Immobilier : Le plongeon dans l’abîme du logement neuf s’accélère
L’effondrement du logement neuf se poursuit avec la chute des mises en chantier en 2023, « sans espoir d’amélioration » compte tenu du plongeon des ventes, a déploré mardi la Fédération française du bâtiment (FFB), qui dénonce une « faillite politique ».
Une politique du logement à la petite semaine
« 80.000 logements en moins entre 2022 et 2023, c’est des milliards d’euros de chiffre d’affaires en moins (…). L’État, en TVA, a perdu 1,7 milliard d’euros et c’est aussi 13.300 emplois en moins« , a déclaré son président Olivier Salleron.
Le nombre estimé des mises en chantier a chuté de 24,6% sur 12 mois et celui des permis de construire de 23,4% sur la même période, selon les derniers chiffres publiés par le ministère de la Transition écologique.
Or, l’évolution des ventes de logements ne permet aucun espoir d’amélioration à court ou moyen terme : elles abandonnent 24 % en 2023 côté promotion immobilière -et même 38 % hors ventes en bloc- ; elles s’effondrent de 41 % en glissement annuel sur douze mois à fin janvier 2024 côté construction de maisons individuelles.
Les ventes aux particuliers quasiment divisées par deux
« On ne sait pas où ça va s’arrêter« , a commenté le patron de la FFB, pointant une « politique du logement sans aucune planification, à la petite semaine, qui entraîne le bâtiment dans la récession« .
« Tableau catastrophique« , a déploré Olivier Salleron, « les ventes aux particuliers sont quasiment divisées par deux par rapport aux 16 dernières années et ce sur tous les segments, le logement individuel ou collectif« .
La FFB confirme sa prévision d’un véritable crash en 2024, à environ 250 000 logements commencés, soit un ratio de 8 mises en chantier pour 1 000 ménages en France… comme au tout début des années 1950 !
La construction de bâtiments non-résidentiels neufs (hôtels, commerces, bureaux, administratif) est également au plus bas.
Seule l’amélioration-entretien, portée notamment par la rénovation énergétique, tire son épingle du jeu, même si un ralentissement est apparu fin 2023. Alors que le financement de l’approche par geste(s) se trouve très nettement réduit au profit de la rénovation globale, cette dernière butte sur un volume bien trop faible de Mon Accompagnateur Rénov, point de passage impératif.
Saluant la décision du gouvernement de reporter à 2025 le recentrage du dispositif MaPrimeRénov’ sur les rénovations lourdes, Olivier Salleron a estimé que « sa complexité avait entraîné une baisse de 75% de sa production en janvier et février 2024« , par rapport à l’an dernier.
La FFB prévoit 150 000 emplois détruits mi-2025
Le rapide recul d’activité, amorcé dès la fin d’année dernière, se traduit en accélération des défaillances. Dans le bâtiment, la hausse ressort à plus 40 % en glissement annuel sur trois mois à fin janvier 2024. De plus, ce mouvement concerne le gros-œuvre comme le second œuvre d’une part, toutes les tailles d’entreprises d’autre part.
Côté emploi, la FFB maintient sa prévision de 90.000 emplois détruits fin 2024 puis 150.000 mi-2025.
« Même nos artisans qui faisaient quelques maisons individuelles par an ne les font plus« , a alerté M. Salleron. « Les entrepreneurs du bâtiment ont une colère rentrée, vexatoire (…) qui peut être explosive. Déjà quelques uns de la Fédération ont fait des actions de rue« , a-t-il souligné.
Seules bonnes nouvelles : les coûts des matériaux et de l’énergie « se stabilisent » et les délais de paiement des clients « semblent se réduire » après la brusque envolée de l’été 2023 qui pesait sur les trésoreries.
La crise du bâtiment ampute la croissance
Parmi les mesures réclamées, la FFB souhaite le rétablissement du prêt à taux zéro (PTZ) en vigueur en 2023, un assouplissement des règles du crédit, le remplacement du dispositif d’investissement locatif Pinel voué à disparaître fin 2024, ainsi que le report de 2025 à 2028 du calendrier d’application de la réglementation environnementale RE2020.
Ces mesures s’avèrent d’autant plus indispensables que la crise du bâtiment pénalise d’ores et déjà lourdement l’économie française. De fait, selon les Comptes de la Nation de l’Insee, si les dépenses d’investissement en construction des ménages et des entreprises s’étaient simplement maintenues à niveau en 2023, le PIB eut progressé de 1,3 % et non de 0,9 %. En d’autres termes, la crise du bâtiment a amputé de près du tiers la croissance du pays. Et cela se poursuit en 2024.