Italie : Décès de l’ancien Premier MinistreSilvio Berlusconi, politicien ayant démarré sa carrière dans l’immobilier

Figure de la droite italienne, l’ancien premier ministre italien Silvio Berlusconi est décédé à 86 ans. Politicien insatiable, le Cavaliere s’est aussi illustré dans l’immobilier et la télévision. Focus.

Portrait de Silvio Berlusconi

© MIGUEL MEDINA AFP

 0

Avant d’être un politicien insatiable, Silvio Berlusconi, décédé lundi à 86 ans, s’est révélé un entrepreneur habile et innovant, de l’immobilier à la télévision, même s’il a manqué la révolution du numérique.

« Silvio Berlusconi a inventé la télévision commerciale en Europe, en même temps que les Britanniques, alors que le continent vivait encore sous un monopole des télévisions publiques nationales« , explique à l’AFP Carlo Alberto Carnevale Maffè, professeur de stratégie à l’Université Bocconi de Milan.

Il a conçu une télévision « très populaire, sur le même modèle que celui des tabloïds anglais, en amenant la vie quotidienne sur les petits écrans« , rappelle-t-il.

Sa télévision fait la part belle aux jeunes femmes dévêtues, aux jeux et talk shows légers.

Mais pour parvenir à ses fins, le « Cavaliere » s’est montré astucieux: dans les années 1970, la péninsule ne compte que la télévision publique RAI et des télés locales, un réseau privé national étant interdit.

« Son astuce a été de transmettre, simultanément sur toutes les télés locales le même programme, comme s’il s’agissait d’une télé nationale, ce qui lui permettait d’attirer beaucoup plus d’annonceurs publicitaires« , rappelle Umberto Bertelè, professeur émérite à l’Ecole de commerce de Polytechnique à Milan.

Un tour de passe-passe rendu possible grâce à de sérieux appuis politiques, avec le PSI – Parti socialiste italien – et le gouvernement de Bettino Craxi, mais aussi des banques.

Berlusconi, un urbaniste d’exception

C’est aussi grâce à de tels soutiens qu’il a pu lancer des projets immobiliers grandioses près de Milan (nord).

Après quelques expériences comme chanteur sur les bateaux de croisières et vendeur en porte-à-porte, c’est dans l’immobilier qu’il a commencé sa carrière proprement dite au début des années 60.

Parmi ses réussitesc: le quartier résidentiel « Milano 2 » construit dans les années 70, sur quelque 700.000 m2.

Grands espaces verts, système de déplacement triple (piéton, vélo et véhicule), services essentiels (banques, commerces, écoles…) pensés de manière intégrée avec les logements: Milano 2 est extrêmement novateur pour l’époque.

« Il a eu une intuition géniale, il a fait une +smartcity+ 50 ans avant tout le monde« , souligne M. Carnevale Maffè.

« Berlusconi a vraiment innové: il a donné le meilleur de lui-même comme urbaniste, il a une conception extraordinaire de l’espace urbain. C’est un aspect de lui un peu oublié« , ajoute l’expert.

Il se lance ensuite dans la télévision, et tente à partir des années 80 de s’internationaliser en fondant La Cinq (fermée en 1992) en France, et des chaînes en Allemagne et en Espagne.

Berlusconi investit aussi dans l’édition, en rachetant en 1990 le principal éditeur italien de livres et magazines Mondadori, dans le cinéma (société de production Medusa), les banques (Mediolanum…) ou le football (avec le Milan AC pendant 31 ans, puis le club de Monza).

Toutes ces participations étaient réunies dans la holding Fininvest, qui s’est retrouvée au bord de la faillite en 1993 en raison d’un endettement monstre lié notamment au projet « Milano 3 », avant de se redresser, rappelle M. Bertelè.

Berlusconi, un incroyable vendeur

L’un des plus grands talents de Silvio Berlusconi, souligne M. Carnevale Maffè, a été qu’il était « un incroyable vendeur ».

Il a ainsi inversé la logique en créant une régie publicitaire Publitalia ’80, avec un groupe télévisé lié, Mediaset, qui s’appelle désormais MediaForEurope.

« Il a été parmi les premiers en Europe à inventer le concept de convergence entre contenus publicitaires et éditoriaux, en créant des programmes adaptés à la publicité, et non l’inverse », note l’expert.

Déjà au début de son aventure dans la télévision, il a eu une « idée géniale » en disant aux « entrepreneurs: ne me payez pas maintenant, vous me payerez en pourcentage de l’augmentation de votre chiffre d’affaires », souligne M. Bertelè.

Ses succès entrepreneuriaux lui permettent de devenir en 2004, selon Forbes, la personne la plus riche d’Italie et la 169e au monde, avec une fortune estimée à 12 milliards de dollars.

Depuis son patrimoine et celle de sa famille s’est réduit à 6,8 milliards de dollars, le plaçant en 2023 au 3e rang en Italie et au 352e dans le monde.

« Son grand défaut, c’est qu’il n’a jamais compris ni le numérique ni la télévision payante comme Sky et Netflix », manquant une révolution cruciale, juge M. Carnevale Maffè.

Par MySweetImmo avec AFP