Logement : Le gouvernement face à une « bombe » sociale et la pression du Parlement

A la recherche de solutions face à la « bombe » sociale du logement et en s’efforçant de ne pas faire déraper les finances publiques, le gouvernement a actionné quelques leviers fiscaux dans son projet de budget sans totalement convaincre, même au sein de sa majorité.

Portrait de Thomas Cazenave, ministre des comptes publics

© Joël Saget - AFP

Thomas Cazenave, Ministre des comptes publics

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« Le secteur est en triple crise » – de production, environnementale et d’adaptation au vieillissement de la population-, a alerté le ministre chargé du Logement Patrice Vergriete mercredi, expliquant travailler à la création d’un « choc d’offre foncière« .

L’exécutif a aussi annoncé un projet de loi début 2024 contre l’habitat indigne et ambitionne d’en présenter un sur la décentralisation de la politique du logement au printemps.

Il a également apporté des touches fiscales dans la partie « recettes » de son budget 2024 (PLF), adopté en première lecture via l’article 49.3. Mais les amendements déçoivent. « Il n’y a absolument rien qui passe », soupirait une source au sein de la majorité à l’Assemblée après un entretien ministériel.

« Un PLF n’est pas une loi logement« , défend l’entourage du ministre des Comptes publics Thomas Cazenave, qui insiste sur certaines mesures retenues, comme un abattement temporaire sur des plus-values immobilières foncières, ou la hausse du nombre de personnes éligibles au prêt à taux zéro (PTZ, + 6 millions, selon Bercy).

« Un effet d’annonce« , selon la Fédération française du bâtiment, qui critique la restriction du « PTZ » aux zones « tendues » pour les constructions neuves, qui « exclut à peu près 90% du territoire« . Une mesure combattue par des députés d’opposition et de la majorité.

Autre point de crispation, la fiscalité appliquée aux locations de type AirBnb. Le gouvernement a retenu un amendement pour réduire l’abattement de 71% à 50% sur les locations de certains logements, en zone tendue, avec un seuil à 77.700 euros. En zone non-tendue l’abattement serait de 71% mais avec un seuil à 50.000 euros. Mais des élus d’opposition dénoncent une « mesurette« , concernant une « infime partie des locations« .

Enfiler des perles

« A ce stade c’est insuffisant« , regrette Guillaume Kasbarian (Renaissance), président de la commission des Affaires économiques.

« On ne va pas attendre un an la prochaine discussion budgétaire« , insiste-t-il, appelant à examiner un texte transpartisan Renaissance-PS, qui entend s’attaquer plus fortement à cette « niche » fiscale, renforcer des obligations de rénovation thermique pour les logements concernés, et apporter plus de leviers de régulation aux élus.

Il a écrit à la présidente de l’Assemblée pour demander son inscription début décembre.

« Certains cabinets (gouvernementaux) semblent frileux sur le sujet. Ils s’abritent derrière un prétendu manque de données pour repousser la mesure. On n’a pas été élus pour enfiler des perles. On fait de la politique« , martèle le député, qui salue toutefois les textes « logement » annoncés pour 2024.

L’allié du MoDem a fait passer quelques amendements, mais essuyé plusieurs rejets, et le patron du groupe Jean-Paul Mattei juge les « avancées » au PLF « transitoires« . Il a appelé à un « travail plus approfondi dans les prochains mois« .

Les oppositions ont fait passer beaucoup d’amendement en commission des finances sur la partie « dépenses » du budget, mais ils devraient pour beaucoup être écartés au prochain 49.3 car jugés trop coûteux. Mais elles disposeront d’autres opportunités, notamment dans leurs « niches parlementaires« .

LFI proposera le 30 novembre un texte contre la crise du logement chez les jeunes, qui vise aussi à augmenter le nombre de logements sociaux et encadrer les loyers.

Le groupe LR aura sa propre fenêtre la semaine suivante.

S’il n’a pas l’assurance que son texte soit sélectionné, le député Thibault Bazin propose justement de reporter l’interdiction de location des « passoires thermiques » à 2030 plutôt que 2025, – un calendrier également questionné par Horizons, allié de la majorité. Il suggère aussi d’exonérer certains dons intra-familiaux pour « acquérir une résidence principale » et d’élargir le PTZ, pour relancer le marché.

Le secteur redoute 150.000 emplois supprimés d’ici 2025 face aux déboires de la construction neuve.

« Le logement est vraiment une bombe qui va exploser », alerte Valérie Rabault (PS). « On ne peut pas dire que le pays a une population qui augmente chaque année et ne pas envisager plus de logement. C’est mathématique« .

Par MySweetImmo avec AFP