Rénovation énergétique : 60% des copropriétaires n’envisagent pas de réaliser des travaux

Les rénovations énergétiques en copropriétés sont jugées coûteuses par les copropriétaires qui font face à des contraintes juridiques complexes et à un important reste à charge.

DPE

© adobestock

 0

La massification des travaux de rénovation énergétique en copropriétés n’a pas encore eu lieu… Lors de la précédente enquête réalisée par Hellio, acteur de l’efficacité énergétique, auprès des copropriétés en octobre 2021, 53 % des répondants fermaient la porte à la réalisation d’une rénovation énergétique, ils sont aujourd’hui 60 % à ne pas l’envisager, un chiffre en hausse de 7 %.

Un peu plus d’un an après sa première enquête, Hellio a souhaité reprendre la température au sein des copropriétés sur leur perception des travaux de rénovation énergétique et leur connaissance des aides. Cette nouvelle enquête, réalisée en ligne entre le 16 et 31 janvier 2023 à laquelle 376 copropriétaires, membres et responsables de conseils syndicaux répartis sur toute la France ont répondu, laisse apparaître que le chemin à parcourir reste encore long !

Les obligations réglementaires et interdictions de location progressives dictées par la loi Climat et résilience, dont les premières sont entrées en vigueur depuis le 1er janvier 2023 pour les logements étiquetés G qui consomment plus de 450 kWh/m², ne semblent pas pour l’heure constituer un déclencheur suffisant. Cette loi cible particulièrement la gestion locative et les copropriétés. Deux univers en interconnexion car 60 % des logements dans les grandes villes sont la propriété d’investisseurs et sont donc occupés par des locataires.

Les enjeux qui pèsent sur les copropriétés : entre prise de conscience et méconnaissance

À la faveur de la loi Climat et résilience promulguée en août 2021, les obligations en matière de rénovation énergétique auxquelles doivent répondre les copropriétés – mettre en place un plan pluriannuel de travaux (PPT) et réaliser un diagnostic de performance (DPE) collectif – restent encore méconnues pour près d’1 répondant sur 2. Preuve que le travail de sensibilisation à faire est encore immense.

Signal encourageant en revanche, les copropriétaires sont désormais 62 % à connaître l’étiquette énergétique de leur logement, soit une augmentation de 12 % par rapport à octobre 2021. Ce savoir grandissant est sûrement lié aux interdictions de location à venir qui poussent les propriétaires bailleurs à s’y intéresser davantage. En effet, 75 % des copropriétaires sont informés de l’interdiction progressive à la location des logements étiquetés G, F et E.

Autre constat à souligner : l’étiquette énergétique devient de plus en plus un critère d’achat pour 32 % des répondants, la prise en compte de ce facteur a bondi de 18 % entre octobre 2021 et février 2023.

Des dépenses de copropriétés conséquentes

Outre les obligations réglementaires, les charges de copropriété trimestrielles pèsent lourd dans le budget des ménages : 56 % des répondants estiment dépenser trimestriellement entre 250 € et 500 € pour leurs charges de copropriété.

La majorité des répondants (58 %) considère que le poids de l’énergie représente jusqu’à 30 % des charges. Une proportion qui s’accentue de 9 % par rapport à 2021.

À noter que les propriétaires sont davantage attentifs au poids de l’énergie dans leurs charges, ils sont plus nombreux à savoir estimer cette part (+ 10 %). Mais ces données sont à relativiser selon Tanguy Dupont, directeur Habitat Collectif de Hellio“L’impact de la hausse des prix de l’énergie n’a atteint qu’une partie des copropriétés car beaucoup ont signé des contrats avec des tarifs négociés sur plusieurs années. Il devrait se faire sentir progressivement”.

Les dépenses de copropriétés sont placées au cœur des préoccupations des copropriétaires puisque la réduction de la consommation d’énergie, et donc la baisse des charges, est la principale motivation des répondants à la réalisation des travaux de rénovation énergétique.

Une démarche de rénovation énergétique encore timide

Seulement 37 % des répondants ont réalisé un audit énergétique de leur appartement ou de leur copropriété en vue de réaliser des travaux de rénovation énergétique pour 46 % d’entre eux. Il s’agit pourtant de la première étape indispensable pour rénover efficacement et bénéficier des aides financières les plus optimisées. Signal encourageant, 47 % souhaite en réaliser un à l’avenir, gage d’une volonté d’amélioration du parc collectif.

48 % des répondants seraient prêts à consacrer un budget entre 1 000 à 5 000 € pour des travaux de rénovation énergétique de leur copropriété dans les 5 prochaines années. Un budget insuffisant pour entreprendre une rénovation globale : “Le montant du reste à charge pour ce type d’opération se situe plutôt aux alentours de 10 000 €, qui correspond à la moyenne constatée sur 30 copropriétés accompagnées par Hellio en 2022, complété par un éco-PTZ copropriétés”, pointe Tanguy Dupont.

La part des répondants souhaitant investir plus de 10 000 € a baissé de 8 % entre octobre 2021 et janvier 2023 : “Le contexte inflationniste provoque de la crispation. Financer des travaux dans son logement reste pourtant le meilleur investissement !”, rappelle Tanguy Dupont.

Un faible engouement pour la rénovation énergétique

La majorité des répondants n’envisage pas la réalisation de travaux de rénovation énergétique pour leur copropriété (60 %). Cette proportion a augmenté de 7 %.

La mise en place du plan pluriannuel de travaux, obligatoire depuis le 1er janvier pour certaines copropriétés, et le DPE obligatoire retardent la prise de décision alors que des rénovations globales auraient pu être lancées. De plus, la hausse des coûts des travaux, de l’ordre de 10 à 15 %, décourage les copropriétaires”, analyse Tanguy Dupont.

Toutefois, l’étude réalisée par Hellio confirme les perspectives encourageantes observées en 2021 lorsque les copropriétaires sont lancés dans la démarche. L’isolation thermique des murs par l’extérieur est toujours identifiée comme le poste de travaux le plus efficace pour réaliser le plus d’économies d’énergie (52 %). Un choix en hausse de 4 % par rapport à 2021. “Accompagner un projet d’isolation et de ravalement d’une réflexion globale sur les autres travaux à envisager permettrait aux copropriétaires de bénéficier d’aides plus importantes, tout en réalisant davantage d’économies d’énergie”, souligne Tanguy Dupont.

La rénovation globale n’arrive qu’en 4e position des intentions de travaux avec 16 % des réponses exprimées, en recul de 3 % par rapport à 2021.

Nouveauté : le raccordement au réseau de chaleur est plébiscité par 7 % des copropriétaires. Ce système de chauffage bénéficie d’un Coup de pouce financier depuis septembre 2022.

Plus d’accompagnement pour changer d’échelle et générer des économies d’énergie plus conséquentes

En 1 an et demi, la part des répondants ayant déclaré ne pas avoir eu des recommandations sur les travaux de rénovation énergétique de leur copropriété de la part de leur syndic professionnel n’a pas évolué et reste conséquente (82 %). Preuve que les syndics ont plus que jamais besoin d’être accompagnés et sensibilisés par des professionnels de la rénovation. “La rénovation énergétique n’est pas leur métier, mais les syndics, au cœur du processus de décision, peuvent jouer un rôle prépondérant en mettant en relation la copropriété avec des experts pour leur apporter des préconisations et mobiliser les aides disponibles. Des conditions sine qua non pour convaincre les copropriétaires de passer à l’acte”, soulève Tanguy Dupont.

La part des répondants qui ne souhaitent pas réaliser la rénovation globale de leur copropriété est encore plus importante en 2023 qu’en 2021 (+ 13 %). Pour ceux qui la projettent, elle n’est envisagée qu’à long terme pour 16 % (4 ans et plus). Ces résultats démontrent que la priorité du Gouvernement donnée aux travaux de rénovation globale n’a pas encore fait ses preuves.

Des freins à la rénovation énergétique

Le principal frein aux travaux de rénovation énergétique reste financier : ils sont jugés trop chers pour 81 % des répondants, un chiffre en hausse de 6 % par rapport à 2021. Le côté anxiogène s’aggrave également, sans doute lié au coût des chantiers qui augmente.

Les copropriétaires n’ont qu’une connaissance partielle des aides à la rénovation énergétique. Sans surprise, ce sont les dispositifs les plus médiatisés par le Gouvernement qui sont les plus assimilés par les répondants : MaPrimeRénov’ est citée par 75 % des répondants, suivie de l’Éco-PTZ à 49 %. Les autres leviers comme les Certificats d’Économies d’Énergie (CEE) et aides locales restent encore peu identifiés.

MaPrimeRénov’ Copropriétés fait d’ailleurs partie des chantiers prioritaires de 2023 du ministre délégué au Logement, Olivier Klein. Afin d’inciter les copropriétés à s’engager dans une rénovation performante, ses plafonds ont été rehaussés et les aides individuelles doublées depuis le 1er février 2023 :

L’aide socle de 25 % du montant des travaux qui était plafonnée à 15 000 € de travaux est désormais plafonnée à 25 000 € de travaux ;

Les aides individuelles pour les foyers très modestes (bleus) passent de 1 500 € à 3 000 € et celles des foyers modestes (jaunes) de 750 € et 1 500 €.

Des arbitrages sont également à venir avec des banques partenaires de l’État, qui pourront accompagner aux mieux les gestionnaires et copropriétaires dans le financement de travaux de rénovation globale.

Un processus décisionnel trop complexe

Même s’il enregistre un léger recul de 3 %, le processus de décision en assemblée générale est toujours jugé trop long par 43 % des sondés. Entre la prise de décision en AG pour voter les travaux, le vote pour choisir l’assistant à maîtrise d’ouvrage et celui pour sélectionner les entreprises de travaux,  il faut compter environ 2 ans avant le lancement des travaux.

De plus, les projets sont souvent bloqués en assemblée générale faute d’une majorité suffisante. Un frein que le gouvernement envisage de lever par la révision des modalités de vote à la baisse : pour engager un chantier de rénovation énergétique, le vote de la majorité des copropriétaires présents suffira, contre les deux tiers requis jusqu’à présent. Des concertations sur ce sujet sont actuellement en cours aux ministères de la Justice et du Logement.

Les démarches administratives complexes sont moins citées, en recul de 16 %. Preuve de l’intérêt de faire appel à des professionnels comme Hellio, qui prennent en charge ces formalités.

“Les copropriétés accusent un retard important sur le volet de la rénovation énergétique. Les modifications intervenues au 1er février sur MaPrimeRénov’ Copropriétés sont encourageantes pour accélérer le mouvement des copropriétés vers des projets de rénovation, mais d’autres améliorations sont attendues pour aller plus loin dans l’accompagnement des copropriétés, en particulier celles qui ne peuvent pas entrer dans un schéma de rénovation globale”, conclut Tanguy Dupont, directeur des solutions Hellio pour l’habitat collectif.

Par MySweetImmo