Entre bail commercial et bail professionnel, quel statut choisir ?

Lors de la mise en location d’un local, l’agent immobilier doit conseiller le propriétaire bailleur sur les régimes envisageables. Les juristes de Modelo font le point sur ce que vous devez savoir.

Homme se tenant le menton en train de lire un contrat de bail

© adobestock

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Lors de la mise en location d’un local, l’agent immobilier doit conseiller le propriétaire bailleur sur les régimes envisageables, avec leurs avantages et inconvénients, et même, parfois, sur la pratique dans le secteur géographique concerné !

Quelles sont les avantages et les inconvénients du bail professionnel et du bail commercial ?

Les premiers éléments à considérer pour faire le bon choix entre bail commercial et bail professionnel

L’activité du locataire 

L’activité du locataire (ou preneur) va déterminer le bail applicable : le bail professionnel est destiné aux activités non commerciales (comptables, médecins, architectes par exemple).

Le bail commercial s’adresse quant à lui aux activités commerciales, artisanales et industrielles (commerces, production par exemple).

La durée du bail 

Le bail professionnel est conclu pour une durée minimum de 6 ans.

Le bail commercial est conclu pour une durée minimum de 9 ans.

Les possibles dérogations

D’une part, les parties peuvent parfaitement convenir de se soumettre au régime des baux commerciaux alors qu’un bail exclusivement professionnel aurait été envisageable.

D’autre part, les parties à un bail commercial peuvent déroger aux dispositions légales en concluant un bail dit dérogatoire. La durée totale d’un bail dérogatoire ne peut pas être supérieure à 3 ans. Ce bail est soumis aux règles du Code civil.

A l’expiration du bail, les parties ne peuvent plus conclure un nouveau bail dérogatoire pour exploiter le même fonds dans les mêmes locaux et le preneur n’a pas droit au paiement d’une indemnité d’éviction.

Le bailleur doit cependant se montrer vigilant car s’il laisse le preneur dans les locaux, à l’expiration d’un délai d’un mois à compter de l’échéance du bail dérogatoire, un bail commercial sera formé.

Les nombreuses différences entre le bail professionnel et le bail commercial

La résiliation du bail

S’agissant du bail professionnel, le locataire peut, à tout moment, notifier au bailleur son intention de quitter les locaux en respectant un délai de préavis de 6 mois. La notification est effectuée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par acte d’huissier.

S’agissant du bail commercial, le preneur a la faculté de donner congé à l’expiration d’une période triennale, au moins six mois à l’avance, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par acte extrajudiciaire, à moins que le bail ne l’interdise, dans les cas prévus par la loi.

Le bailleur peut mettre fin au bail commercial :

– soit après chaque période triennale en notifiant le congé six mois à l’avance par acte de commissaire de justice au motif de construire, reconstruire ou surélever l’immeuble existant, de réaffecter le local d’habitation accessoire à cet usage, de transformer à usage principal d’habitation un immeuble existant par reconstruction, rénovation ou réhabilitation ou d’exécuter des travaux prescrits ou autorisés dans le cadre d’une opération de restauration immobilière et en cas de démolition de l’immeuble dans le cadre d’un projet de renouvellement urbain.

– soit à tout moment en cas de faute du locataire, en application d’une clause résolutoire ou en obtenant la résiliation du bail en justice.

Le droit au renouvellement du bail

Le locataire d’un bail professionnel ne bénéficie d’aucun droit de renouvellement du bail. Ainsi, le bailleur peut mettre fin au bail à l’expiration de sa durée, moyennant un préavis de 6 mois et sans avoir à justifier d’un motif ni à verser de contrepartie financière au locataire.

Le preneur d’un bail commercial bénéficie d’un droit au renouvellement. Le bailleur qui met fin au bail commercial est par principe redevable envers le preneur d’une compensation financière appelée indemnité d’éviction, d’un montant équivalent au préjudice causé par le défaut de renouvellement. L’indemnité d’éviction n’est pas due, cependant, en cas de motif graves et légitimes envers le locataire, ou encore lorsque le locataire ne peut pas justifier de 3 ans d’exploitation continue du fonds. Elle n’est pas due non plus s’il est établi que l’immeuble doit être totalement ou partiellement démoli comme étant en état d’insalubrité reconnue par l’autorité administrative ou s’il est établi qu’il ne peut plus être occupé sans danger en raison de son état.

La révision du loyer

Le régime du bail professionnel n’impose aucune règle particulière en matière de révision du loyer, il revient aux parties d’en décider. Les parties peuvent convenir d’une révision annuelle tout comme elles peuvent convenir qu’il n’y aura pas de révision de loyer. L’absence de révision est cependant par principe défavorable au bailleur.

Le loyer d’un bail commercial peut être révisé tous les 3 ans, qu’il y ait ou non dans le bail de clause le prévoyant. Toute clause contraire est réputée non écrite. A cette révision triennale (appelée révision légale), il peut être ajouté une clause d’indexation au libre choix des parties.

Les charges, impôts et travaux

Le régime du bail professionnel n’impose ni prise en charge spécifique ni répartition particulière des charges, taxes, impôts et travaux entre le bailleur et le locataire. Elle ne dépend que de la convention des parties.

A l’inverse, le bail commercial doit :

  • comporter un inventaire précis et limitatif des catégories de charges, impôts, taxes et redevances liés au bail,
  • indiquer leur répartition entre le bailleur et le locataire. Cet inventaire donne lieu à un état récapitulatif annuel adressé par le bailleur au locataire au plus tard le 30 septembre de l’année suivante. En cours de bail, le bailleur informe le locataire des charges, impôts, taxes et redevances nouveaux.

Lors de la conclusion du contrat de bail commercial, puis tous les trois ans, le bailleur doit communiquer au preneur :

  • Un état prévisionnel des travaux qu’il envisage de réaliser dans les trois années à suivre, assorti d’un budget prévisionnel ;
  • Un état récapitulatif des travaux qu’il a réalisés dans les trois années précédentes, précisant leur coût.

Attention, le bail commercial ne peut pas comporter de clause mettant les travaux de grosses réparations à la charge du preneur.

La cession ou la sous-location de bail

En l’absence de clause particulière au bail professionnel, le locataire peut librement céder son bail ou sous-louer les locaux. Les parties ont ainsi intérêt à définir précisément les droits du locataire dans le bail.

En matière de bail commercial, toute sous-location totale ou partielle est interdite sauf si les parties décident d’y déroger expressément dans le bail. En revanche, le locataire peut librement céder son bail, sauf si une clause du bail le lui interdit (ce qui est habituel). Cependant, il n’est pas possible d’interdire au locataire de céder son bail à l’occasion d’une cession de son fonds de commerce. Le Code de commerce prohibe toute clause en ce sens.

Droit de préemption du locataire

Contrairement au locataire du bail professionnel, le preneur d’un bail commercial bénéficie d’un droit de préemption sur le local en cas de vente des murs par le propriétaire. Ce droit de préemption est cependant écarté dans différentes hypothèses : en cas de cession unique de plusieurs locaux d’un ensemble commercial, de cession unique de locaux commerciaux distincts ou de cession d’un local commercial au copropriétaire d’un ensemble commercial. Il n’est pas non plus applicable à la cession globale d’un immeuble comprenant des locaux commerciaux ou à la cession d’un local au conjoint du bailleur, ou à un ascendant ou un descendant du bailleur ou de son conjoint. 

Bail commercial ou bail professionnel ? Ce qu’il faut retenir

Ces deux régimes de baux sont très différents, le bail commercial présente plus de stabilité pour le bailleur et ouvre plus de de droits au locataire alors que le bail professionnel est plus souple pour le locataire et plus précaire pour le bailleur. C’est pourquoi dans certains secteurs géographiques, comme Paris et les grandes agglomérations, il est d’usage de signer un bail commercial.

Par Les juristes de Modelo