Immobilier : L’encadrement de la mise en location à usage d’habitation

Déclaration de mise en location, permis de louer, autorisation de créer de nouveaux logements… Dorothée de Saintloup, juriste chez Modelo fait le point sur toutes les obligations qui incombent aux propriétaires, aux agents immobiliers ou encore aux administrateurs de biens lors de la mise en location d’un bien à usage d’habitation.

Salon d'un appartement vide

© adobestock

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Les logements loués à usage d’habitation sont soumis au régime de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989. Aux termes de cette règlementation, seuls les logements décents peuvent être loués. C’est-à-dire les logements qui ne laissent apparaître aucun risque manifeste pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé du locataire, exempt de toute infestation d’espèces nuisibles et parasites, répondant à un critère de performance énergétique minimale (…) et doté des éléments le rendant conforme à l’usage d’habitation.

Dans le cadre de la lutte contre l’habitat indigne, d’autres règles ont été établies par les lois ALUR et ELAN afin que les bailleurs remplissent leur obligation d’assurer la sécurité et la santé des locataires.

Les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) en matière d’habitat ou en matière d’urbanisme ainsi que les communes peuvent imposer aux propriétaires de déclarer une mise en location, de demander une autorisation préalable de mise en location (appelée permis de louer) et de demander une autorisation de créer de nouveaux logements sur une construction existante (appelée permis de diviser).

Existe-t-il une liste des communes concernées ?

Il n’est établi ni zone géographique sur le territoire national ni liste des communes ayant instauré de telles règles. Chaque EPCI ou commune est libre de déterminer les zones géographiques de son territoire qui seront soumises à ces déclarations ou autorisations. Pour la déclaration de mise en location, il peut également définir les catégories et les caractéristiques des logements concernés dans les zones géographiques délimitées.

Pour savoir si un bien à louer est concerné par une des mesures de déclaration ou d’autorisation préalable précitée, il convient de se rapprocher de la commune dans laquelle se situe le bien.

Les professionnels de l’immobilier, comme les propriétaires, sont concernés par l’obligation de déclaration ou d’autorisation préalable de mise en location au titre de leur activité de gestion et de location.

Dans le cadre de son devoir de conseil, il est aussi pertinent pour un agent immobilier de porter à la connaissance de l’acquéreur d’un bien à usage d’habitation, qui veut faire un investissement locatif, que la mise en location sera soumise ou non à une obligation de déclaration ou de demande d’autorisation préalable. Il est utile de reporter l’information aux termes de la promesse de vente.

Quand doivent être établies les démarches de déclaration et de demande d’autorisation ?

Déclarer une mise en location, demander une autorisation préalable de location et demander l’autorisation de créer de nouveaux logements sur une construction existante sont trois procédures différentes et indépendantes.

L’obligation de déclaration de mise en location et l’obligation de demander l’autorisation préalable de mise en location ne s’appliquent qu’aux baux nus ou meublés à usage d’habitation et de résidence principale du locataire. Les logements sociaux et conventionnés ne sont pas concernés par ces deux procédures. A chaque nouvelle mise en location, la déclaration de mise en location et la demande d’autorisation préalable doivent être renouvelées. Les reconductions et les renouvellements de contrats existants ou les avenants ne sont pas concernés.

L’obligation de déclaration de mise en location et l’autorisation préalable de mise en location ne peuvent pas être votées sur une même zone.

La demande d’autorisation de créer de nouveaux logements dans un bâtiment existant peut être votée dans des zones qui ne sont pas soumises à l’obligation de déclarer une mise en location ou à en demander l’autorisation préalable. Mais il est possible, par exemple, qu’un même bien à louer soit soumis au permis de diviser et au permis de louer. Nous rappelons que la création de nouveaux logements dans un bâtiment existant peut aussi entraîner l’obligation de créer des places de stationnement !

La déclaration de mise en location : une formalité postérieure à la mise en location

Elle doit être déposée dans un délai de 15 jours à compter de la signature du contrat de location auprès des services de l’autorité compétente (EPCI ou mairie).

A défaut de remplir cette obligation, le propriétaire encourt une amende d’un montant maximum de 5 000€.

La demande d’autorisation préalable de mise en location : une formalité à réaliser en amont de la mise en location.

La demande doit être déposée auprès de l’autorité compétente. La décision relative à l’autorisation de mise en location est notifiée dans un délai d’un mois à compter de la date de dépôt de la demande. Le silence gardé par l’autorité compétente vaut autorisation préalable de mise en location. L’autorisation doit être jointe au bail d’habitation. Elle peut même être transférée en cas de mutation à titre gratuit (donation, succession) et à titre onéreux (vente) tant qu’elle est en cours de validité. Le transfert doit alors être déclaré.

Ainsi un propriétaire qui vend un bien loué pour lequel il a obtenu une autorisation préalable de louer peut transmettre cette autorisation à un acquéreur. Ce dernier n’aura pas besoin de faire une nouvelle demande à son nom. Il en est de même pour un propriétaire qui vend un bien pour lequel il a obtenu une autorisation depuis moins de 2 ans, et qui n’est pas encore loué : l’acquéreur n’aura pas besoin de déposer une nouvelle demande d’autorisation préalable de mise en location.

A défaut de faire la demande, le propriétaire encourt une amende d’un montant de 5 000€ pouvant être portée à 15 000€ en cas de nouveau manquement dans un délai de 3 ans.

Si l’autorisation est refusée, le refus doit être motivé. Il doit préciser la nature des travaux ou aménagements à réaliser pour répondre aux obligations de sécurité et de salubrité. Le propriétaire qui passe outre le refus et loue le bien encourt une amende d’un montant maximum de 15 000 €.

La demande de création de nouveaux logements sur une construction existante : une formalité préalable à la mise en location

La demande doit être déposée auprès de l’autorité compétente. La réponse à la demande d’autorisation préalable de travaux conduisant à la création de plusieurs locaux à usage d’habitation dans un immeuble existant est notifiée dans les 15 jours de la réception de la demande. Le défaut de réponse dans ce délai vaut autorisation.

Lorsque des opérations de division conduisant à la création de locaux à usage d’habitation au sein d’un immeuble existant sont réalisées en l’absence de l’autorisation préalable, le propriétaire peut devoir payer une amende au plus égale à 15 000 €. En cas de nouveau manquement dans un délai de trois ans, le montant maximal de cette amende est porté à 25 000 €.

Rappel utile sur la location de logement

Ne peut être loué à usage d’habitation toute création de logement superficie et d’un volume habitables inférieurs respectivement à 14 m2 et à 33 m3. Les installations ou pièces communes mises à disposition des locaux à usage d’habitation nés de la division n’étant pas comprises dans le calcul de la superficie et du volume de ces locaux.

Toute création de nouveaux logements doit être pourvue d’une installation d’alimentation en eau potable, d’une installation d’évacuation des eaux usées ou d’un accès à la fourniture de courant électrique, ou doit faire l’objet d’un constat de risque d’exposition au plomb et d’une recherche de la présence d’amiante, ainsi que, le cas échéant, du diagnostic de l’état de conservation de l’amiante dans les matériaux et produits repérés.

Les sanctions encourues si la demande préalable de création de nouveaux logement n’est pas effectuée

Les personnes physiques qui mettent en location des locaux destinés à l’habitation et provenant d’une division réalisée en méconnaissance des interdictions définies ci-dessus encourent :

1/ un emprisonnement de 2 ans et une amende de 75 000 €.

2/ une peine complémentaire d’interdiction, pour une durée de 5 ans au plus, d’exercer une activité professionnelle ou sociale dès lors que les facilités que procure cette activité ont été sciemment utilisées pour préparer ou commettre l’infraction. Cette interdiction n’est toutefois pas applicable à l’exercice d’un mandat électif ou de responsabilités syndicales.

Les personnes morales encourent :

1/ une amende d’un montant égal au quintuple de celui prévu pour les personnes physiques ;

2/ les peines complémentaires suivantes :

  • l’interdiction, à titre définitif ou pour une durée de 5 ans au plus, d’exercer directement ou indirectement une ou plusieurs activités professionnelles ou sociales .
  • la fermeture définitive ou pour une durée de 5 ans au plus des établissements ou de l’un ou de plusieurs des établissements de l’entreprise ayant servi à commettre les faits incriminés ;
  • la confiscation du fonds de commerce ou de l’immeuble destiné à l’hébergement des personnes et ayant servi à commettre l’infraction ;
  • l’affichage de la décision prononcée ou la diffusion de celle-ci soit par la presse écrite, soit par tout moyen de communication au public par voie électronique

Ce qu’il faut retenir

Louer un bien à usage d’habitation impose aux propriétaires, et aux professionnels de l’immobilier, d’observer et de respecter les règles visant à lutter contre l’habitat indigne, à assurer la sécurité ainsi que la santé des locataires.

A défaut, le non-respect des règles ne reste pas sans conséquences financières, pénales et administratives.

Toutefois, il est à noter que le défaut de chacune de ces formalités est sans effet sur le bail d’habitation dont bénéficie le locataire qui occupe de bonne foi un local à usage d’habitation.

Cependant, cela ne pourra pas empêcher le locataire d’agir contre le propriétaire, comme contre le professionnel de l’immobilier, pour avoir loué un logement qui ne répond pas aux critères de décence.

Par Dorothee de Saintloup, juriste, Modelo