Crise sanitaire et immobilier : un plan de relance pour rien ?

Le Plan de relance du gouvernement est-il à la hauteur de la situation en matière de logement et d’immobilier. Rien n’est moins sûr selon Michel Mouillart, Professeur d’Economie, FRICS. Analyse.

Plan de relance Logement

© adobestock

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Avec le déclenchement de la crise sanitaire et ses conséquences économiques et sociales, la question du logement s’est renforcée dans le contexte d’une crise qui n’en finit pas de durer, qui n’épargne aucun territoire ni aucune catégorie de ménages, même si elle pénalise particulièrement les plus modestes et les plus fragiles, les jeunes et les familles mono parentales, les retraités et les travailleurs pauvres.

A force de réglages de paramètres, de sous-actualisations de barèmes, de délimitation arbitraire des zones A/B/C, de redéfinition des catégories de bénéficiaires, … des dispositifs entiers ont été engloutis dans des réformes toujours « plus sociales » les unes que les autres : les taux d’effort se sont alourdis pour les plus modestes, le coût de l’accès à un logement décent s’est fortement accru, le choix du statut d’occupation a été abandonné pour les moins aisés qui vivent comme une assignation à résidence ce qui aurait dû n’être qu’une étape de leur parcours résidentiel, les prix de la centralité et de l’accès aux équipements collectifs se sont envolés créant des inégalités nouvelles devenues intolérables … A force de ne pas avoir assez construit pendant plus de dix années et d’avoir répété que la rénovation du parc de logements allait tout solutionner, une partie du parc occupé bascule dans l’obsolescence. Faute de logements en quantité suffisante, les exclusions se renforcent, des emplois ne sont pas créés, les entreprises butent sur le manque de logements lorsqu’elles souhaitent se développer, les délais de transport entre domicile et travail se sont allongés …

Le déclenchement de la Covid-19 et la récession économique vont maintenant fortement impacter le secteur du logement, pour de nombreuses années.

Le déclenchement de la Covid-19 et la récession économique vont maintenant fortement impacter le secteur du logement, pour de nombreuses années. Avec la chute de la construction sociale et privée qui a été amplifiée, avec l’effondrement des marchés de la transaction, avec la panne de la rénovation énergétique du parc de logements privés, … les déséquilibres quantitatifs ne vont que s’aggraver. Et malheureusement la tentation va être probablement forte, une fois l’émotion de la crise passée, de reprendre les vieilles habitudes. Elle fera ressurgir les préférences des décideurs parisiens qui ont placé dans le tout métropolitain l’avenir des politiques du logement, alors que le confinement dans des espaces logement exigus a renforcé dans les cités et les villes des périphéries le sentiment que l’avenir n’est pas forcément dans la lutte contre l’artificialisation des sols, mais qu’il est plus probablement dans le pré …

C’est dans ce contexte que les récentes annonces du Plan de Relance s’inscrivent. Et il n’est guère évident qu’elles répondent aux multiples attentes que la crise a fait (re)naître.

Avant la tempête, les premières alertes

La crise sanitaire et la mise en œuvre du confinement ont (et vont encore) lourdement pesé sur la construction de logements et sur le marché de la transaction. Pour autant, il serait inexact de faire « comme si », avant la tempête, tout n’était que croissance et harmonie.

Par exemple, et en dépit d’un « rebond de fin d’année » présenté comme le signe avant-coureur du redémarrage de la construction locative sociale, l’année 2018 a confirmé l’entrée en « dépression » de la consommation des agréments de financement. Le contraire aurait été étonnant, après la mise en œuvre des décisions budgétaires de l’automne 2017 (1). Et le recul s’est poursuivi en 2019, sans faire apparaître ces signes de « frémissement » annoncés par les pouvoirs publics : 114 400 agréments ont été accordés en 2019 (un des plus bas niveaux depuis 2007), contre 130 200 unités en 2016 (- 12.1 %).

Et comme aucune des composantes de la construction n’a bénéficié de l’embellie que la mise en œuvre de la loi ELAN devait lui assurer (2), le nombre de permis de construire a reculé de 6.5 % en 2018, puis de 3.3 % en 2019 : entre 2017 et 2019, il a donc reculé de 9.6 % au total, soit une perte de 47 100 unités. Le niveau de la construction mesuré au niveau des logements commencés ne pouvait donc que diminuer : partant de 428 300 commencés en 2017, le niveau de la construction a reculé de 19 100 unités, pour s’établir 409 200 en 2019.

C’est dans ce contexte d’incertitudes et d’hésitations qu’en décembre 2019 le Ministre de l’Economie a décidé de limiter le financement des projets immobiliers des ménages par les banques : en amenant ces dernières à ne pas dépasser un taux d’effort à l’octroi de 33 %. Donc en restreignant les possibilités d’accession à la propriété des ménages modestes, des jeunes ou des familles nombreuses faiblement dotés en apport personnel.

(…) Dès la fin de l’année 2019 la demande de logements et la production de crédits immobiliers ont commencé à vaciller, à flancher

Aucun argument solide n’a pu être présenté à l’appui de cette décision, même pas celui du surendettement des emprunteurs immobiliers puisque début janvier, le gouverneur de la Banque de France se félicitait du recul du nombre de ménages surendettés . Pourtant ce sont entre 120 000 et 130 000 ménages, essentiellement des accédants à la propriété dans le neuf et dans l’ancien, qui avant le déclenchement de la crise de la Covid-19 allaient être empêchés de réaliser leur projet immobilier (3). Comme le cœur de cible des « recommandations » du HCSF est constitué de ménages modestes et/ou faiblement dotés en apport personnel, cette décision n’a fait que rajouter de l’inégalité aux inégalités en empêchant ces ménages de se constituer un patrimoine immobilier.

Ainsi, dès la fin de l’année 2019 la demande de logements et la production de crédits immobiliers ont commencé à vaciller, à flancher. Avant le déclenchement de la crise sanitaire, les mois de janvier et de février 2020 ont porté les conséquences des décisions de la Banque de France : avec, par exemple, un nombre d’actes dans l’existant en baisse des 5.6 % (trimestriel glissant en glissement annuel) d’après le CGEDD pourtant en retard de plusieurs semaines sur le marché, un nombre de ventes des constructeurs de maisons individuelles (qui toutefois bénéficiait du rétablissement du PTZ) en chute de 14.2 % par rapport à 2017 (dernière année avec un PTZ non dégradé) d’après le Markemétron … et évidemment un nombre de prêts bancaires accordés en baisse de 6.6 % (en glissement annuel) d’après l’Observatoire Crédit Logement/CSA.

Et bien sûr, ce n’est pas le marché de l’amélioration-entretien des logements, ni d’ailleurs celui de la rénovation énergétique du parc privé présentée comme essentielle par la « loi sur la transition énergétique » d’août 2015 qui ont permis de compenser le recul de la construction et son impact sur l’activité des entreprises ou sur les conditions de logement des ménages (4). Car la lutte contre la précarité énergétique et/ou contre le réchauffement climatique n’a pas été convaincante. Ni le PTZ dans l’ancien (moins de 2 000 unités par mois en 2019 !), ni les interventions de l’ANAH, voire le Programme d’Action « Cœur de ville » et le Denormandie dans l’ancien ou le CITE n’ont permis de redynamiser ce marché (5): alors que jusqu’en 2013 les ménages réalisaient en moyenne chaque année de l’ordre de 750 000 opérations d’amélioration-entretien ou de travaux seuls financés par des crédits immobiliers, la taille de ce marché s’est réduite de plus de 35 % depuis (entre 450 000 et 500 000 opérations par an).

Une chute sévère négligée par les pouvoirs publics ?

Alors que depuis le 3 septembre un haut-commissaire au Plan est venu renforcer les capacités d’analyse et de prospective dont les décideurs publics paraissent parfois (souvent ?) manquer, le début de la crise économique et sociale (et ses développement ultérieurs) n’a pas dû être facile à décrypter pour la plupart des décideurs privés. Car si le Plan est avant tout un puissant réducteur d’incertitudes pour ceux des agents économiques qui s’aventurent dans le moyen et le long terme, le terrain favori des investissements immobiliers par exemple, les messages lancés par le Ministre des Finances paraissaient pour le moins décalés : lors de la présentation de la 1ère Loi de Finances Rectificatives, le 17 mars, il estimait le recul du PIB à 1 %, en 2020 ; la Commission des Finances du Sénat qui avait consulté les principaux organismes privés en charge des prévisions économiques penchait plutôt pour 5 % (voire pour 7 à 8 %) … pendant que le Bundestag qui présentait son budget rectificatif le 24 mars avait retenu 5 %, pour l’Allemagne ! Quelques semaines plus tard, le 28 avril lors de la présentation de la 2ème Loi de Finances Rectificatives, le Ministre de l’Economie avançait une récession avec un PIB en recul de 8 % … pour corriger à nouveau son estimation le 2 juin et annoncer une baisse de 11 %.

Et que dire des fameuses statistiques de la construction qui ont totalement disparu des écrans pendant la crise (et après), laissant les responsables du secteur (y compris le Ministre du Logement, très certainement) sans repères : les chiffres de février dont la publication était prévue pour le 27 mars ont été rendus publics le 26 mai, une fois la tempête passée ; alors que les chiffres de mars, avril et mai n’ont été publiés que le 2 juillet ! Jamais depuis 75 ans le système statistique n’était resté aux abonnés absents pendant aussi longtemps. Même en 1968 … Alors que les services de l’Etat ont continué d’imposer au secteur privé la remontée des statistiques « obligatoires » : les déclarations de TVA, la production de crédits du secteur bancaire, …

Le nombre de mises en chantier va reculer (au moins) de 42 000 unités en 2020, et encore de 46 000 unités en 2021, pour passer de 428 300 en 2017 … à 321 200 en 2021

Et que dire de la consommation des agréments de financement des logements locatifs sociaux pourtant essentielle afin de savoir où va la construction locative sociale dont les Ministres du Logement se sont si souvent inquiétés. Car depuis nombre d’années déjà, la diffusion des statistiques mensuelles a dû être frappée d’un « secret défense » partiel ! Au point d’ailleurs que le bilan annuel d’une année n’est publié qu’au mois d’août de l’année suivante, comme cette année encore.

Mais rien n’y fait : le nombre de mises en chantier va reculer (au moins) de 42 000 unités en 2020, et encore de 46 000 unités en 2021, pour passer de 428 300 en 2017 … à 321 200 en 2021 (6). Il va ainsi s’établir à 15 000 unités de moins qu’en 2014 quand il n’y avait pas de crise et à 25 000 de moins qu’en 2009 lors de la dépression économique et financière internationale. Donc, pour revenir un quart de siècle en arrière.

Il va donc redescendre à un niveau tel qu’en 2021, la France devrait construire moins de logements qu’il y a 70 ans, en 1951, si on tient compte de l’évolution du nombre de ménages qu’il convient de loger!

Alors que la construction locative sociale semble toujours en panne : les remontées de la part d’organismes HLM indiquent une chute des agréments de financement qui à fin août serait comprise entre 20 et 25 %, par comparaison avec les huit premiers mois de 2019. Il semble peu probable qu’un objectif de production de 110 000 à 120 000 logements locatifs sociaux puisse être tenu pour 2020 : même avec la surconsommation habituelle de fin d’année qui, entre le 15 décembre et le 15 janvier (voire souvent jusqu’au 20 ou 25 janvier !) fait gonfler les statistiques publiées, la production de 2020 devrait plutôt s’établir à près de 105 000 agréments. Faisant qu’au total, le nombre de logements locatifs sociaux mis en chantier cette année sera de l’ordre de 82 000 unités … contre 105 000 unités en 2017 !

Bien sûr, toutes les explications « ad hoc » ont été apportées afin de faire comme si la chute de la construction ne pouvait qu’être récente et évidemment indépendante des décisions publiques passées : la responsabilité des maires qui retardent l’octroi des permis de construire a donc été de nouveau largement avancée, comme d’ailleurs celle des banquiers qui refuseraient de prêter à des ménages qui ne demandent que cela … Ce qui au passage, permettrait d’expliquer pourquoi les flux de l’accession à la propriété se sont « écroulés ».

En effet, entre 2019 et 2021, le nombre des nouvelles accessions réalisées chaque année devrait perdre près de 265 000 unités (- 29.5 %), soit autant que durant la crise des années 2008-2009. Comme les ménages en primo accession (de l’ordre des ¾ de l’accession) viennent pour à peu près 1/3 d’entre eux du parc locatif social, la chute de l’accession va confisquer une année de construction locative sociale et renforcera le blocage de la mobilité résidentielle au sein du parc social. Il est dès lors fréquent d’entendre, même de la part de responsables ministériels, qu’en fait ce seraient des ménages risqués qui habituellement finissent en commission de surendettement qui auraient été écartés de l’accession … même si les bilans annuels de la Banque de France n’ont jamais pu l’établir.

En attendant un plan de relance de l’immobilier

La présentation du plan de relance, le 3 septembre, est donc intervenue près de 6 mois après le début de la crise. Bien sûr, on ne peut que souligner la (très) faible place qui a été réservée au secteur du logement. Mais comme ce plan a été peaufinée par une administration des Finances qui pilote la politique du logement depuis plus de 3 années, il aurait été étonnant qu’il en soit autrement : l’accent n’a-t-il pas été mis sur la nécessité de soutenir l’offre ? Même si on peut parfois penser que les entreprises de construction et de réhabilitation relèvent certes du domaine de l’offre … mais que si la demande n’est pas au rendez-vous, leur offre nouvelle ne viendra qu’alimenter les stocks d’invendus et les faillites.

C’est d’ailleurs probablement pour cette raison que la décision de suspendre les recommandations du HCSF qui pèsent pourtant lourdement sur l’activité du secteur n’a pas été prise : cela n’aurait fait que soutenir la demande, et qui plus est celle des ménages modestes. Bien sûr, la Présidente de la BCE n’a cessé de rappeler la nécessité de soutenir par le financement bancaire l’activité économique, dont les dépenses et les investissements des ménages. Mais cela n’est probablement pas audible par l’administration des Finances.

Il semble singulier d’élargir le dispositif « MaPrimeRénov’ aux ménages aux revenus moyens/élevés alors que ce sont déjà ceux qui réalisent les travaux de rénovation énergétique

De toute façon, la principale (pour ne pas dire l’unique) mesure de soutien au secteur (« MaPrimeRénov’ ») ne sera opérationnelle qu’à compter du 1er janvier 2021, soit près de 10 mois après le début de la crise. Il n’est pas inutile de rappeler que 2 mois après le déclenchement de la crise des « subprimes », un plan de relance du secteur du logement avait été annoncé par le Président de la République à Meaux, dès le 28 novembre 2008. Et le décret détaillant les principales mesures était publié le 28 décembre 2008 : donc 3 mois après le début de la crise !

En outre, il n’est guère certain que le dispositif « MaPrimeRénov’ » permette de faire plus et mieux que ses prédécesseurs. Bien sûr, la nouvelle prime sera ouverte à l’ensemble des ménages, sans conditions de revenus, à partir du 1er janvier 2021. Pour autant, une enveloppe de 2 Mds d’€ sur 2021-2022 en remplacement du CITE aura beaucoup de mal à redynamiser le marché de la rénovation énergétique :

– au plan quantitatif : d’après l’annexe au projet de Loi de Finances pour 2020 (Evaluations des voies et moyens), le CITE dont le coût budgétaire a été estimé à 1.1 Md d’€ en 2020 par l’administration des Finances permet d’accompagner la transition énergétique de 1 419 100 ménages (dépense budgétaire n° 110 222). Jusqu’au printemps dernier, l’objectif gouvernemental concernant le dispositif « MaPrimeRénov’ » était de 200 000 primes distribuées en 2020 et de 500 000 en 2021. Bien sûr, la première année du dispositif a été perturbée et l’objectif 2020 ne sera pas atteint. Mais pour 2021, même en ouvrant largement le dispositif aux ménages moyens et aisés, il est quasiment certain qu’il ne touchera pas près de 2 millions de ménages : sauf peut-être avec une enveloppe budgétaire annuelle de plus de 2 Mds d’€ et des primes de très faible niveau ;
– du point de vue des bénéficiaires : la communication gouvernementale autour de « MaPrimeRénov » a mis en avant une étude récente du SDES qui actualise des travaux antérieurs, notamment réalisés par l’ADEME. Au-delà du chiffre des 4.8 millions de passoires thermiques, cette étude confirme que la situation n’a guère évolué au cours des dernières années. Que les passoires thermiques sont localisées hors les grandes métropoles dans des départements ruraux et/ou dans des villes moyennes, qu’elles abritent des ménages modestes et très modestes dans le parc privé, qu’elles concernent plus fréquemment des maisons individuelles, … et que le secteur locatif social qui a largement bénéficié des soutiens publics afin d’entretenir et d’améliorer son parc de logements depuis la fin des années 70 n’est pas, et de loin, le plus mal loti ;
– il semble enfin singulier d’élargir le dispositif « MaPrimeRénov’ aux ménages aux revenus moyens/élevés alors que ce sont déjà ceux qui réalisent les travaux de rénovation énergétique. Sauf, bien sûr, s’il faut que les chiffres de la consommation montrent que la « massification » est en cours.

Pour l’INSEE, entre 2020 et 2050, il devrait y avoir chaque année entre 245 000 et 375 000 nouveaux ménages.

Il faudra donc attendre le PLF pour 2021 pour connaître les véritables intentions du gouvernement à l’égard du secteur du logement, donc le sort réservé par le budget du Logement préparé par l’administration des Finances au PTZ, au Pinel, aux aides personnelles, … Et il ne semble pas raisonnable de nourrir beaucoup d’espoirs à ces sujets : le « verdissement » remplace désormais le soutien au secteur du logement et à la demande qui lui est adressée, comme ce fut d’ailleurs le cas de 2012 à 2014. Dans ces conditions, rien ne peut venir modifier les scénarios d’évolution du secteur du logement à moyen terme : la construction recule, la rénovation énergétique est en panne, le marché de l’ancien va rester à la peine, … comme avant. Mais on ne peut que se poser une question à laquelle le haut-commissaire au Plan a dû, sans aucun doute, réfléchir : comment va-t-on loger les ménages dans les prochaines années ?

Pour l’INSEE, entre 2020 et 2050, il devrait y avoir chaque année entre 245 000 et 375 000 nouveaux ménages. Probablement 320 000 à 330 000 d’après les hypothèses retenues par l’INSEE. Au mieux, compte tenu des tendances actuelles de la construction et même sans désespérer de futurs plans de relance de la construction qui ne pourront qu’être plus ambitieux que l’actuel, le parc de résidences principales (les ménages) devrait s’accroître chaque année de l’ordre de 285 000 unités à l’horizon 2050 (pour un niveau moyen de construction de 360 000 unités : contre à peu près 365 000 par an entre 1990 et 2020).

L’écart annuel entre l’offre et la demande de nouveaux logements devrait donc être de l’ordre de 40 000 unités (ménages), voire plus peut-être. Un vrai problème pour après-demain …

(1)Déjà, les négociations autour de la réforme d’Action Logement avaient ralenti les engagements du 1 % en faveur de la construction locative sociale au cours du printemps 2017. Puis la baisse des APL location et la création d’une réduction de loyer de solidarité (l’article 126 de la loi de Finances pour 2018) ont pesé lourdement sur la consommation des agréments. (2)Bien au contraire, si on rappelle la dégradation du PTZ et du Pinel dans les zones B2 et C et la suppression de l’APL-accession, notamment ; ainsi que les effets que ces mesures ont pu avoir sur l’activité des marchés. (3) On peut ainsi estimer que cette décision du Ministre de l’Economie inspirée par la Banque de France portera, à elle-seule, 40 % du recul des marchés immobiliers attendu en 2020. (4)« La rénovation (énergétique) du parc de logements privé constitue-t-elle une priorité ? », Immoweek, Chronique, 18 avril 2019. (5) La rénovation du parc privé a été plus que négligée ! Il est vrai que la question du chiffrage des montants et du financement des travaux à réaliser sur ces logements n’avait pas été traitée par la LTE, ou plutôt n’avait pas été volontairement abordée. Alors que l’objectif annuel de rénovation énergétique du parc locatif social affiché par la LTE reste volontaire et les moyens mobilisés pour cela à la hauteur, avec 120 000 logements chaque année entre 2017 et 2030. D’ailleurs ce programme s’inscrit dans la suite des différentes générations PALULOS qui se sont succédées depuis la fin des années 70 (sans oublier, bien sûr, les PNRU et les Eco-PLS) : avec, notamment, le programme du million de logements sociaux réhabilités décidé par le Président de la République lors du 50ème congrès HLM de juin 1989, la convention du 17 janvier 1995 signée entre l’Etat et l’UNFOHLM prévoyant la réhabilitation de 600 000 logements … tout cela faisant qu’au total, ce sont près de 6.5 millions de logements locatifs sociaux (dont plus de 4 millions relevant du gros entretien) qui ont déjà été réhabilités avec des aides publiques, au cours des 40 dernières années. (6) Pour une analyse de la situation du marché de l’ancien : « Le monde d’après … », Journal de l’Agence, n° 67, septembre 2020. (7) « Le parc de logements par classe de consommation énergétique », Service des données et études statistiques (SDES), CGDD, document de travail n° 49, septembre 2020. (8) Il peut paraître étonnant que des arrêtés, décrets et ordonnance récents se semblent pas aller dans le sens de l’amplification du mouvement de rénovation des logements privés : comme, le décret et l’arrêté présenté au CNH du 8 juillet 2020 modifiant le décret n°2020-26 du 14 janvier 2020 relatif à la prime de transition énergétique et qui visent « à mieux protéger les français contre certaines pratiques commerciales agressives, pour certaines frauduleuses, et stopper la dérive inflationniste observée sur les devis relatifs à l’isolation thermique par l’extérieur », d’après le ministère du Logement. Mais l’approche retenue par le ministère reste ambigüe : faire l’impasse sur les mesures d’accompagnement des ménages les plus fragiles qui sont pourtant les premières victimes des pratiques frauduleuses ; en limitant l’aide financière apportée, pénaliser les ménages pour lesquels les entreprises font correctement les travaux et ceux qui vont bénéficier d’un accompagnement de type assistance à la maîtrise d’ouvrage avec un montage de projet sécurisé … (9) Pour une analyse plus détaillée : « Combien faudra-t-il construire de logements demain ? », Observateur de l’Immobilier, n° 95, novembre 2017, pp. 8 à 19.

Michel Mouillart, Professeur d’Economie, FRICS
Cet article reprend et enrichit l’intervention de Michel Mouillart aux Entretiens d’Inxauseta (Bunus), le 28 août 2020 en présence d’Emmanuelle Wargon, Ministre du Logement  : « Quelle place pour le logement dans la France de demain ? ».
Faute de logements en quantité suffisante, les exclusions se renforcent, des emplois ne sont pas créés, les entreprises butent sur le manque de logements lorsqu’elles souhaitent se développer, les délais de transport entre domicile et travail se sont allongés …