« Immobilier : Trop de ménages exclus du crédit », Sylvain Lefèvre (Centrale de Financement)

Sylvain Lefèvre, président de La Centrale de Financement dresse le bilan de l’année 2022 et dessine les perspectives 2023 au micro d’Ariane Artinian.

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Où en est le marché du crédit immobilier en ce début d’année 2023 ? Réponse avec Sylvain Lefèvre, président du courtier La Centrale de Financement au micro d’Ariane Artinian pour ce nouvel épisode de Mon Podcast Immo.

Mon Podcast Immo : Vous vous apprêtez à fêter vos 10 ans…

Sylvain Lefèvre : Nous avons commencé l’aventure avec François Pinault et son groupe Artemis alors que la réglementation de 2013 organisait enfin le métier de courtage en crédit immobilier. Dix ans après, La Centrale de financement est devenu le 3e acteur de France avec 4,5 milliards d’euros de crédits décaissés, 19 500 crédits mis en place cette année, 180 agences et 900 collaborateurs.

Mon Podcast Immo : Quel bilan dressez-vous de l’année 2022 ?

Sylvain Lefèvre : La crise d’aujourd’hui se caractérise par des ménages qui ont envie d’acheter mais qui ne le peuvent pas à cause du taux d’usure qui bloque. Il y a d’abord eu une baisse des taux trop rapide pendant le covid qui a fait flamber les prix de l’immobilier, suivie d’une hausse à son tour trop rapide qui a bloqué le système. Même si nous avions de l’avance sur les trimestres précédents, tout s’est grippé au 2e semestre 2022 à cause du taux d’usure qui avait été conçu sans penser que les taux d’intérêt pouvaient s’emballer trop vite. L’État n’a pas cru bon de répondre aux alertes de l’ensemble de la filière (promoteurs, construteurs…). Il faut rappeler que le ministre de l’Économie et des Finances a le pouvoir de surseoir à la réglementation, mais il s’est basé sur le nombre de transactions réalisées alors que nous parlons de transactions à venir.

Mon Podcast Immo : Quelle est, à votre niveau, la chute de la production de crédit ?

Sylvain Lefèvre : Nous enregistrons une baisse de 30 % au dernier trimestre 2022. Parmi les exclus du crédit, on trouve les primo-accédants, les ménages un peu plus âgés et les retraités pénalisés par le coût de l’assurance. Sans oublier ceux qui ont eu un problème de santé. Ce n’est pas un problème de risque, mais une question de taux d’usure qui a été fixé de façon arbitraire. Ce qui fait que les acheteurs potentiels s’autocensurent.

Mon Podcast Immo : De fait, votre métier devient compliqué au quotidien…

Sylvain Lefèvre : Oui, cela devient très compliqué dans un calcul de taux d’usure. La bonne nouvelle, si on compare janvier 2023 à janvier 2022, ce sont les stocks de dossiers de crédit non signés, qui ont été ramenés de 6 à 2 mois et qui vont aboutir. Est-ce qu’il faut, comme en 2021, battre le record de transactions ou en faut-il moins ? Peut-être que la volonté du gouvernement d’interrompre cette spirale pour éviter une bulle immobilière avait du sens. Mais il ne faut pas aller trop loin et casser l’ensemble de la chaîne.

Mon Podcast Immo : Quels sont les profils des dossiers qui sont acceptés ?

Sylvain Lefèvre : La première bonne nouvelle c’est qu’il y a toujours de la demande. La deuxième c’est que l’OAT commence à se détendre avec une baisse des taux d’emprunt longue durée (2,8 % sur 25 ans) et qu’avec l’assurance, le taux d’usure de 3,57 % n’est pas dépassé. Il faut rappeler que globalement il faut compter de 0,7 à 0,8 % entre le taux nominal auquel les banques prêtent et le TEG.

Mon Podcast Immo : Comment les banques réagissent-elles face aux nouvelles donnes comme le DPE et la flambée du coût de l’énergie ?

Sylvain Lefèvre : Nous avons un devoir de responsabilité vis-à-vis des candidats emprunteurs. Pour la résidence principale, le DPE n’est qu’informatif, mais on voit bien que les biens qui ont une forte décote sont ceux qui ont des mauvaises performances énergétiques. Aussi, nous mettons les ménages en garde sur le risque de biens moins fongibles à la revente dans quelques années s’ils n’ont pas les moyens de faire les travaux. Pour un ménage qui achète un bien à but locatif classé en F ou G, on va exiger un devis travaux et on verra si ça passe dans l’enveloppe financière. Enfin, concernant les acheteurs, – notamment les primo-accédants qui n’ont pas de gros moyens – qui veulent s’éloigner des grandes villes, nous mettons l’accent sur les frais d’essence auxquels ils devront faire face pour se déplacer.

Mon Podcast Immo : Quel conseil donneriez-vous à une personne qui n’entre pas dans les critères du taux d’usure ?

Sylvain Lefèvre : Des solutions commencent à émerger pour ce type de dossier comme la location-accession que nous expérimentons actuellement. Il existe aussi la SCI, les taux variables. Mais nous ne sommes pas pour des solutions par défaut pour compenser ce que le gouvernement n’a pas fait.

Par MySweetImmo
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