Immobilier : « La crise de la transaction fera des victimes chez les indépendants »

Quelles stratégies d’adaptation face à la crise de l’immobilier ? Xerfi vient de publier une étude consacrée au marché de la transaction immobilière dans un contexte de crise de l’immobilier. Trois questions à son auteur, Vincent Desruelles, directeur des études.

Portrait de Vincent Desruelle, directeur des études Xerfi

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Xerfi vient de publier une étude consacrée au marché de la transaction immobilière dans un contexte de crise de l’immobilier. Trois questions à son auteur, Vincent Desruelles, directeur des des études.

La crise du marché de la transaction immobilière peut-elle se résorber rapidement ?

Vincent Desruelles : Engagé au deuxième semestre 2022, le retournement du marché de l’immobilier de logements s’est accentué en 2023. Le volume de transactions va chuter de près de 17% pour tomber autour de 930 000 ventes.

Les difficultés d’accès au crédit, liées à la poursuite de la hausse des taux d’intérêt et à la frilosité des banques, représentent le principal obstacle à la réalisation des projets.

Et le marché restera mal orienté en 2024 avec une baisse d’au moins 3% des transactions. Les volumes toucheront un plancher inédit depuis 2016.

Enclenchée depuis le premier trimestre 2022, la baisse des prix dans l’ancien se traduira par un repli continu au moins jusqu’en 2024 (-2,5% à l’échelle nationale).

Ce recul sera particulièrement marqué dans les villes où les prix avaient le plus fortement augmenté ces dernières années, notamment Paris et sa périphérie. Cette tendance fera suite à une légère progression de 0,4% en moyenne annuelle en 2023.

Les taux moyens (toutes maturités) devraient toucher, voire franchir, la barre des 4% à la fin de l’année. Mais dans un contexte d’ensemble plus stable sur différents fronts (taux, inflation, pouvoir d’achat…), les taux d’intérêt finiront par se stabiliser, voire redescendre.

Le regain de confiance des ménages et le relâchement des pressions sur le pouvoir d’achat se feront à dose homéopathique et ne permettront pas encore d’inverser la tendance. Dans ce scénario, le retournement de la courbe n’interviendra pas avant 2025.

Dans le neuf, la spirale négative est encore plus marquée. Le cocktail durcissement des conditions de financement/hausse des prix/raréfaction de l’offre conduira à la chute des ventes de détail des promoteurs de plus de 23% en 2023.

Les réservations de logements neufs resteront à bas niveau en 2024. Et le premier train de mesures annoncé par le gouvernement ne créera pas de choc, ni côté demande, ni côté offre. La moindre attractivité du dispositif Pinel sera aussi un frein.

Dans ces conditions, le chiffre d’affaires des agences immobilières du panel Xerfi se repliera de 8% en 2023.

Les réseaux de mandataires traverseront, eux aussi, une période difficile avec des revenus qui vont stagner puis reculer en 2024.

Autrement dit, la profession ne pourra pas résister au retournement des marchés immobiliers et n’attirera plus autant de nouveaux agents.

Face à ce retournement, quels seront les gagnants et les perdants des métiers de l’intermédiation immobilière ?

Vincent Desruelles : Environ un tiers des transactions est réalisé aujourd’hui directement entre particuliers.

À l’horizon 2030, les canaux de vente gagnants sur les marchés immobiliers seront le PAP et les mandataires, avec respectivement des parts de marché de 34% et 20%.

Pour le premier, l’avantage évident de réaliser la transaction sans intermédiaire constituera un moteur, alimenté par une série de services et options à destination des vendeurs « solos » (coaching immobilier, diffusion gratuite des annonces à grande échelle, impact générationnel…).

Les mandataires bénéficieront, eux, de leur capacité à attirer de nouveaux professionnels au sein des réseaux.

Dans ce tableau, les agences traditionnelles apparaissent encore comme les principales perdantes. Leur part de marché va encore reculer pour atteindre environ 41% d’ici 2030.

Toutefois, les grands réseaux dotés d’une puissance marketing supérieure aux indépendants devraient mieux résister. La place des néo-agences devrait, elle, rester marginale (autour de 20 000 transactions par an) et celle des notaires se stabiliser.

Quelles stratégies adopter pour traverser la crise au mieux ? 

Vincent Desruelles : La dégradation du marché intervient alors que deux événements sont venus encore assombrir les conditions de marché des professionnels de l’intermédiation immobilière en juin dernier.

Un avis de l’Autorité de la concurrence sur l’entremise immobilière a ainsi souligné le niveau a priori plus élevé des honoraires (5,78% TTC) en France que dans les autres pays de l’Union européenne.

L’autre coup dur est venu de l’ouverture de Seloger aux annonces des particuliers. Une évolution qui est une rupture majeure pour le portail qui avait toujours revendiqué l’accompagnement exclusif des professionnels.

Dans ce contexte, les intermédiaires de l’immobilier redoublent d’efforts pour traverser la crise.

L’accroissement de la taille et le renforcement de la part de marché via des opérations de croissance externe sont un levier souvent actionné ces derniers mois, à l’instar du holding Arche qui a mis la main sur Nestenn après avoir racheté Century 21, Guy Hoquet et Laforêt.

La diversification des sources de revenus est aussi une voie empruntée par plusieurs opérateurs pour réduire leur dépendance aux transactions.

Pour les agences immobilières, cela signifie étoffer ses activités d’administration de biens, gestion locative et syndic.

Le recours généralisé aux négociateurs indépendants devrait en parallèle s’accroître pour flexibiliser les charges, en particulier dans les agences traditionnelles. 

Par MySweetImmo
Pour vous procurer l’intégralité de l’étude « Le marché de la transaction immobilière – Quelles stratégies d’adaptation face à la crise de l’immobilier ? Quels axes de développement face à la mutation de la demande ? », rendez-vous sur le site de Xerfi.