Hausse de la taxe foncière : Pourquoi le gouvernement veut faire marche arrière
Le gouvernement envisage la suspension de l’augmentation de la taxe foncière après une semaine de critiques et tente désormais de reprendre la main.
Nouveau
© adobestock
Bousculé par une semaine de critiques venues de tous bords, l’exécutif envisage la suspension de l’augmentation de la taxe foncière prévue pour 2026. Cette hausse technique liée l’actualisation de la base de calcul en 2026 visant 7,4 millions de logements est devenue un véritable casse-tête politique en quelques heures.
Un tollé politique qui pousse vers la suspension de la hausse de la taxe foncière
La polémique est montée à une vitesse fulgurante. Mardi, le ministre du Logement Vincent Jeanbrun a reconnu que le gouvernement envisageait une suspension de l’augmentation de la taxe foncière. « Au moment où on est sur le budget, ce n’était pas le moment » d’appliquer cette mesure, a-t-il affirmé sur RMC/BFMTV, ajoutant qu’« il y a une volonté du gouvernement de pouvoir suspendre l’application de cette mesure ». Tout en précisant que ce n’était pas à lui « d’annoncer » officiellement ce report.
Cette hausse, destinée à s’appliquer en 2026, devait toucher 7,4 millions de logements, pour une augmentation moyenne de 63 euros. Un montant qui tombe mal dans un contexte de flambée continue : la taxe foncière a déjà bondi de 37,3 % en dix ans, poussée par son indexation sur l’inflation depuis 2018.
Le cœur du problème vient de la mise à jour des critères dits « de confort », intégrés dans les « bases foncières ». Eau courante, électricité, WC, lavabos… Autant d’éléments qui ajoutent artificiellement des mètres carrés au calcul. Une méthode dénoncée de toutes parts. Pour Sylvain Grataloup, président de l’UNPI, « Bercy a décidé de présumer que tous les biens ont ces éléments de confort et indirectement de présumer que les propriétaires concernés sont de mauvaise foi ».
Les associations de consommateurs ne décolèrent pas non plus. « Ce n’est pas le bon moment de lancer cette bombe », estime Jean-Yves Mano (CLCV), qui juge aberrant le principe même de cette mise à jour : « Je ne vois pas ce qu’un lavabo ou une douche ajoute à la valeur potentiel d’un immeuble, on n’en est plus là ! ».
Une consultation d’urgence pour tenter d’éteindre l’incendie
Face à la tempête politique, l’exécutif a lancé jeudi une « consultation flash » pour « examiner les évolutions nécessaires » de la taxe foncière et la rendre « plus transparente, plus claire et plus équitable ». Selon les ministères concernés, cette démarche se veut « transpartisane avec les parlementaires et les collectivités territoriales, en particulier les associations d’élus locaux ».
Mais cette annonce n’a pas suffi à calmer les critiques. André Laignel, premier vice-président délégué de l’AMF, rappelle que cette révision n’a fait l’objet d’« aucune demande de la part des collectivités » et juge que « le moment ne paraît pas forcément le plus propice ». Il parle même d’une « fausse manœuvre ».
La porte-parole du gouvernement, Maud Bregeon, a tenté de reprendre la main : « On se réserve le droit d’interroger la pertinence de cette mesure dans quelques mois, lors d’un point d’étape ». Elle insiste sur le caractère automatique du déclenchement : « un recalcul qui a été fait de façon automatique ».
Une fronde politique généralisée qui force le recul
L’annonce a soudé droite, gauche et majorité… contre le gouvernement. Gabriel Attal a demandé « l’abandon » de la hausse, affirmant que « l’immobilier et le logement, objectivement, c’est un échec ».
Jordan Bardella dénonce un « coup dans le dos porté aux propriétaires français » et affirme que ces derniers sont devenus « les vaches à lait » du gouvernement.
Mathilde Panot, elle, s’oppose à « prendre encore une fois de l’argent dans la poche des Français et des Françaises ».
Le Premier ministre Sébastien Lecornu a dénoncé un débat « agité par quelques démagogues », tout en admettant qu’il faudra « sans doute réviser la manière dont on calcule les bases des valeurs locatives », une réforme repoussée à 2030.
À ce stade, la pression politique rend très probable la suspension de l’augmentation de la taxe foncière, même si l’exécutif se laisse encore du temps avant une annonce officielle.
