Immobilier Ile-de-France : Les propriétaires gardent leurs biens plus longtemps
En Île-de-France, la durée de détention des logements continue d’augmenter. Cette tendance traduit un ralentissement de la mobilité résidentielle, accentué par la hausse des prix, la baisse des gains à la revente et le coût du crédit.
Nouveau
© adobestock
En 2024 en Île-de-France, selon les Notaires du Grand Paris, la durée de détention médiane est de 13,7 ans pour les appartements vendus et de 15,8 ans pour les maisons. Cet allongement est notable : depuis 2005, la durée de détention médiane a augmenté de près de quatre ans pour les appartements et de trois ans pour les maisons.
Cette tendance haussière est observable sur l’ensemble du territoire francilien, même si les rythmes varient selon les zones. À Paris, la progression est la plus marquée : la durée de détention des appartements y a augmenté de 38 % entre 2005 et 2024, une croissance plus mesurée à 36 % en Petite Couronne, tout comme en Grande Couronne.
Pour les maisons, la progression est plus modérée, mais les durées restent supérieures à celles des appartements. Elles augmentent de 26 % en Petite Couronne et de 24 % en Grande Couronne, marchés davantage composés de ménages familiaux souvent installés durablement.
Un ralentissement global de la mobilité résidentielle
Le vieillissement de la population constitue la première explication: les ménages plus âgés déménagent moins fréquemment, privilégiant la stabilité résidentielle. S’ajoutent des éléments conjoncturels tels que l’entrée en vigueur de la réglementation interdisant la location des passoires thermiques, qui pousse les propriétaires à mettre en vente des biens détenus depuis longtemps et qui ne sont plus aux normes pour une mise en location, ou encore la fin du dispositif Pinel, qui réduit l’incitation à l’investissement locatif dans le neuf et donc la rotation du parc.
Enfin, les conditions macroéconomiques – cycles de prix et niveaux de taux de crédit – influencent directement la décision de mise en vente, en modifiant la rentabilité potentielle des arbitrages immobiliers.
À Paris, les effets du cycle de prix
Le lien entre évolution des prix et durée de détention est particulièrement manifeste sur le marché parisien, composé quasi exclusivement d’appartements. Les biens de petites surfaces, souvent utilisés comme une première étape dans les parcours résidentiels ou comme placements locatifs, constituent un excellent révélateur de cette dynamique. Entre 2005 et 2024, la durée de détention médiane des studios parisiens a progressé de 40 %, et celle des deux-pièces de 65 %.
Ces hausses traduisent une transformation du comportement des propriétaires : là où la revente rapide prévalait il y a vingt ans, la stratégie d’attente et de valorisation patrimoniale domine désormais.
Évolution selon les cycles de prix
Sur le début de la période observée (2005–2010), les prix ont augmenté modérément et la durée de détention s’est stabilisée entre 8 et 9 ans.
La première accélération des prix (2010-2013), dans un contexte de forte demande, s’est traduite par une légère contraction de la durée de détention, autour de 8 ans, un niveau qui apparaît comme un seuil bas.
La seconde vague de hausse des prix (2018- 2021), portée par la baisse spectaculaire des taux d’intérêt, a de nouveau réduit la durée de détention des appartements parisiens d’environ une année.
Mais à partir de 2022, l’inversion du cycle change radicalement la donne : la combinaison d’une baisse des prix et d’une hausse des taux se traduit par un allongement sensible de la durée de détention, qui atteint 13 ans en 2024, soit son plus haut niveau depuis vingt ans. Les données partielles disponibles pour 2025 laissent entrevoir une stabilisation des prix susceptible de ramener légèrement cette durée vers un palier inférieur, sans toutefois revenir aux niveaux antérieurs à 2020.
Une décision de vente guidée par le gain attendu
Si le cycle de prix influence indéniablement la durée de détention, c’est avant tout le niveau de la plus-value potentielle qui guide la décision de mise en vente. Entre 2022 et 2024, la correction des prix a significativement réduit les gains à la revente, voire provoqué des moins-values pour certains biens acquis au pic du marché. Cette situation freine les arbitrages et alimente un attentisme : les propriétaires préfèrent différer la vente plutôt que d’enregistrer une perte ou une rentabilité insuffisante.
Ce phénomène a des conséquences directes sur la fluidité du marché. Les ménages qui souhaiteraient acheter une surface plus grande se trouvent contraints, car la baisse de la valeur de leur bien combinée à la hausse du coût du crédit réduit leur capacité d’emprunt.
Vers une inversion de la tendance ?
Le résultat est un blocage en chaîne : les petits appartements ne se vendent pas, les acheteurs potentiels ne se repositionnent pas sur de plus grandes surfaces, et le marché reste grippé. Néanmoins, la stabilisation observée en 2025 – avec des taux légèrement assouplis et des prix en léger redressement – pourrait redonner de la visibilité aux propriétaires, encourager une reprise des transactions et une baisse progressive de la durée de détention des appartements.
