Immobilier : Vendre un logement énergivore pour éviter les travaux de rénovation
À l’approche de l’interdiction de louer les logements les plus énergivores, nombreux sont les propriétaires à revendre plutôt qu’à rénover leur passoire thermique. Décryptage.
A l’approche de l’interdiction de louer les logements les plus énergivores, nombre de propriétaires bailleurs ont préféré revendre leurs biens plutôt que de se lancer dans des travaux de rénovation, coûteux et techniques.
Passoires thermiques, une part croissante des ventes
Au troisième trimestre de 2024, 13% des ventes de logements anciens étaient des habitations énergivores, classées F ou G au diagnostic de performance énergétique, rapportent les Notaires de France dans leur bilan annuel.
En 2022, « une forte hausse annuelle » des ventes de passoires énergétiques avait suivi la parution mi-2021 d’un décret sur l’interdiction progressive de louer les logements énergivores, et la part des étiquettes F ou G avait atteint 16% des transactions, puis 17% en 2023, selon les notaires.
Des propriétaires âgés face aux travaux
Depuis trois décennies, l’Etat incite à investir dans des biens immobiliers à louer via divers dispositifs fiscaux, mais les bénéficiaires de ces mesures « ne sont pas des riches » et n’ont pas tous les moyens de financer des travaux, selon Zahir Keeno, président de Foncia Administrateur de biens, leader de la gestion locative en France.
Les propriétaires âgés en première ligne
Un quart des ménages concentrent cependant deux tiers des logements possédés par des particuliers en France selon les données de 2021 de l’Insee. Et parmi les 10% des Français les plus riches, 51% déclarent des revenus locatifs au Trésor public.
Une part importante de bailleurs sont âgés : « 23% des propriétaires de logements classés F ou G ont plus de 80 ans« , estime Loïc Cantin, président de la Fédération nationale de l’immobilier (Fnaim), qui prévient que ceux-ci « ne vont pas s’engager dans des grands travaux de rénovation ».
Une tendance au rachat de biens plus performants
Les personnes de plus de 60 ans sont sur-représentées parmi les ventes de logements anciens énergivores et parmi les acquéreurs de logements classés A et B, les moins énergivores, selon le Conseil supérieur du notariat (CSN), qui fait le lien entre vente d’une passoire énergétique pour ne pas réaliser des travaux et rachat d’un logement plus performant énergétiquement avec l’argent de la précédente cession.
Travaux de rénovation, un coût souvent dissuasif
Pour des travaux de rénovation d’ampleur, le reste à charge pour le propriétaire, après déduction des subventions de l’Etat, est en moyenne de 20.000 euros. « Vous avez intérêt à avoir un sacré rendement locatif » pour amortir ce coût, raille Elodie Frémont, notaire à Paris, rappelant que dans plusieurs grandes villes, les loyers sont encadrés.
Des biens énergivores à prix réduit
Selon un sondage du groupe bancaire BPCE, 31% des 2.050 personnes interrogées envisagent des travaux de rénovation énergétique d’ici 5 ans, et parmi elles, seules 6% sont des propriétaires de biens à louer.
D’après la même étude, l’étiquette énergétique F ou G est un motif de cession pour 43% de ceux qui ont pour projet de vendre leur logement.
Sur le marché, les logements classés F ou G connaissent une décote : -15% en moyenne pour un appartement dans le Grand Est et -25% pour une maison en Nouvelle Aquitaine par exemple.
« Le contexte de baisse du nombre de transactions et de contraction des prix va renforcer l’importance de l’étiquette DPE, qui a un impact toujours plus important sur le prix du bien« , a souligné Frédéric Violeau, chargé des statistiques immobilières nationales pour le CSN.