Crise de l’immobilier neuf : les promoteurs et les petits maillons de la construction en première ligne

La crise de l’immobilier neuf touche durement promoteurs, artisans et sous-traitants. Faute de projets, défaillances et pertes d’emploi se multiplient, menaçant l’ensemble de la chaîne de construction en 2025.

promoteur se prenant la tete entre les mains avec une maison miniature en avant plan posé sur un sol qui se fissure

© adobestock

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Les promoteurs en difficulté face à la crise

La net ralentissement des constructions de logements en France en 2023 et 2024 a plongé des promoteurs dans une grave crise économique, qui commence à être ressentie par les petits maillons de la chaîne de construction : sous-traitants, artisans et intérimaires.

En deux ans, le nombre de permis de construire accordés pour des logements et les nouveaux chantiers ont chuté de plus de 30%, selon les chiffres officiels à fin novembre, qui seront complétés mercredi des dernières données pour l’année 2024.

Au total pour tout le secteur de la construction neuve, 14.740 entreprises ont fait défaut en 2024, ce qui menace plus de 45.000 emplois, selon une étude de BPCE l’Observatoire. La Fédération française du bâtiment (FFB) estime quant à elle à 100.000 le nombre d’emplois qui pourraient disparaître en 2025 si la crise continue.

Premiers à souffrir de ce coup d’arrêt, provoqué par l’envolée des coûts de construction et des taux d’emprunt, les promoteurs et constructeurs de maisons individuelles ont vu leurs rangs se clairsemer: 1.554 ont été en situation de cessation de paiements en 2024 d’après BPCE l’Observatoire.

Le marché des maisons individuelles a été « divisé par deux en deux ans donc mécaniquement des entreprises disparaissent« , souligne à l’AFP Sylvain Massonneau, vice-président chargé de la maison individuelle au pôle habitat de la FFB, qui a réduit de 25% les effectifs de sa société.

Egalement pris en étau entre baisse de la demande de logements et augmentation des coûts, le secteur de la promotion immobilière a connu près de 700 défaillances d’entreprises en 2024, toujours selon BPCE.

Le président de la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI) Pascal Boulanger alerte depuis plus d’un an sur la situation catastrophique dans son secteur.

Parmi les grands promoteurs, Nexity a supprimé 500 postes, dont 275 licenciements prévus, la filiale immobilière de Bouygues a diminué ses effectifs de 225 postes. Chez Vinci Immobilier, « 140 à 150 » postes ont aussi été supprimés.

Hémorragie chez les sous-traitants et les artisans

« On n’a pas de permis de construire, plus de client, donc pas de nouveau programme qui sort », explique à l’AFP un promoteur francilien, qui a souhaité ne pas être identifié, de peur de perdre les rares clients et partenaires restants.

Il a licencié la moitié de ses 20 salariés au cours des six derniers mois et garde les autres pour travailler « sur ce qui est en cours de construction. Mais il n’y a rien à commercialiser, donc quand tout sera livré, on licencie tout le monde et on passe à autre chose ».

Loin d’être le seul, ce promoteur évoque « une hémorragie » et craint un « effet cascade sur les transporteurs, les architectes, le gros oeuvre… »

Touchés aussi, les architectes voient des projets être suspendus et une activité qui diminue, ce qui se traduit par « des licenciements et des mises en redressement judiciaire » surtout chez les « petites structures qui ne vivaient que du logement privé », détaille Jean-Pierre Lévêque, vice-président de l’Ordre des architectes d’Ile-de-France.

La FFB confirme que « tout le monde souffre », compte tenu de l’ampleur du choc qui est « en train de se diffuser partout ».

Dans la construction, les entreprises de gros oeuvre sont au premier rang, car les premières à intervenir sur un chantier.

« On voit moins d’appels d’offres et notre volume d’activité a commencé à baisser, d’environ 15% pour le logement », rapporte Christophe Possémé, président de la branche maçonnerie et gros oeuvre de la FFB.

Le ralentissement de l’activité « s’accélère depuis fin 2024, on commence à voir des villes où toutes les grues sont à terre », symptôme d’un secteur grippé selon lui.

Thierry Laureau, membre du syndicat des artisans du bâtiment, la Capeb, confirme que les artisans dépendants de la construction neuve « sont de moins en moins sollicités » par les grandes entreprises de maçonnerie « et voient leurs carnets de commandes commencer à s’épuiser ».

L’emploi en intérim baisse fortement aussi

Côté emploi intérimaire, le nombre de travailleurs dans le bâtiment, calculé en équivalent temps-plein, a connu des baisses de 5% à 10% selon les mois en 2024, et même -12,1% en mai, d’après les chiffres de Prism’emploi, la fédération du secteur.

L’année 2025 s’annonce pire pour le bâtiment, un secteur « très long à s’arrêter et tout aussi long à reprendre », rappelle M. Possémé.

Par MySweetImmo avec AFP