recours pour les dossiers refusés mais potentiellement solvables.

Les candidats à l’emprunt se sont dans le même temps rendu compte qu’un point de pourcentage en plus sur leur crédit pouvait renchérir le coût d’un prêt, sur une période de 20 ou 25 ans, de plusieurs dizaines de milliers d’euros.

Nombre d’entre eux ont préféré reporter leur projet d’achat, espérant se rattraper un peu sur un prix de vente qui peine encore à baisser.

Le marché immobilier français a donc logiquement enregistré une « chute historique » de 22% des ventes en 2023, selon les données rendues publiques mardi par la Fédération nationale de l’immobilier (Fnaim).

La commission moyenne des courtiers s’est dans le même temps approchée de zéro, pour les quelques banques qui travaillaient encore avec eux.

« On est à un carrefour, le métier est en train de changer », estime M. Robet, qui milite pour le rôle de conseil du courtier, pas juste « je prends votre dossier et je l’amène à la banque« .

Selon lui, les professionnels du courtage ont intérêt à de diversifier vers l’accompagnement auprès d’autres clientèles, comme les chefs d’entreprises, vers l’assurance ou encore le conseil en patrimoine.

Des courtiers inquiets pour leur métier

Inquiets pour leur avenir, certains courtiers ont multiplié les coups de menton, épargnant soigneusement les établissements bancaires dont ils dépendent financièrement.

Le syndicat professionnel UIC a par exemple organisé deux manifestations devant les locaux de la Banque de France à Paris, réunissant en septembre 2022 une centaine de personnes – et seulement une quinzaine en novembre 2023.

Plusieurs de leurs confrères font part auprès de l’AFP de leur malaise devant la méthode employée. Coiffés de bérets évoquant l’Abbé Pierre, les manifestants dénonçaient le déni de la Banque de France, notamment sur le taux d’usure, taux maximum appliqué aux crédits immobiliers pour limiter le surendettement.

Ils s’attaquaient également aux règles du Haut Conseil de stabilité financière (HCSF, caricaturé en « Hallucination collective sacrifiant les Français ») qui plafonnent entre autres le taux d’effort, c’est-à-dire le montant total des dépenses liées à l’habitation rapporté aux revenus.

Ces garde-fous visent à limiter les défauts des emprunteurs, un événement rare qui aura des répercussions sur la banque prêteuse et l’assureur, mais pas le courtier.

Par MySweetImmo avec AFP