Immobilier : Le nouveau phénomène des vrais-faux acquéreurs-vendeurs

Les vrais-faux acquéreurs revendeurs : une tendance que bon nombre de professionnels de l’immobilier doivent côtoyer au quotidien et qui grippe le marché. Décryptage.

Jeune femme se posant des questions

© adobestock

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Alors que l’augmentation des taux de crédit semble toucher à sa fin, le fantasme du grand krach immobilier est encore loin ! La baisse des prix est amorcée mais non abyssale comme certains l’espèrent. Pour rattraper la hausse des taux et la perte de pouvoir d’achat, il faudrait envisager une baisse des prix de 15 à 20%. C’est impossible à court terme. Pas de krach, donc, mais un marché grippé par des acheteurs et des (re)vendeurs qui campent sur leurs positions. Et parfois sur les deux positions opposées en même temps alors qu’ils sont la même personne.

Comprenez, près de 7 vendeurs sur 10 sont aussi des acquéreurs. La psychologie des acquéreurs-(re)vendeurs, souvent mésestimée, éclaire pourtant sur un phénomène loin d’être anecdotique. Plus qu’une tendance nous parlerons ici d’une réalité que bon nombre d’autres professionnels du marché doivent côtoyer au quotidien : les vrais-faux acquéreurs revendeurs. Rencontre avec Patrice Amate, Président depuis plus de 25 ans, de la société immobilière de Trets (13), une agence immobilière spécialisée dans la transaction et la gestion locative entre Aix-en-Provence et Marseille.

Des acquéreurs-(re)vendeurs à la vision dédoublée

Dans un marché qui se durcit, dans lequel chaque euro compte pour engager une demande de crédit et faire aboutir une acquisition, il remarque qu’une recherche sur deux relève d’un projet d’acquisition via la vente d’un bien. Jusque-là, rien d’anormal dans un marché de résidence principale et c’est d’ailleurs pour cela que l’on pouvait avoir recours à un prêt relais. Sauf qu’actuellement, il est devenu quasiment impossible d’en obtenir un.

Ce qui change drastiquement la donne !

Les acquéreurs-vendeurs qu’il rencontre ont, depuis quelques temps, un profil atypique : « Ce sont donc les mêmes qui engagent des recherches au-dessus de leurs budgets anticipant des négociations irrationnelles dans leur achat, tout en majorant le prix de leur bien, sans pour autant l’avoir mis en vente ni même l’avoir fait estimer, en n’anticipant pas la moindre négociation les concernant ni les délais de ventes en fortes augmentations étant tous persuadés de le vendre rapidement », précise Patrice Amate.

Un grand écart surprenant, mais bien réel qui n’a pour effet que de gripper encore davantage le marché

« Les acquéreurs nous sollicitent pour des visites comme pour aller au musée, sans aucun préalable à la réalisation de la transaction. Aujourd’hui, je suis contraint de refuser des visites pour ne pas faire subir aux vendeurs ce phénomène de promeneurs », poursuit Patrice Amate.

Un marché grippé avec un profil d’acquéreurs dégradé

Car cette attitude, si elle peut déplaire, a surtout pour impact de gripper le marché, rendant irréaliste toute offre d’achat. Ces clients sollicitent des visites, sans pour autant connaître leur budget, ni leur timing. S’ils s’engagent dans la prospection active, ils n’ont pas fait estimer leur bien à vendre, ni pris en compte la baisse des prix. En revanche, pour leur acquisition, ils ont déjà intégré la négociation avant la visite. Une attitude, qui montre l’ampleur du manque de pédagogie à ce sujet, et qui grippe davantage encore le marché.

« J’ai reçu un client qui souhaitait visiter une maison à 700 000 € dans le cadre d’une acquisition en partie financée par la vente de son actuelle maison. Il n’avait cependant pas mis en vente sa maison, ni réalisé d’estimation. Il évaluait son bien à 450 000 €, c’est à dire au prix du marché d’il y a un an, lui autorisant une enveloppe maximum de 650 000€. De là, on constate qu’il envisage d’emblée une négociation d’au moins 50 000€ pour son achat, mais qu’il majore le prix de sa maison à vendre. La possibilité d’une transaction n’est donc pas crédible, et ce genre de visites, quotidiennes, fait perdre du temps à tous les acteurs, propriétaires, acquéreurs et professionnels de l’immobilier», raconte Patrice Amate.

Bien vendre aujourd’hui : l’indispensable « profilage » des professionnels de l’immobilier

Face à ces comportements majoritaires depuis des mois, la phase de découverte du profil de l’acquéreur devient primordiale : c’est elle qui permet de juger du sérieux du client et de la crédibilité de l’acquisition. D’autant plus que le profil des vendeurs d’urgence (succession, divorce, …) est aujourd’hui surreprésenté, les vendeurs moins pressés restant dans une attitude attentiste.

Expliquer, considérer la réalité et sélectionner des visites qualitatives est le rôle de l’agent immobilier, garant de la bonne réalisation d’une transaction. Car mal calibrer une proposition d’achat, dans un contexte où les délais de vente s’allongent, peut avoir des impacts considérables, à la fois financiers et familiaux, pour les vendeurs.

Par MySweetImmo