Immobilier : Vers une croissance timide du la production de logements abordables

L’institut Xerfi vient de publier une étude sur le marché des logements intermédiaires et abordables à horizon 2024. Son auteur, Vincent Desruelles présente les principaux enseignements

Immeuble neuf avec balcons pour illustrer le logement intermédiaire

© adobestock

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La demande pour des logements abordables en France est forte, mais la production de logements intermédiaires devrait croître faiblement d’ici 2024. Les coûts de construction élevés et les difficultés d’accès à la ressource foncière sont des obstacles majeurs à surmonter pour ce marché selon l’étude Xerfi sur « Le marché des logements intermédiaires et abordables à horizon 2024 -inflation, remontée des taux, décarbonation, nouveaux dispositifs : quelles perspectives pour les acteurs ?« . Trois questions à son auteur Vincent Desruelles.

Quelles sont vos prévisions pour la production de logements abordables en France ?

Vincent Desruelles : La demande pour des logements abordables en location ou en accession est élevée du fait d’une déconnexion entre les revenus des Français et les prix de l’immobilier dans les grandes métropoles. En dépit des besoins, l’offre de logements abordables progressera pourtant faiblement. La production de ce type de logements a en effet reculé l’an dernier pour la première fois depuis la mise en place d’un régime spécifique pour le logement intermédiaire en 2014. La faute à la hausse des coûts et au recul de l’activité des promoteurs qui insèrent des logements abordables dans les programmes.

La situation va cependant s’améliorer d’ici 2024. Les promoteurs y voient en effet un relais de croissance bienvenu. Les ambitions de CDC Habitat et In’li dans ce domaine soutiendront également la filière. Les pouvoirs publics, soutenus par des investisseurs institutionnels, ont en outre créé un cadre propice à ce marché. N’oublions pas non plus l’intérêt des investisseurs institutionnels pour cette classe d’actifs et la récente montée en puissance de nouvelles foncières (comme par exemple Cronos).

Mais les difficultés seront également au rendez-vous. D’une part, l’accès à la ressource foncière dans de nombreuses zones tendues se durcit, sur fond de fortes réticences à la densification. D’autre part, les coûts de construction s’envolent et les charges financières s’alourdissent pour les porteurs de projets. À plus long terme, ils devront composer avec les objectifs de non-artificialisation des sols et de décarbonation du bâtiment, source d’inflation.

Dans ce contexte, la production de logements locatifs intermédiaires devrait atteindre 19 000 unités en 2024. La taille du parc de logements intermédiaires institutionnels sera de 124 000 unités fin 2024, d’après nos calculs, tandis que le parc de logements dédiés à location sur le marché libre s’élevait à 7,6 millions d’unités fin 2021. 

Le dispositif du bail réel et solidaire a t-il trouvé sa pertinence ?

Vincent Desruelles : Le succès des premières vagues de commercialisation a levé les éventuels doutes concernant la pertinence du bail réel et solidaire (BRS), dédié à l’accession à la propriété de la partie bâtie (le foncier restant entre les mains d’un OFS ou organisme foncier solidaire) et permettant de réduire considérablement le coût d’acquisition.

De nombreuses collectivités, bailleurs sociaux et coopératives HLM mais aussi promoteurs immobiliers se sont peu à peu positionnés sur ce dispositif, participant à son récent essor. Le boom des programmes BRS va se matérialiser par une forte augmentation des livraisons en 2023 et 2024 et par le lancement de nouveaux programmes.

Le BRS s’impose en effet comme un relais de croissance nécessaire pour les promoteurs, confrontés à une baisse de leurs ventes. L’intérêt des communes carencées en logements sociaux pour ce dispositif repose sur le fait que les BRS sont comptabilisés depuis 2018 dans l’inventaire SRU (solidarité et renouvellement urbains).

La filière profitera également à court et moyen termes du transfert du droit de préemption par les collectivités territoriales auprès de certains OFS. Dans ces conditions, nous anticipons un bond des livraisons de logements en BRS avec un parc de plus de 11 000 unités fin 2024 (contre environ 600 en 2022).

Comment les opérateurs surmontent-ils les difficultés de financement ?

Vincent Desruelles : Le modèle économique des acteurs repose principalement sur les loyers perçus issus de leur parc de logements et, de façon plus marginale, sur les revenus liés à l’accession à la propriété.

La majorité des nouveaux logements réalisés résulte d’acquisitions de programmes en VEFA neufs en bloc réalisées auprès de promoteurs. Malgré les aides publiques (TVA réduite, prêts aidés, crédit d’impôt), le financement des logements intermédiaires constitue l’un des principaux défis à surmonter pour les bailleurs sociaux et institutionnels.

Dans ce contexte, ils diversifient leurs sources de financement. Outre les dispositifs traditionnels (autofinancement via la vente d’une partie du parc, prêt bancaire, émissions d’obligations…), ils misent également sur les investisseurs traditionnels en structurant, à travers le lancement de fonds et de foncières, une offre susceptible de les attirer.

Une tendance qui consacre la financiarisation progressive du logement intermédiaire mais que l’inflation vient bousculer car les investisseurs attendent désormais des rendements plus élevés.

Par MySweetImmo
Cet article reprend les enseignements de l’étude Xerfi: « Le marché des logements intermédiaires et abordables à l’horizon 2024 – Inflation, remontée des taux, décarbonation, nouveaux dispositifs : quelles perspectives pour les acteurs ? »
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