Immobilier : Nantes, marché baissier ou juste réequillibrage des prix ?

Comme dans la majorité des grandes villes de province, le marché semble se stabiliser à Nantes. Le signe d’un rééquilibrage ou celui d’un marché en pente descendante ? L’éclairage de Denis Orain, conseiller en immobilier « De la cour au jardin ».

A Nantes, des immeubles de part et d'autres de l'Erdre

© adobestock

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My Sweet Immo : Comment se comporte le marché immobilier nantais depuis la fin de l’été ?

Denis Orain : Le marché Nantais est très disparate, mais ce n’est pas nouveau, et les prix fluctuent de 2 500 € à plus de 6 000€ du mètre carré selon les quartiers. Depuis la rentrée, je sens cependant que le marché devient plus compliqué. Je constate que les prix sont en légère baisse au regard du mois de juin.

Alors que la période post-covid était « délirante », avec des ventes réalisées en quelques jours seulement, au maximum 10 jours, le délai de vente s’établit aujourd’hui davantage entre un et trois mois. Il recule y compris dans les quartiers les plus prisés que sont Canclaux, Zola, Monselet, Hauts-Pavés, Talensac ou Saint-Félix. 

My Sweet Immo : Les conditions d’octroi des crédits pénalisent-elles les ventes immobilières à Nantes ?

Denis Orain : Oui, et de façon générale la baisse du pouvoir d’achat des ménages se ressent. Les acquéreurs ont tendance à négocier davantage, y compris les biens sans défaut. Les propriétaires commencent quant à eux à comprendre qu’il faut revenir à la négociation.

Cependant, nous sommes actuellement  dans un marché de « bonne négociation » entre les deux parties, avec un équilibre, et les acquéreurs ne sont pas encore dans une position de force marquée.

Ce qui n’empêche pas certains de tenter d’en tirer profit. Je suis par exemple en train de vendre un appartement aux Sorinières : un 3 pièces de 68m², dans une jolie résidence avec une grande terrasse sud-ouest, qui est mis en vente à 279 500€ FAI (4110€ /m²). Un acquéreur a fait une offre à 249 500€ : une telle négociation n’était dans ce cas absolument pas justifiée, car le bien ne souffre d’aucun défaut, et l’offre n’a donc pas été considérée. Il y a un comportement très opportuniste de certains acheteurs qui essaient de profiter de la tendance à la baisse pour faire des offres extrêmement agressives. Le seul résultat est de fermer la discussion.

My Sweet Immo : Est-ce que le marché se comporte de façon identique pour toutes les tranches de prix ?

Denis Orain : Non, effectivement. Je remarque une différence entre le marché des biens entre 200 000 et 350 000 euros, et celui de ceux à partir de 500 000 euros. Dans la tranche haute, la question du financement pose moins de problèmes et les ventes sont plus faciles, avec peu de négociation et des délais de vente plus courts.

Pour les « petits » biens en revanche, la question du crédit est essentielle : aujourd’hui,le courtier en crédit avec qui je travaille depuis des années me confirme que près d’un dossier sur deux est refusé. Ce qui nous amène à recevoir des offres basses, pour « rentrer dans le budget », mais qui ne correspondent pas aux prix du marché. A Canclaux, il faut par exemple compter entre 5 000€ et 6 000€ du mètre carré pour une maison avec jardin, le bien le plus recherché, plus de 6 000€ / m² pour certains biens dans le quartier des Hauts-Pavés ou à Saint-Félix, qui a la préférence des anciens parisiens pour son animation et la proximité du centre.

My Sweet Immo : Quelles sont les solutions pour les ménages qui dépassent le taux d’effort ?

Denis Orain : Les ménages qui ne peuvent plus acheter à Nantes suite à l’augmentation des prix de la période post-covid, qui a connu un afflux de nouveaux habitants, acquièrent des biens en périphérie. Les Sorinières, particulièrement bien placée et bien desservie, est une petite ville dynamique aux nombreux commerces qui commence à prendre de la valeur. On peut ici trouver des biens récents entre 3 500€ et 4 000€ / m².

A Rezé, il existe « un marché de l’achat raison » car on peut encore y acheter des biens à moins de 3 000€ / m², mais ils se vendent plus difficilement que l’an passé. Je suis par exemple en train de vendre un appartement de 82m² qui se serait vendu au prix rapidement il y a un an. Après une baisse de 11 % du prix de vente, il a trouvé acquéreur  mais moyennant une négociation supplémentaire de 1,34 %, soit 2 715€/m² au lieu des 3 049€ espérés au départ.

My Sweet Immo : Pouvez-vous nous détailler vos dernières ventes à Nantes ?

Denis Orain : A Petit-Port, à deux pas de l’hippodrome et des transports, une maison de 146m² sur un terrain de 308m² a été vendue en deux semaines et sans négociation au prix de 665 000 € FAI, soit 4 555€ / m². L’acte authentique a été signé le 7 juillet. En avril dernier, j’ai vendu en une journée une maison de 142 m² sur un grand terrain de près de 1000 m², à 566 800 € FAI (3 992€/m²). Elle est située à 200 mètres des bords de l’Edre, dans le quartier Gachet. Fin août, j’ai vendu en trois mois un appartement de 87m² avec terrasse entre le Pont du Cens et le haut du Boulevard Schuman. L’appartement disposait d’ un parking en sous-sol et était affiché à 277 700 € (3 192€/m²). Il s’est finalement vendu avec une négociation de 3 200€, soit 3 155€ du mètre carré.

Par Julie Mallet-Cocoual
Merci Denis Orain, conseiller immobilier De La Cour au Jardin, pour cette analyse éclairante du marché immobilier à Nantes.